Le créateur et directeur de la salle de spectacles Cabaret Sauvage, Méziane Azaïche, nous fait le bilan de Barbès Café. Il nous informe à cette occasion que ce spectacle partira en tournée. -Quelles sont les nouveautés de Barbès Café pour cette édition ? La première nouveauté, c'est qu'il y aura plus d'émotion par rapport aux éditions précédentes (rire)…, car Barbès Café vit ses dernières dates au Cabaret Sauvage et à Paris en général. Ce spectacle, créé par notre cabaret, a rendu hommage à beaucoup d'artistes et de chantres, particulièrement algériens. Cette fois-ci, nous rendons hommage au spectacle lui-même et tous ceux qui ont, de près ou de loin, contribué à sa réussite. Déjà, l'édition de l'année dernière devait être la dernière, mais vu son succès, nous avons décidé de faire cette dernière édition pour conclure en beauté l'histoire d'amour entre Barbès Café et le Cabaret Sauvage. En tout cas dans sa formule actuelle. Pour marquer cette occasion, nous avons enregistré le spectacle et édité le disque audio (le CD Barbès Café est en vente au Cabaret Sauvage depuis le 19 mars, Ndlr). -Pour les quatre ans d'existence du spectacle, quel bilan faites-vous ? Le bilan est positif sur tous les plans : financier, artistique et humain. C'est un spectacle qui mobilise, en travail permanent, seize personnes qui sont toutes encore ici. Elles n'ont jamais abandonné leur poste. C'est dire qu'il y a une énergie positive très forte qui se dégage de Barbès Café. Cela rime avec la fidélité des gens qui le portent avec joie et dévouement. Je vous assure qu'ils pourront travailler encore plusieurs années sur ce spectacle. Et pour moi, en étant le créateur, c'est là notre première grande réussite. Concernant le point financier, au début c'était très dur, mais Barbès Café s'est vite avéré comme un bon investissement, car il vit de ses propres moyens et n'a même pas eu besoin de subventions pour exister. Aujourd'hui, il n'y a pas beaucoup de spectacles qui attirent autant de monde et qui peut vivre sans aides financières extérieures. Nous n'avons jamais eu et nous n'avons pas d'angoisse d'argent ou d'affluence. Barbès Café s'est toujours joué à guichets fermés. -Et qu'en est-il du plan artistique, c'est-à-dire le contenu du spectacle ? Le principe de raconter l'immigration maghrébine en France avec une mise en scène musicale a séduit le public, certes majoritairement maghrébin, mais pas que. Beaucoup d'Européens viennent volontiers découvrir la musique nord-africaine et aussi une partie de notre histoire commune, une partie de l'histoire de France qu'ils ignorent. D'ailleurs, nous avons réalisé auparavant un petit sondage auprès de notre public. Les résultats ont indiqué que plus de 37% des spectateurs sont d'origine européenne. Cette popularité, Barbès Café la doit surtout à son fond et son contenu. L'idée de raconter l'histoire avec des chansons, notamment les chefs-d'œuvre des grands maîtres du chaâbi algérois et kabyle, a sûrement plu à tout le monde. Comme je l'ai déjà dit, le spectacle dégage beaucoup d'émotion et des moments très forts, mais en même temps il contient des séquences dansantes et même quelques scènes comiques. -Vu le succès et le bilan positif que vous dressez, pourquoi arrêter Barbès Café ? Vous savez, notre établissement a créé au long de 18 ans d'existence beaucoup d'autres spectacles, dont nombreux ont eu des succès autant que Barbès Café, voire mieux. Notre travail ne se résume donc pas à un seul spectacle. La décision de l'arrêter chez nous est un choix. C'est un spectacle vivant que nous avons amélioré à chaque séance depuis quatre ans, mais là on arrive à l'apogée de sa réussite. Le Cabaret Sauvage a besoin tout le temps de nouveau, chose maintenant difficile avec le Barbès Café. Donc, j'ai pris la décision de l'arrêter quand il est encore au top. Je ne veux pas m'attendre à ce que le public parisien se lasse pour être obligé d'arrêter. Ce n'est pas parce que ça marche bien qu'on va l'user jusqu'à ce que les gens ne viennent plus. -Donc, c'est une fin inéluctable de ce beau spectacle musico-historique... Justement, non. Pas du tout ! Barbès Café partira en tournée dans toute la France et à l'international. Ce spectacle est la propriété du Cabaret Sauvage qui va le suivre et veiller à ce qu'il réalise une tournée réussie. Nous avons déjà des contacts pour programmer le spectacle dans plusieurs villes en France et en Belgique. Nous avons aussi quelques propositions de dates à Montréal, au Canada. -Avez-vous déjà prévu une nouvelle création dans le même registre que Barbès Café ? Oui, effectivement, on a travaillé sur une nouvelle représentation. Nous voulons ressusciter, à notre manière, les soirées de la musique orientale, pratiquement anéanties à Paris. C'est ce qu'on appelle généralement le Cabaret oriental dans son histoire et dans son imaginaire d'autrefois. Nous avons déjà entamé les recherches et nous travaillons sur des archives pour comprendre et pouvoir raconter comment sont nés ces cabarets et quels sont les messages qu'ils exprimaient. Ce sera donc un hommage aux cabarets orientaux à Paris. Comme Barbès Café, le nouveau spectacle a un message politique de l'immigration maghrébine. Nous ne sommes pas bêtes, nous savons qu'il y a beaucoup d'avancées positives, mais il y a beaucoup de chemin à faire.