L'issue du Dialogue national est suspendue à l'accord d'Ennahdha sur l'une des nouvelles personnalités proposées, notamment l'ex-ministre de la Défense, Abdelkarim Zebidi. Tunis (Tunisie) De notre correspondant Une solution pourrait également venir à travers une équipe mixte dirigeant le gouvernement. Face à l'attachement d'Ennahdha à la candidature d'Ahmed Mestiri et au rejet de cette personnalité par l'opposition, le Dialogue national est bloqué. Le quartette parrainant les négociations a certes recouru à l'élargissement de l'éventail des candidatures, mais personne n'est jusque-là parvenu à réunir l'unanimité autour de lui. Les candidatures de Abdelkarim Zebidi, ex-ministre de la Défense, Nouri Jouini, dernier ministre de la Coopération internationale sous Ben Ali, et Fadhel Khalil ne paraissent pas convaincre les islamistes de se désister de leur candidat fétiche, Ahmed Mestiri. La candidature de Zebidi a pourtant réuni un quasi-consensus. La désignation de Zebidi n'est restée suspendue qu'à l'accord d'Ennahdha, mais les islamistes ne se sont pas jusque-là prononcés. «Seule une candidature comme celle de Mestiri les tranquillise quant à une sortie honorable du gouvernement», a déclaré Lazhar Bali, le président du parti centriste El Amen. «Ils peuvent aller jusqu'à saborder le Dialogue national pour protéger leurs arrières», a affirmé le constituant du Front populaire, Mongi Rahoui. Vers une direction collégiale Mais l'absence de consensus constitue un échec lourd de conséquences pour la classe politique. C'est pourquoi les dirigeants de parti, y compris Ennahdha, vont faire tout ce qu'il faut pour trouver la bonne recette. Ils n'ont pas droit à l'erreur. La solution d'une direction collégiale pourrait être envisagée, mais se posera la question de la répartition des prérogatives. Tension extrême La journée d'hier n'était pas de tout repos aussi bien pour les partis politiques participant au Dialogue national que pour les organisations nationales le parrainant. Il s'agissait en effet de parvenir à arracher un accord de dernière minute sur une personnalité consensuelle pour le poste de chef de gouvernement afin de sauver la feuille de route en cours. Tout le monde a fait des propositions. Les organisations parrainant le Dialogue national ont proposé Mohamed Fadhel Khalil, ancien gouverneur de la Banque centrale et ministre de Bourguiba. Le parti Ennahdha a proposé Nouri Jouini, dernier ministre du Développement et de la Coopération internationale sous Ben Ali. Contacté, ce dernier aurait refusé le poste. Ennahdha tient à «son» Mestiri Une telle proposition, si elle se confirme, posera des interrogations sur le degré de sérieux avec lequel les islamistes sont en train de gérer le Dialogue national. «Je ne juge pas la compétence de Nouri Jouini mais il n'est pas sain de mettre un ministre de Ben Ali à la tête d'un gouvernement qui veut finir la transition avec l'ère Ben Ali. Ce n'est pas comparable avec le gouvernement Ghannouchi», a expliqué le constituant et porte-parole d'Al Massar, Samir Taïeb. Par ailleurs, un front centriste a été formé par plusieurs petits partis afin de trouver une solution de dernière minute. Il s'agit des partis Al Moubadara, le Tunisien pour la liberté et la dignité, l'Union patriotique libre, le Mouvement de la République, le Parti du décollage et le Parti de la troisième voie. Cette initiative a désigné comme porte-parole Kamel Morjane, président du parti Al Moubadara et dernier ministre des Affaires étrangères sous Ben Ali. Ce front centriste a proposé Abdelkarim Zebidi, ministre de la Défense des trois premiers gouvernements d'après le 14 janvier (Mohamed Ghannouchi, Béji Caïd Essebsi et Hamadi Jebali). Le nom de Zebidi a recueilli l'aval de vingt partis sur les 22 présents au Dialogue national. Cette désignation ne tenait qu'à l'accord d'Ennahdha parce que le parti Etakattol ne peut aller à contre courant s'il y a consensus autour d'un nom. Or, ce n'est pas le cas d'Ennahdha. Rached Ghannouchi n'a-t-il pas dit qu'«aucun candidat ne passera sans notre accord ?» Cet accord n'était pas encore venu alors que nous mettions sous presse.