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Mohamed Hassaïne, vingt ans après...
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Mohamed Hassaïne était toujours sur la brèche, dans les domaines agricoles ou les coopératives, où il apportait ses connaissances de technicien de l'agriculture et son soutien de militant syndicaliste pour formuler et rédiger les cahiers de revendications, faire ouvrir les portes de l'administration et négocier le règlement des problèmes des ouvriers agricoles.
Ce matin du 28 février 1994, je fus accueilli au journal Alger républicain par la nouvelle de l'enlèvement du journaliste et syndicaliste Mohamed Hassaïne. Des hommes lui ont présenté des cartes usurpées de policiers et lui ont demandé de les suivre dans une R4 blanche, m'a-t-on précisé. Avec Abdelhamid Benzine, nous avons demandé à l'administration du journal de prendre contact avec son épouse et nous avons discuté du fait et de la place à lui accorder dans la publication…
J'avais rencontré Mohamed Hassaïne au fil tumultueux du mouvement syndical des années soixante-dix, au temps passionnant des assemblées générales et des congrès des unions territoriales de l'UGTA, en ces temps où les travailleurs étaient unis comme jamais pour exiger deux choses essentielles : le pain et la dignité. Discrètement, Mohamed me contactait à El Moudjahid pour m'informer d'un conflit dans une entreprise ou dans un domaine à l'est d'Alger, et j'essayais d'en faire un reportage ou de glisser l'information dans les pages de la rubrique nationale dirigée alors par Halim Mokdad, grand reporter devant l'Eternel. C'est une douzaine d'années plus tard que, par Halim Mokdad toujours, Mohamed Hassaïne m'avait contacté pour me demander s'il était possible de rediffuser dans le journal Alger Républicain, le récit de «L'attaque de la côte 616», un épisode de la lutte du commando Khodja. Il m'avait expliqué que l'un des personnages, menacé dans le récit par un membre du commando de l'ALN pour sa «fraternisation» avec l'ennemi, vivait toujours à Arbaâtache, où il roulait carrosse et faisait de la propagande contre la révolution agraire. Il me confia que lorsque le récit fut publié dans le journal El Moudjahid, il en acheta plusieurs exemplaires et les distribua dans les collectifs et les lieux de rencontre du village. L'homme en question, qui se faisait passer pour un moudjahid jusque-là, changea aussitôt d'habit pour celui de faux dévot, toujours au premier rang pour la prière à la mosquée, le chapelet à la main, égrenant ses «sebhan Allah». Mohamed Hassaïne était toujours sur la brèche, dans les domaines agricoles ou les coopératives où il apportait ses connaissances comme technicien de l'agriculture et son soutien de militant syndicaliste pour formuler et rédiger les cahiers de revendications, faire ouvrir les portes de l'administration et négocier le règlement des problèmes des ouvriers agricoles. Après la tentative d'OPA («offre publique d'achat», employé ici pour «mainmise») du Premier ministre, Mouloud Hamrouche, sur Alger Républicain, des amis, militants syndicalistes, me pressèrent de répondre positivement à la demande de Abdelhamid Benzine de revenir à Alger Républicain.
Passons sur de tristes épisodes qu'il n'y a pas lieu d'évoquer ici, sinon brièvement, ces faits et actes qui avaient profondément attristé Mohamed Hassaïne et combien d'autres militants — comme l'implosion du Parti de l'avant-garde socialiste (PAGS) et l'écartement de l'équipe dirigée par Mohamed Benchicou du journal. Je pris la responsabilité de relever le défi impossible, m'inspirant de Pascal Pia, premier directeur d'Alger Républicain (1938) qui disait : «Nous allons tenter de faire un journal raisonnable. Et comme le monde est absurde, il va échouer.» Dans cet esprit, pour réconcilier le journal avec sa vocation originelle, une rubrique syndicale fut ouverte et son animation confiée à la journaliste Samira Manaâ. Parmi ceux qui apportèrent leur participation, les premiers furent Mohamed Hassaïne et son compagnon de lutte et ami intime, Guendouzi, qui fut secrétaire national de la Fédération des travailleurs de l'enseignement et de la culture (FTEC). Pour le lancement de la rubrique, Samira Manaâ fit l'interview de Abdelhak Benhamouda, secrétaire général de l'UGTA, qui, à une question sur son appréciation de la ligne du journal, répondit qu'il était heureux que le journal retrouvât sa vocation, celle de défendre les couches populaires. Il fut assassiné, trois années plus tard, en janvier 1997.
A chaque fois que je rencontrais Mohamed Hassaïne pour échanger avec lui et «prendre la température» du monde du travail, la discussion déviait sur le feuilleton du commando Khodja, et ce, toujours à son initiative. Je lui disais en riant qu'il connaissait ce récit mieux que moi qui l'avais coécrit avec mon ami Abdelfattah El Houari. Il m'a dit qu'il trouvait fascinant le génie non seulement militaire de Mustapha Khodja, mais aussi politique.
Comment cela ? Il m'expliquait ce que je savais, à savoir qu'après avoir fait prisonnier, à Palestro (Lakhdaria), une demi-douzaine de soldats et officiers de l'armée française et avoir été encerclé par des milliers de soldats qui ratissaient le terrain, soutenus par des convois matériels, terrestres et aériens massifs, Mustapha Khodja forma ses hommes en petits groupes et répartit entre eux les prisonniers, avec instruction de protéger leur vie autant que la leur. Les petits groupes passaient ainsi entre les lignes et revenaient vers les endroits déjà ratissés. Pendant près d'une semaine, la presse coloniale en Algérie et en métropole consacrait ses premières pages, sept colonnes à la une, à «L'attaque de la côte 616». «C'était bien plus simple pour Mustapha Khodja, me disait Mohamed Hassaïne, de tuer ses prisonniers puis de se fondre avec son commando dans la population où il était comme un poisson dans l'eau. Mais l'objectif était politique, celui de faire parler le plus longtemps, à l'intérieur et à l'extérieur, de l'action armée de l'ALN et du FLN. Quel sang-froid lui a-t-il fallu pour garder vivants les prisonniers malgré la pression de l'armada militaire ! Puis de les relâcher sains et saufs !»
Pendant qu'il parlait, Mohamed avait les yeux pétillants et tout son visage était inondé d'une douce lumière.
Ceux qui l'ont enlevé devaient connaître ses engagements militants, ce qui était un «motif suffisant», selon leurs commanditaires, pour l'assassiner, mais avec un peu de chance s'il ne lisaient pas Alger Républicain, ils pouvaient ignorer son activité de journaliste. Aussi, nous avons décidé de ne pas aggraver la menace déjà lourde qui pesait sur notre camarade et donc de ne pas écrire une ligne sur l'enlèvement. Et si on se trompait ? J'essayais de m'imaginer comment Mohamed aurait souhaiter nous voir réagir. Aussitôt, les images de nos discussions sur la gestion politique du fait militaire par le commando Khodja m'ont convaincu que si les mercenaires des Saoudis voulaient faire du bruit, nous leur répondrons par le silence, quitte à marcher sur nos cœurs comme sur la braise. S'ils considèrent que voler la vie d'un homme est une «victoire», nous en ferons une défaite.
Le lendemain, seul un entrefilet discret, à l'intérieur des pages d'El Watan, informait de l'enlèvement de Mohamed Hassaïne.
Et cela convenait. Je me souviens que Mme Hassaïne, son épouse, est venue à Alger Républicain. Droite et digne, drapant de pudeur sa douleur, elle répondit à nos interrogations inquiètes sur le sort de Mohamed : «Lui sait la vérité (Houa ‘andou el haq).» Puis le silence… vingt ans de silence. Quelques jours plus tard, victime de l'embargo publicitaire public et privé et sous l'ultimatum arrivé à terme de ses créanciers, Alger Républicain cessait, pour la quatrième fois de son histoire de paraître. Quelques mois plus tard, durant le Ramadhan, à l'approche de la rupture du jeûne, une bombe de plusieurs centaines de kilos de TNT réduisait les locaux du journal en… parking. Que de vies épargnées ! Mais aussi combien d'autres allaient périr et, parmi nos confrères et amis du Soir d'Algérie, le journaliste et artiste Mohamed Dorbane aux chroniques subtiles et aux dessins mordants.
En ce 28 février 2014, j'unis le souvenir des deux Mohamed et tant d'autres compagnons dont la seule évocation me prend à la gorge et m'empêche, vingt ans après, de vous confier mon chagrin.
Un dernier mot, à la veille de ce vingtième anniversaire de sa disparition : j'apprends par l'article de Noureddine Bouderba, écrit au nom de l'association Manensaoueche, à laquelle je rends hommage pour son initiative, qu'aucune aide n'a été apportée à Mme Hassaïne Nacéra ainsi qu'à ses trois enfants durant ces vingt années. Aujourd'hui les assassins se pavanent en rentiers pensionnés par l'Etat pendant que veuves et orphelins des victimes de mercenaires, de harkis à la solde de l'Arabie Saoudite, sont abandonnés à leur détresse.
Contre ma volonté, j'ai été emporté loin de ma patrie par le cyclone qui a dévasté notre pays. Aujourd'hui, je me mets à la disposition de toute initiative de mes confrères journalistes et syndicalistes visant à honorer et célébrer la mémoire des martyrs de l'Algérie indépendante.


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