Après le succès de 1998 et la déconvenue de 2002, les Français espèrent renouer ce soir avec la victoire. Ils croisent les doigts et piaffent d'impatience de voir les Bleus décrocher une deuxième étoile face à l'Italie en finale de la Coupe du monde qui se déroule à Berlin. Une ambiance de liesse s'est déjà emparée des villes et villages de l'Hexagone depuis la qualification en demi-finale. A Paris, la joie a gagné les quartiers populaires et les endroits fréquentés par les jeunes. La mairie de Paris a déployé plusieurs centaines de posters géants sur les grandes artères de la capitale, avec l'inscription en anglais : « I love les Bleus » (j'aime les Bleus). La façade de l'Assemblée nationale a été ornée d'une écharpe gigantesque frappée des couleurs de la France. Idem pour les balcons et les fenêtres des immeubles, d'où pendent des drapeaux français et des posters des joueurs de l'équipe nationale. Les cafés et bars se sont mis aussi de la partie. Tous se préparent à l'accueil des milliers de supporters qui préfèrent, en général, suivre le match en dehors de chez eux. Pour ceux qui veulent être en plein air, des écrans géants sont installés au niveau des grandes places parisiennes ou dans des stades, comme le Parc des Princes à Boulogne ou Charlety dans le 14e arrondissement. En cas de victoire, plus d'un million de personnes vont se ruer sur les Champs Elysées. Depuis hier, un impressionnant dispositif de sécurité est déployé sur l'une des plus belles avenues du monde. Mission : débusquer en amont les éventuels casseurs et pillards susceptibles de gâcher la fête. Le ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy a donné des consignes fermes aux 6000 policiers chargés d'encadrer les manifestations dans toute la France. A Marseille, la même atmosphère s'est emparée de la ville. Si la France gagne, la nuit risque de se prolonger jusqu'au petit matin au Vieux-Port et dans les quartiers de la Castellane, d'où est originaire le maestro de l'équipe de France Yazid Zidane. « Mais nous ne sommes pas encore là », tempère Didier, infirmier dans une unité de soins dans un hôpital gériatrique dans la banlieue parisienne. Passer l'écueil de l'Italie n'est pas une mince affaire. Les joueurs transalpins ont de l'expérience et un moral d'acier. Ils voudront à tout prix prendre leur revanche après tous les matchs perdus contre les Bleus. Il recommande de ne « pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué ». Ce n'est pas l'avis de Karim, immigré égyptien, vendeur de fruits et légumes dans un marché populaire du 11e arrondissement. Pour cet amoureux de la balle ronde, si la France a atteint la finale, c'est quelle est en mesure de remporter la coupe. « L'équipe s'est beaucoup améliorée depuis le deuxième tour, se plaît-il d'analyser. Les joueurs ont repris confiance en eux. Ils se tueront rien que pour ne pas décevoir les millions de supporters qui les ont acclamés dans les rues à l'issue de chaque rencontre gagnée. » Certes, tout le monde craint cette équipe d'Italie, capable de renverser le cours du match à la dernière seconde, mais à ce stade de la compétition, tous les Français rêvent d'une deuxième Coupe du monde. Y compris les hommes politiques dont nombre d'entre eux font aujourd'hui le déplacement en Allemagne pour soutenir leur équipe nationale aux côtés de Jacques Chirac et de Michel Platini. « Zizou, c'est le dalaï-lama du foot » Hier, tous les quotidiens et magazines français ont consacré leurs couvertures au légendaire parcours des Bleus. Mais c'est incontestablement au capitaine des Bleus Zinedine Zidane que les médias ont rendu un flamboyant hommage. Le journal populaire Le Parisien lui a consacré un dossier de douze pages pour raconter le « destin fabuleux du dieu du football ». Les mots n'étaient pas assez forts pour évoquer les qualités sportives et humaines d'un « enfant d'immigré algérien qui n'a jamais rien demandé à personne ». Magicien du ballon, dieu des stades, symbole d'honnêteté et de sérieux, héros incontestable, dalaï-lama du foot, star admirée ou simplement très bon chef d'entreprise, ce sont là les quelques adjectifs utilisés par la presse française qui lui souhaite de finir sa carrière ce soir, à 23 h, avec panache et en apothéose. « Voilà l'honnête homme du XXIe siècle : extra mais pas ultra, Zidane est à la fois extrême dans les talents et modéré dans les comportements », avait dit de lui Jean-Pierre Raffarin, sénateur et ancien Premier ministre français. Pour Thierry Breton, actuel ministre de l'Economie, « Zizou est un vrai leader, symbole de la vertu, du courage et de la discrétion. Il est aussi l'un de nos compatriotes les plus connus du monde ». Ce soir, « l'homme le plus cool de la planète », selon le New York Times, mettra en œuvre tout son talent et son intelligence pour quitter l'arène discrètement mais victorieusement. Il rejoindra ainsi le club très fermé des grands joueurs de l'histoire du football, avec comme collègues Pelé, Maradona et Beckenbauer…