Le Liban connaît un regain de tension, constate-t-on, comme pour se garder d'appréhender, autrement et donc plus sévèrement, une situation toujours menaçante pour ce pays, vingt-quatre années après la fin officielle de la guerre civile. Ce pays vit encore et toujours des équilibres très instables, comme en atteste la liste d'assassinats tous politiques, comme celui de vendredi, avec des rapports internes faits de défiance, décrits de manière rarement équivoque, mais toujours ambivalente. La question des armes détenues par les milices ainsi appréhendée, objet d'un vote du Conseil de sécurité en 2005, demeure toujours posée. Mais là, il s'agit officiellement du Hezbollah qui refuse de livrer son arsenal, tout en déclarant que ce sont là les armes de la résistance contre l'occupant israélien, une autre question que certains semblent considérer autrement, sinon qu'elle est totalement occultée. Sauf que dans cette position, le Hezbollah n'est pas seul, de nombreux dirigeants libanais se positionnant à ses côtés. En outre, et au plan intérieur, ce parti est allié à celui de l'ancien général Michel Aoun connu pour la guerre qu'il avait livrée à l'armée syrienne déployée au Liban, ce qui tend à contrarier certaines approches. Que valent de tels engagements et alliances, si le Hezbollah est accusé de profiter et même de recourir à sa puissance militaire, l'utilisant comme l'ultime argument face à ses adversaires, comme l'en accuse régulièrement l'ancien Premier ministre Saad Hariri ? C'est dans ce contexte que la Coalition du 14 mars, dirigée par ce dernier, s'engageait à «libérer» le pays de l'arsenal du Hezbollah. C'était hier lors de l'enterrement d'un des membres, tandis que le Hezbollah est mis en cause dans son assassinat. «Nous avons décidé de libérer le pays de l'occupation des armes illégitimes pour préserver son indépendance, sa souveraineté et sa paix civile», a lancé Fouad Siniora, ancien Premier ministre, qui rassure toutefois quant au mode opératoire. «Nous avons décidé de nous engager avec le peuple libanais dans une résistance pacifique, civile et démocratique. Nous avons rendez-vous prochainement avec la lutte pacifique», a indiqué M. Siniora, la précision étant ici d'une importance extrême. L'inverse plongerait alors ce pays dans l'inconnu, mais le message du leader libanais est en soi un acte d'accusation contre le Hezbollah que pourraient contrarier les alliances nouées par ce dernier. «Nous demandons la liberté et la justice, nous ne nous rendrons pas, nous ne reculerons pas, nous n'avons pas peur», a-t-il martelé. Cet affrontement entre les deux parties remonte à plusieurs années, plus précisément, celles durant lesquelles M. Siniora, à la tête du gouvernement, accusait déjà le Hezbollah de préparer un coup de force pour le renverser. C'était en 2006, avec un été marqué par l'agression israélienne, suivie d'un échange d'accusations, sentant le règlement de comptes, ou encore les périodes qui succèdent aux guerres et qui sont propices, pas toujours il est vrai, à des remises en cause. S'ensuivait une démission des cinq ministres issus du Hezbollah du gouvernement Siniora, parce que faisaient-ils alors valoir «la majorité insiste pour exercer le pouvoir toute seule», et que leur geste constituait «un avertissement à la majorité anti-syrienne». Le 16 septembre 2009, autre signe de tension avec la démission de onze ministres de la Coalition du 8 mars, du gouvernement dirigé à l'époque par Saad Hariri. C'était alors la fameuse barre du tiers plus du nombre total des ministres, et forcément, il y en a qui sont issus d'autres formations, et un tel décompte amène à plus de prudence. C'est cela le Liban, dit-on. Une phase surmontable alors ?