Chef-d'œuvre signé Howard Hawks et projeté le jeudi 19 septembre à 14h et 17h à la Cinémathèque de Sidi Bel Abbès La légende voudrait que Hawks ait réalisé ce film en réponse au western–qu'il n'aimait pas–de Fred Zinneman, Le Train sifflera trois fois. «Comment ça ? Ce shérif qui demande de l'aide à ses amis, et qui au final arrive tout seul, comme un grand, à affronter ses ennemis, ça donne un film ? C'est de la merde !» Et c'est ainsi que Rio Bravo arriva sur les écrans. On reprend toujours les mêmes, ceux découverts en 1948 dans La Rivière Rouge, autre très beau western hawksien, les John Wayne et Walter Brennan, on les accompagne d'un «bogosse» mi-crooner mi-alcoolo, Dean Martin, et on les affuble d'un p'tit jeune, aussi beau que monolithique, le rocker des ados, Ricky Nelson. Et le film ? Bah, on lui glisse la silhouette d'Angie Dickinson et ça fera l'affaire. Quant au cinéaste ? Est-il réellement «particulier» ? Est-il réac' ? Bah oui et suffisamment pour que le film devienne intéressant avec ses symboles machistes, virils, conservateurs, parfois anti-jeunes, mais on s'en fiche. On se laisse emporter par le récit pratiquement peaufiné dans une chambre et parfois même filmé dans des intérieurs où le désir croise la violence, on se laisse happer par les dialogues savoureux entre Wayne et Dickinson, qui se cherchent, se perdent, se rabibochent, et finalement s'aiment dans un happy end aussi jovial qu'incongru. Et puis au beau milieu de ce film, quelque chose se crée. Un je-ne-sais-quoi qui fascine les mioches de 7 à 77 ans. Une séquence musicale qui interrompt le temps du récit. Imaginez une pièce. Quatre hommes dont l'un allongé. Il fume. Celui d'en face joue de la «gratte», et le plus vieux des quatre souffle dans son harmonica comme on esquisse un sourire trompeur. Le fumeur chante. Le plus jeune le regarde amoureusement. Et le film prend des allures de tranquillisants. Il faut savourer, se prêter au jeu et finir par accepter l'émotion. Chagrin d'amour, peine d'un quotidien morne, désillusion d'une vie sans idée, on songe à tout cela et puis on se tait et l'on finit par comprendre. Hawks l'avait saisi, Dean le clame haut et fort : «It's time for cow-boy to dream». Oui, rêvons !