Présente en Algérie depuis plus de trente ans, la firme canadienne de génie civil et de construction SNC Lavalin suscite depuis quelques mois des doutes quant à la probité des transactions dont elle a bénéficié. Des doutes qui se confirment avec la série d'enquêtes ouvertes aussi bien au Canada qu'en Suisse pour corruption, faux et usage de faux et blanchiment d'argent.Certes, SNC Lavalin reconnaît aujourd'hui des liens avec Farid Bedjaoui, l'un des principaux accusés dans l'affaire dite Sonatrach 2, et essaie de faire bonne figure affirmant que «ces contrats ont été négociés par d'ex-employés (actuellement poursuivis par la justice canadienne et suisse, ndlr)». Toutefois, l'ensemble des opérations de la firme suscitent des interrogations aujourd'hui, d'autant plus qu'aussi bien l'ex-président de SNC Lavalin, Pierre Duhaime, que le principal responsable des opérations Afrique du Nord, Riadh Ben Aïssa, qui ont présidé à la conclusion de ces contrats, sont aujourd'hui derrière les barreaux suite aux accusations de corruption. Il faut dire que le groupe canadien a bénéficié entre 2000 et 2009 de 6 milliards de dollars de contrats. A celle-ci a ainsi échu un contrat de près de 70 millions d'euros pour le suivi des travaux de l'autoroute Est-Ouest, projet sujet à polémique depuis quelques mois. De même qu'elle a eu à réaliser divers projets de transfert pour les barrages de Taksebt et de Koudiat Asserdoune, ainsi qu'une station de dessalement de l'eau de mer à Tipaza, pour ne citer que ceux-là. En 2009, SNC Lavalin bénéficiait d'un nouveau contrat de 1,2 milliard de dollars pour la conception et la réalisation d'une usine de traitement de gaz naturel. Un plan de charge faramineux pour une entreprise qui n'a pourtant pas bonne réputation depuis que celle-ci a pris en charge la réalisation de Makam Echahid dans les années 1980. Projet tristement célèbre pour être scandaleusement coûteux. Cependant, depuis l'éclatement du scandale Sonatrach, la firme canadienne est dans l'œil du cyclone. Celle-ci a, en effet, perdu plusieurs contrats. En plus de la réalisation de la pénétrante Annaba-Souk Ahras, les autorités ont retiré à la firme canadienne un contrat de 508 millions de dollars pour la réalisation de la ville nouvelle de Hassi Messaoud. La firme a beau affirmer que cela est en rapport avec les modifications apportées à la réglementation algérienne en matière de marchés publics, un câble diplomatique relayé par WikiLeaks affirmait en 2010 que cela ne pouvait être attribué qu'à l'enquête en lien avec le scandale Sonatrach. De même que la réalisation de la centrale électrique de Hadjret Ennous dans le cadre d'une joint-venture entre SNC Lavalin et Sonelgaz serait actuellement, selon les fait rapportés récemment par les médias, au cœur d'une enquête des services de sécurité. Ainsi, le groupe canadien serait accusé d'avoir obtenu des facilités dans l'attribution du contrat de construction et d'exploitation de la centrale, causant un préjudice estimé à 670 millions de dollars. Aujourd'hui, d'anciens cadres de la firme canadienne n'hésitent plus à prétendre que SNC Lavalin a institué le versement de pots-de-vin pour l'obtention de contrats en culture d'entreprise. La Banque mondiale a donné l'alerte fin 2011 dans le cadre d'un projet qu'elle finançait au Bangladesh. Depuis, la firme canadienne collectionne des déconvenues. Au Canada en premier lieu avec une enquête qui s'est soldée par l'arrestation de l'ex-patron du groupe, en novembre, au Québec. En Suisse, c'est la division Afrique du Nord qui a été la cible des enquêteurs. L'ancien vice-président à la division construction de la firme a été arrêté et emprisonné en pays helvète en avril 2012. En ligne de mire des transactions douteuses ont été opérées depuis le siège de la firme à Tunis ainsi que des liens avec le clan El Gueddafi en Libye. Etablir le lien avec la passation de contrats entachés d'irrégularités en Algérie n'était plus qu'une question de temps.