Le Front des forces socialistes (FFS) a réuni, hier, ses élus afin de débattre l'exercice de leurs missions dans un contexte où l'administration a tous les pouvoirs. Revenant d'un périple ayant mené le groupe parlementaire du FFS dans cinq wilayas du sud du pays, à savoir Laghouat, M'sila, Ghardaïa, Ouargla et El Oued, Ali Laskri a axé son intervention sur cette région du pays aux prises avec un marasme qui cache mal une situation particulièrement inquiétante. «Aujourd'hui, le Sud parle, le Sud proteste, le Sud revendique, le Sud nous interpelle», dit-il avant de noter que «les problèmes dans le sud du pays s'accumulent et se compliquent». Le premier secrétaire national du FFS fait le constat que «la situation est complexe et sensible. Elle est marquée par des bouleversements politiques, économiques, sociaux et culturels dans un environnement régional instable et incertain». C'est pourquoi, dit-il, la direction du parti a dépêché la semaine dernière son groupe parlementaire pour des missions d'information. Partant du constat fait sur le terrain, M. Laskri relève que «les modes de gestion tels qu'ils ont été mis en place ont atteint leurs limites. Nous assistons peut-être à l'émergence de nouvelles élites politiques et sociales susceptibles d'être porteuses de nouvelles évolutions et de nouvelles chances pour la construction démocratique de la société locale et de la société algérienne en général. Pour peu qu'on aille au-delà des perceptions subjectives et qu'on ne tombe pas dans les pièges de la singularité». Le groupe parlementaire du FFS, qui a choisi d'être auprès de la population du Sud lors de l'ouverture de la session de printemps du Parlement, trouve que «la priorité est d'abord de reprendre langue, d'établir un contact direct avec les gens qui bougent, de marquer notre solidarité avec des compatriotes qui ont longtemps souffert dans le silence, l'anonymat et l'isolement, et qui parfois sont tentés par la radicalisation». Ali Laskri estime que le message que voulait transmettre le FFS à ces populations est «de les convaincre que l'issue est dans l'action collective, dans la mobilisation pacifique, dans l'engagement citoyen, dans l'ouverture et non dans le repli et la fermeture». Et d'un autre côté «de réhabiliter la place et le rôle des représentants du peuple, et de réhabiliter l'institution. C'est un morceau de l'Assemblée qui est allé à la rencontre des femmes et des hommes du pays. Dans le contexte actuel, nous voulions montrer que toute question nationale est l'affaire de tous et doit être traitée comme telle. Et qu'en tout cas, les parlementaires du FFS sont déterminés à assumer le caractère national de leur mandat. Nous voulions aussi réhabiliter le rôle des partis politiques dans une telle conjoncture». Une conjoncture marquée par une menace sur l'intégrité territoriale du pays et à laquelle, dit-il, tout le peuple doit faire face et «ne pas compter sur un régime qui a failli». Ceci en appelant ses 1000 élus à être proches et aux côtés des citoyens. Des élus qui dénoncent d'ailleurs la centralisation des décisions au niveau de l'administration centrale et la limitation de leurs prérogatives. Etre attentif au vent qui souffle du Sud «Le pouvoir s'interfère dans tous les actes de gestion à tous les niveaux, nous l'avons dénoncé et continuons à le faire au niveau du Parlement. Même le contrôle parlementaire est difficile en raison de la primauté de l'exécutif», explique Hayet Taïati, députée FFS. Tour à tour, des élus ont tenu à décrire toutes les difficultés et obstacles auxquels ils font face dans l'exercice de leur mission, et dénoncer un code communal restrictif des prérogatives de l'élu. Maître Mostefa Bouchachi, député FFS, est pour sa part revenu sur les amendements de lois présentés par le pouvoir comme des «réformes politiques». «On parle de réformes, alors que dans les faits, il n'y en a pas eu. Nous avons eu droit à un feuilleton à la turque avec la commission Bensalah. Je suis vraiment triste pour l'Algérie qui a les pires lois dans toute la région et même en Afrique. Après 23 ans, nous enregistrons des reculs dangereux dans toutes les lois, qu'il s'agisse des associations, des partis, des élections et de l'information». Bouchachi estime que l'objectif tracé par le pouvoir est clair, c'est de ligoter la société civile et l'empêcher de s'organiser et de lutter pacifiquement pour le changement. «11 milliards de dollars comme budget pour la Défense cette année, pourquoi ne pas l'avoir octroyé au développement des régions du Sud», s'interroge le député en fustigeant toutes les dispositions restrictives des libertés consignées dans toutes les lois de ladite «réforme». Interrogé en marge de la rencontre sur les scandales Sonatrach, le député et membre du comité d'éthique du FFS, Rachid Halet, a estimé qu'«avant de parler de la corruption à Sonatrach, il faut d'abord parler de la corruption du régime lui-même. Le seul remède à cela, ce sont un contrepouvoir politique réel et une justice indépendante». Le Dr Halet note qu'il est important aujourd'hui d'être attentif au vent qui souffle du Sud.