Après 16 ans d'attente, de débats houleux et d'actions de protestation, le projet de loi portant organisation de la profession d'avocat sera examiné par l'Assemblée populaire nationale les 23 et 24 juin. Le président de l'Union des barreaux d'Algérie, maître Lenouar, estime que «globalement, le projet de loi ne porte pas atteinte aux droits et aux libertés de la défense». Le projet de loi portant organisation de la profession d'avocat sera débattu par les députés les 23 et 24 juin, alors que son adoption en séance plénière a été programmée pour le 2 juillet prochain. Attendu par la corporation depuis plus de 16 ans, ce projet de texte a fait l'objet de plusieurs moutures avant d'être déposé sur le bureau de l'APN. Il a suscité des débats houleux au sein de la corporation des avocats. Ces derniers avaient remis en cause une trentaine d'articles qui, selon eux, portaient atteinte aux droits de la défense, consacrés par la Constitution. Pour protester contre ces dispositions, de nombreuses journées de grève, des marches et le boycott des audiences ont été organisés durant ces deux dernières années, obligeant le ministère de la Justice à revenir sur certains aspects sujets de la contestation. La dernière mouture semble avoir suscité le consensus, même si certains articles du projet de loi ne font pas l'unanimité. Sa programmation pour un débat général a été très bien accueillie par le président de l'Union des barreaux d'Algérie, maître Mostefa Lenouar. «Nous avons sensibilisé les membres de la commission juridique du Parlement ainsi que de nombreux députés sur l'importance de ce projet de loi, et surtout sur les articles qui posaient problème. Nous avons été écoutés et nos préoccupations ont été prises en compte. La commission a examiné la mouture du ministre de la Justice, et a, elle aussi, apporté quelques changements, avant de soumettre la dernière mouture à débat.» Sur le contenu de ce projet de loi, Me Lenouar a déclaré : «Globalement, il ne porte atteinte ni aux droits de la défense ni à ses libertés. Certes, quelques dispositions pourraient faire l'objet de contestation, mais l'ossature du texte ne touche pas aux droits de la défense.» Après avoir informé qu'il démissionnerait au cas où le texte ne serait pas adopté, le bâtonnier s'est montré très «optimiste». «Il n'y a pas de raison pour que ce projet de loi ne soit pas adopté. Durant ces deux dernières années, nous avons énormément bataillé pour le faire sortir des tiroirs. Aujourd'hui, il a atteint la dernière étape. C'est vrai que la commission juridique est souveraine et que l'Assemblée est aussi souveraine, et leurs décisions doivent être respectées. Néanmoins, nous ne pensons pas que les députés ne l'adopteront pas. Ils sont suffisamment conscients de son importance chez les avocats et le justiciable.» Il y a quelques mois, le président de l'Union avait conduit la délégation de 15 bâtonniers à une rencontre avec les membres de la commission juridique de l'APN, pour débattre durant toute la journée le contenu du projet de loi, déposé et défendu la veille par le ministre de la Justice, Mohamed Charfi. En 2012, cette commission recevait une autre mouture, de la main de l'ex-ministre Tayeb Belaïz. Son contenu avait provoqué la colère des avocats. Sur les 134 articles dudit texte, une trentaine portait atteinte au droit de la défense. Les bâtonniers étaient divisés en deux blocs, entre ceux qui voulaient carrément le retrait du projet de loi, et ceux qui revendiquaient plutôt son amendement. Avec l'arrivée de Mohamed Charfi, les contacts entre la chancellerie et les avocats avaient repris. Un groupe de travail mixte avait été chargé de défricher la mouture déposée à l'Assemblée nationale pour en élaborer une autre. L'initiative est intervenue après l'assemblée générale des bâtonniers en décembre 2011 à Béjaïa, au cours de laquelle les participants ont appelé les pouvoirs publics à la prise en charge du projet de loi relatif à leur profession. Au sein de ce groupe de travail mixte (chancellerie/bâtonniers), des amendements ont été proposés en remplacement de ceux qui suscitaient la contestation. Des nombreuses réunions, une énième mouture a été retenue et défendue par le ministre de la Justice, M. Charfi, devant les membres de la commission juridique de l'APN. Certains articles, objets de contestation, ont été remodelés. A titre d'exemple, dans la précédente mouture, l'article 9 interdit à l'avocat de quitter l'audience en cas de violation du droit à la défense, alors qu'il a le droit de protester ou de boycotter l'audience. Dans son article 24, le projet de texte prévoyait dans sa précédente mouture des poursuites pénales contre un avocat s'il est auteur d'un incident d'audience, dans le nouveau projet de loi, les incidents d'audience relèvent du ressort du bâtonnier et du président de la juridiction, sommés de trouver une solution à l'amiable.