Déclinée pour la première fois par Mitterrand à ses « amis » les dictateurs d'Afrique, réunis au Sommet de la francophonie de 1984, l'expression « bonne gouvernance » a fait florès dans nos contrées, sans produire de la démocratie. Elle a permis toute une moisson de lois et de discours inspirés de « spin doctors » pour fabriquer une image de marque des gouvernants, leur offrant un ticket d'entrée sur la scène internationale. Le système algérien est englué dans cette mascarade codifiée mêlant des principes universels de démocratie à des pratiques réelles d'autoritarisme : une gouvernance féodale dont la force de contagion est sans limite de ressources. Jusqu'à éradiquer toute recherche critique sur elle au niveau de nos universités. Allez éplucher les sujets de post-graduation des sciences politiques et sociales : l'embrigadement et la désertification y règnent. Cette gouvernance par le fait du prince est pourtant réelle. Trop d'illustrations pratiques l'indiquent. Il en est ainsi de la récente « alternance » au gouvernement. Par-delà les valeurs politiques discutables d'Ouyahia et Belkhadem son successeur, c'est tout le fragile échafaudage politique de ces dernières années qui en prend un coup. Avec cette caricaturale envolée du nouveau Premier ministre affirmant s'engager « dans de larges consultations, y compris en direction des personnalités indépendantes » pour former son cabinet ; et quelques heures après le reconduire à l'identique, histoire de porter un autre coup à la Constitution : point de présentation de programme, point de risque de motion de censure. Les leçons des spin doctors ne sont même pas suivies d'effets de façade ; au moment même où sont dispensées aux députés de l'Assemblée nationale, par une équipe américaine, des leçons de savoir communiquer. L'esprit féodal de gouvernance ronge tous les espaces de la société, jusqu'à la vie sportive. Au point où Hannachi, « le boss » gérant comme sa chose l'équipe de la JSK, a dédié (L'Expression, 26/27 mai) son nouveau trophée au nouveau maître des affaires : « Mercredi soir, j'ai tenu à le féliciter. Je suis persuadé qu'avec M. Belkhadem on va régler les problèmes du sport algérien. » D'une pierre, deux coups : voilà un ministre potentiel du bantoustan de Kabylie et du football.