Meziane Azaïche est le patron du Cabaret sauvage à Paris. Il est le concepteur et le producteur du spectacle musical «Barbès Café». -Comment a été conçu ce spectacle et à partir de quelle idée ? L'idée de départ était de rendre hommage aux anciens artistes qui nous ont ouvert plusieurs portes en France. Ils ont créé des chansons et des musiques qu'on doit faire redécouvrir au public. Nous avons essayé d'évoquer les douleurs des immigrés à travers la chanson et le théâtre. Dans le spectacle, une comédienne raconte comment ça se passait dans les bistrots parisiens. Sans l'apport de ces anciens artistes, on sera toujours là à ramer, à se chercher. Ils ont fait beaucoup de travail pour les nouvelles générations. Ces générations ont aujourd'hui un héritage extraordinaire avec des chanteurs tels El Hasnaoui, El Anka ou Slimane Azem. Pour la conception du spectacle, nous avons pris les grands moments de notre histoire en France, comme la guerre d'indépendance, les événements du 17 octobre 1961, l'élection de François Mitterrand, la marche des Beurs. Nous avons travaillé avec des historiens. C'est une façon de passer un message à nos enfants. En France, on ne parle pas beaucoup de la guerre de libération. Nous essayons d'en parler d'une manière plus libre, sans aucune rancune, mais on n'oublie rien. Après l'Algérie, le spectacle sera présenté au Maroc, ensuite en Tunisie. En France, on fait une grosse tournée. -Comment s'est faite la sélection des chanteurs ? Il y a tellement d'artistes ! Nous en avons choisi quelques-uns. Nous avons sélectionné surtout les chansons qui répondent à la mise en scène du spectacle et à des moments clefs de l'histoire d'algériens en France. Nous avons privilégié les chansons faites en France. C'est à la fois un patrimoine français et algérien. A l'époque, les chanteurs travaillaient le matin à l'usine, et le soir ils étaient dans les bistrots à jouer pour leurs amis et leurs familles. C'est de cette manière qu'ils se sont fait connaître en France, puis en Algérie. -Et d'où vient ce titre, Barbès Café ? Lorsqu'on évoque Barbès en France, on pense aux arabes qui y vivent, aux immigrés. Café, parce que l'histoire se passe dans un bistrot, là où les immigrés se rencontraient, écrivaient leurs lettres, recevaient leur courrier, écoutaient de la musique et parlaient de leurs difficultés (…). Nous avons fait des recherches dans les archives des images vraies qui parlent aux gens. On voit dans ces images les algériens jetés dans la seine en 1961. Chaque image est associée à un dialogue ou à une chanson. Aujourd'hui, en France, les bidonvilles existent toujours. Au lieu que ce soient les algériens ou les maghrébins, ce sont les roumains ou les gitans qui y vivent. Cela fait mal.