Le monde est vaste et, pour l'instant, 193 pays le constituent. Le lointain Groenland, rattaché au Danemark, rêve d'indépendance entre problèmes de développement, finances et recherche de partenariats, y compris avec la puissance coloniale. Le Groenland sera-t-il le numéro 194 ? Comme le dit la Première ministre du gouvernement groenlandais, «l'indépendance n'est pas une course, mais un objectif». Nuuk, 15 000 habitants, capitale du Groenland, terre glacée inuite depuis 4000 ans, mais danoise depuis le XVIIIe siècle. Le centre-ville est petit et tout le monde se connaît. D'ailleurs, le numéro de portable de la Première ministre du gouvernement groenlandais y circule relativement facilement. Direction le siège du gouvernement, situé simplement au sein d'un centre commercial, Nuuk Center, où au-dessus de magasins de souvenirs, d'un supermarché et autres boutiques de vêtements ou d'électroménager, sont étagés les ministères, le premier trônant au dernier étage. Fille d'un pêcheur d'Uummannaq, petit village isolé au nord de Nuuk, mort dans une chasse à la baleine, Aleqa Hammond s'est faite toute seule. Partie à 15 ans à la découverte du monde, elle a fait des études au Canada et voyagé dans une cinquantaine de pays et parle, aujourd'hui, couramment l'inuktitut canadien et groenlandais, le danois, l'anglais et l'allemand, ainsi que la langue des signes. Entrée en politique, connue pour son intégrité et sa combativité, Aleqa Hammond est élue, en mars 2013, à la tête de son parti social-démocrate Simiut (en avant), avec 42,8% des voix. Sans majorité absolue, elle prend la tête d'une coalition avec les libéraux d'Atassut et le parti de gauche des Inuits. En plein boom de la prospection pétrolière et minière due à la fonte des glaces et au réchauffement climatique, elle a la mission délicate de rassurer d'un côté les investisseurs, tout en tranquillisant les Groenlandais indépendantistes et tous les autres, inquiets de la mondialisation, de la disparition des activités traditionnelles de pêche et de chasse, tout autant que de l'influence grandissante des USA, du Canada et de la Chine. Dans un pays dur et hostile, cette mission a été confiée à une femme de 48 ans. C'est en effet, la première fois qu'une femme est élue Premier ministre au Groenland.