La nomination de Mourad Medelci au poste de président du Conseil constitutionnel n'aura été une surprise que pour ceux qui sont encore atteints de cécité politique pour ne pas voir, dans ces changements au pas de charge au niveau des institutions de l'Etat, une stratégie de conservation et de sécularisation du pouvoir en place entre les mains de Bouteflika et du clan présidentiel. Les puristes chercheront en vain une logique dans le parcours atypique du successeur de M. Belaïz, passant du secteur du Commerce aux Affaires étrangères avant cette dernière escale de Hydra et les missions dévolues à cette institution. Rien, dans son CV, ne le prédisposait à occuper une telle fonction qui requiert un parcours en rapport avec ses nouvelles prérogatives et une certaine maîtrise du droit constitutionnel et des sciences juridiques. La nomination à ce poste stratégique au sein de cette institution prend une dimension d'autant plus particulière à la suite de la maladie du Président et des appels insistants lancés par certains milieux dans le sens de l'application de la procédure d'empêchement contre Bouteflika et de la déclaration de la situation de vacance du pouvoir. Même lorsque la santé de Bouteflika était au plus mal, amenant les plus téméraires parmi ses fidèles qui se forçaient à croire encore à son retour aux affaires à douter de cette option à la vue des premières images du Président méconnaissable diffusés à partir de son hôpital parisien, le Conseil constitutionnel, sous la conduite de M. Belaïz, est resté de marbre, se montrant sourd et insensible aux interrogations des uns et des autres sur sa capacité à poursuivre son mandat. Ce débat n'est pas encore définitivement clos, même avec le semblant de reprise des activités officielles de Bouteflika que la télévision nous sert avec un sens de la démesure pour faire passer la pilule au sein de l'opinion nationale et des partenaires étrangers de l'Algérie. D'où le choix d'un homme de confiance sur lequel Bouteflika peut compter pour se dresser contre toute tentation de le faire destituer pour raisons médicales, comme l'avait fait le président du Conseil constitutionnel sortant. A cette mission – de médecine d'urgence – dévolue à M. Medelci s'ajoute une autre feuille de route, qui prend des contours de plus en plus précis avec le dernier changement ministériel et les nouvelles nominations opérées aux postes-clés de la Justice, de l'Intérieur et de la Communication, en relation directe avec la prochaine élection présidentielle d'avril 2014. Le rôle du Conseil constitutionnel dans le recueil et la validation des candidatures et des résultats des élections place cette institution en première ligne du dispositif électoral sur lequel Bouteflika et son entourage tiennent à avoir un contrôle total pour le maintien du système en place. Quand on voit l'importance conférée dans les Etats démocratiques au Conseil constitutionnel, où siègent des «sages» parmi les personnalités nationales connues pour leur probité morale, politique et leur dévouement à la chose publique, dont des chefs d'Etat, il y a de quoi être triste de voir comment, en Algérie, cette institution est vidée de toute sa substance démocratique et républicaine. On en a fait un instrument de et du pouvoir.