La jeune médecin bulgare se souvient d'avoir été d'un grand apport. Sa visite au niveau de l'hôpital Ernesto Che Guevara a été un grand moment d'émotion, surtout lorsque cette hôte de marque de l'Algérie s'est remémoré avec exactitude de l'emplacement des services. Reçue sans fastes particuliers, mais dans une profonde et sincère émotion, sans doute la première femme médecin étrangère venue de sa lointaine Bulgarie, et ce, juste au moment où le pays se relevait d'un insoutenable joug colonial. En effet, 50 ans après son passage, la sublime Vera Kitova, médecin, femme de lettres et artiste-peintre, revient à Mostaganem. Reçue à la fois par les plus hautes autorités de la wilaya, cette femme médecin au long cours, qui assume avec panache ses 74 ans, est arrivée à l'aube de l'indépendance de l'Algérie, alors que, dans leur grande majorité, les hôpitaux algériens étaient totalement démunis de ressources humaines. La jeune médecin bulgare se souvient d'avoir été d'un grand apport. Sa visite au niveau de l'hôpital Ernesto Che Guevara a été un grand moment d'émotion, surtout lorsque cette hôte de marque de l'Algérie s'est remémoré avec exactitude de l'emplacement des services. Elle parle alors avec spontanéité de l'accueil qu'elle avait reçu par le corps paramédical en activité à l'époque, car elle souligne qu'en cet automne 62, l'hôpital de Mostaganem était totalement démuni de médecins. Elle se souvient de ce jour du 10 novembre 1962, lorsque le président Ben Bella en personne reçoit la délégation bulgare à Alger et lui tient un discours dont elle se rappelle les moindres détails. Notamment, lorsque leur hôte leur parle de l'état de délabrement du système sanitaire et surtout des besoins colossaux en médecins. Agée à l'époque d'à peine 24 ans, affectée à l'hôpital civil de Mostaganem, la fringante gastro-interniste s'était mise à l'ouvrage avec fougue et engouement afin d'assurer, dans les terribles conditions de l'après-guerre, un véritable service hospitalier à l'ensemble des malades qui affluaient de toutes parts, d'autant qu'à l'indépendance, la wilaya de Mostaganem s'étendait jusqu'à l'actuelle wilaya de Mascara et aussi à celle de Relizane. Il fallait, dira-t-elle, tout organiser. Elle se souvient alors de l'engouement autour d'elle des jeunes infirmiers et infirmières qui s'attelaient à leur tâche avec un sens de l'engagement qui frisait le stakhanovisme. Elle n'a pas oublié l'accueil de «Monsieur Berbère, le directeur de l'époque, qui nous a demandé de nous répartir en fonctions des services et c'est ainsi que moi-même, je me suis occupée de la médecine «femme» avant de me consacrer à l'ouverture du service pédiatrie». Un service qu'elle a retrouvé complètement transformé et bien doté en personnels, ce qui me fait grandement plaisir, souligne-t-elle avec force. Parlant du rythme de travail, elle se rappelle qu'elle et ses collègues de la délégation médicale bulgare travaillaient sans interruption. Nous étions obligés d'œuvrer jour et nuit et nous n'avions aucun répit face à l'afflux de malades qui venaient souvent de très loin et qui étaient totalement démunis. Personne ne nous forçait à travailler à ce rythme, mais c'était notre devoir que de donner le meilleur de nous-mêmes afin de soulager les patients. Dans un français impeccable, elle souligne combien la pratique médicale en Algérie lui a été utile à sa formation, insistant sur «le sens de la responsabilité que j'ai apprise ici, en Algérie». Pour moi, dira-t-elle, «c'est en Algérie que j'ai pris conscience du rôle du médecin dans la société, surtout à travers les liens entre le praticien et son patient». Elle en a été tellement marquée que lorsque, une dizaine d'années plus tard, elle se retrouve à l'hôpital Bichat, dans les services du professeur Debré, ce dernier n'a pas manqué de remarquer son dynamisme et sa grande maîtrise des rapports médecin-malades. «Depuis, j'ai conscience que mon passage en Algérie a été très bénéfique pour ma propre formation». En sus des ses compétences médicales avérées, l'hôte de Mostaganem a plusieurs cordes à son arc. C'est presque par omission qu'elle décline ses passions pour l'écriture et pour la peinture. Sous la conduite du Dr Hajije, elle est allée à la rencontre de l'Ecole régionale des beaux-arts, où le miniaturiste et peintre Hachemi Ameur aura sans doute ouvert de nouvelles perspectives de collaboration dont Mostaganem sera encore une fois le réceptacle. En effet, Vera Kitova, quand bien s'en défend-elle, est une artiste de grand talent. Lors de ce bref séjour, elle n'a pas manqué de croquer quelques esquisses de ce qui deviendra sans doute une belle et généreuse exposition de peintures. L'occasion est trop belle pour qu'au prochain salon de l'art contemporain, dont on vient à peine de boucler la seconde édition, elle fasse partie des artistes-peintres invités, d'autant qu'elle n'a pas caché son profond désir de renouer les liens avec Mostaganem et ses frémissements très particuliers. Frémissements qui serviront certainement de trame à un livre que cette dame projette d'écrire afin d'immortaliser son passage à Mostaganem.