L'ingénieux cinéaste noir américain Spike Lee présentera lors d'une séance spéciale son film attendu sur l'ouragan Katrina qui a ravagé, il y a un an, la ville de la Nouvelle-Orléans. Il s'agit d'un documentaire de quatre heures qui a été montré le 16 août en première mondiale au New Orleans Coliseum devant 16 000 spectateurs. Il sera de nouveau montré officiellement, avant Venise, à la Nouvelle-Orléans, le 29 août, pour commémorer le désastre qui a détruit la ville. Une ville qui ne redeviendra jamais plus comme avant. Le titre du film de Spike Lee : When the levees broke : arequiem in four actes donne le ton de cette œuvre que le magazine Newsweek qualifie déjà de l'« œuvre quintessencielle » de Spike Lee depuis 20 ans. Selon Newsweek, Spike Lee interroge les gens, les victimes du désastre qui ont pu survivre et qui ont tout perdu. Ils sont amers et déçus. L'aide du gouvernement fédéral a tardé à venir. Les agences fédérales, les responsables de l'Etat de la Louisane, ceux de la ville habitée par 70% de Noirs américains ont été totalement incapables de gérer la situation d'une ville réduite en quelques heures à l'état de ruines. Le document de Spike Lee est très attendu à la Mostra que son directeur, pour la troisième année consécutive, Marco Muller, a présenté dans ses grandes lignes. La rétrospective est consacrée à l'œuvre du cinéaste brésilien Joaquim Pédro de Andrade, représentant brillant et iconoclaste du cinéma Novo aux côtés de Glauber Rocha et Nelson Perira Dos Santos. La Mostra 63 aura comme d'habitude quatre sections : Venezia 63 (compétition), hors compétition (films importants faits en 2006), Orizonte (nouvelles tendances et recherches) et Corto Cortissimo (compétition de courts métrages fiction). La Mostra 63 s'ouvrira avec le film de Brian de Palma : Black Dahlia, en compétition. En compétition aussi, des films de Gianni Amelio, Stephen Frears, Benoit Jacquot, Alain Resnais, Jean-Marie Straub et d'autres venus de Russie, de Chine, du Japon et de Thaïlande. Manoel de Oliveira sera hors compétition comme David lynch qui recevra le Lion d'or d'honneur) ou Oliver Stone (lequel amène son film sur le 11 septembre 2001). Chose rare à signaler, le film tchadien sélectionné pour la compétition officielle : Daratt, de Mohamed-Saleh Haroun. Maintenu depuis trois ans à la tête de la Mostra (alors que l'Italie n'est pas un pays stable, les gouvernements changent souvent et mettent les institutions comme la biennale de Venise à rude épreuve), Marco Muller peut se réjouir d'avoir cette année carte blanche, puisque la gauche est de retour au pouvoir. La cinquantaine, très dynamique, de père italo-suisse et de mère italo-gréco-brésilienne (Marco Muller revendique même une ascendance égyptienne et parle l'arabe). Tout compte fait, le directeur de la Mostra parle 7 ou 8 langues parfaitement bien. Il est anthropologue, musicologue et a soutenu un doctorat d'Etat en littérature chinoise durant son long séjour à Pékin. Voyageant entre Pékin, Shanghaï et Hong Kong, Marco Muller a pris goût au cinéma chinois, et de retour en Italie, il a organisé de grandes rétrospectives aux festivals de Pésaro et Turin. Poussé par sa passion du cinéma, il a dirigé successivement les festivals de Pesaro, Turin, Roterdam, Locarno avant d'être nommé à la Mostra de Venise, où il poursuit depuis trois ans une aventure ambitieuse et risquée. A Venise, il cherche à transmettre la « fièvre » du 7e art, contrairement aux festivals qui sont devenus, selon Muller, des manifestations « promotionnelles et touristiques ». S'agit-il d'une allusion au méga-festival d'octobre qui se déroulera à Rome ? Sans doute pas, un Romain ne peut qu'être tendre avec les Romains.