Enfin l'ébauche d'une loi plus adaptée à la défense et à la protection des enfants sera bientôt le sujet qui sera débattu à l'Assemblée nationale. La protection de l'enfant en danger est désormais consacrée par un cadre légal à travers l'avant-projet de loi proposé par le ministère de la Justice et qui sera bientôt débattu à l'APN. Une loi qui mettra peut-être fin aux agissements des adultes délinquants, pédophiles et autres, qui se sont distingués ces dernières années. Nul n'oublie les vagues d'enlèvements, de viols et d'assassinats d'enfants mineurs commis à travers toutes les wilayas d'Algérie. C'est ce qui a d'ailleurs amené les pouvoirs publics à revoir la réglementation en la matière et l'actualiser selon l'évolution de la société et ses exigences, sachant que les ordonnances de 1966, 1972 et 1975 ne sont plus adaptées à la réalité algérienne. Un vide juridique que vient combler cette loi par la protection judiciaire. «Même s'ils ont permis la prise en charge de l'enfant durant une période assez longue, ces textes sont inadaptés à l'évolution de la société qui a donné lieu à de nouveaux besoins de l'enfant et ont laissé apparaître des lacunes dans la législation nationale que la pratique commande de réviser», argumente-t-on. S'inspirant des instruments internationaux – notamment la Convention internationale des droits de l'enfant adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies le 20 novembre 1989, ratifiée par l'Algérie le 19 décembre 1992 – et du code de procédure pénale algérien, cette loi vient lui «assurer la protection contre tout ce qui peut toucher à sa personne et à ses droits», lit-on dans l'exposé des motifs. A la lecture de cet avant-projet, comportant 150 articles répartis en six titres, la mouture est principalement axée sur les enfants en danger et les jeunes délinquants. Deux aspects que le législateur a pris en compte et pour lesquels il garantit le droit à une protection sociale et juridique. Ces deux catégories d'enfants jouiront de tous leur droits et d'une protection à travers l'amélioration des conditions de travail des institutions spécialisées chargées de l'enfance et la mise en place de canaux permettant une meilleure coordination entre ces institutions, dans le but de mettre en œuvre la protection sociale. L'avant-projet de loi prévoit donc la création, auprès du Premier ministère, d'une instance nationale de protection et de promotion des droits de l'enfance qui sera présidée par un délégué national. Cet organe national sera présidé par un délégué national à la protection de l'enfance dont la nomination s'effectue par décret présidentiel. Les missions du délégué sont, entre autres, la mise en place des programmes nationaux et locaux de protection et de la promotion des droits de l'enfant, en coordination avec les différentes institutions chargées de la protection de l'enfant. Création d'une instance pour la protection de l'enfance «Le délégué national à la protection reçoit de tout enfant ou de son représentant légal ou de toute personne physique ou morale, les dénonciations relatives aux atteintes aux droits de l'enfant qu'il transmet, pour enquête et prise de décision adaptée à la situation de l'enfant, au service d'observation et d'éducation du milieu ouvert territorialement compétent. Il transmet en outre, les dénonciations susceptibles de comporter une qualification pénale au ministre de la Justice, garde des Sceaux, qui avise le procureur général compétent à l'effet de mettre en mouvement l'action publique le cas échéant», stipulent les articles 15 et 16. Ce délégué établit également un rapport annuel sur la situation des droits de l'enfant et l'état d'exécution de la convention sur les droits de l'enfant, qu'il soumet au président de la République ; ce rapport fera l'objet de publication et de vulgarisation dans les trois mois qui suivent cette notification. L'avant-projet de loi renforce également les prérogatives des services du milieu ouvert pour le suivi de la situation de l'enfant et de l'assistance à sa famille. Dans ce cadre, ils peuvent prendre des mesures conventionnelles qui maintiennent l'enfant dans sa famille – qui est le milieu naturel pour son épanouissement – et qui associent l'enfant et sa famille dans la prise de la mesure la plus adaptée. La mise à disposition des services du milieu ouvert de tous les moyens humains et financiers nécessaires à l'accomplissement de leurs missions sera assurée. Quant à la protection judiciaire, l'avant-projet de loi prévoit que le juge des mineurs est saisi par l'enfant en situation de danger, par son représentant légal, le procureur de la République, le wali, le président de l'APC, les services du milieu ouvert ou les associations ou organismes publics intéressés par les questions relatives à l'enfance – ou se saisir d'office. Cet avant-projet consacre aussi de nouvelles dispositions spécifiques garantissant aux enfants victimes de certaines infractions une protection spéciale et prévoit que l'audition d'un enfant victime d'agression sexuelle doit faire l'objet d'un enregistrement audiovisuel. Concernant les jeunes délinquants, cet avant-projet consacre une protection judiciaire et propose des procédures souples à tous les stades de la poursuite, en donnant le droit à l'enfant d'exprimer son avis et en l'associant à toute mesure pouvant être prise à son encontre. «Ainsi, la priorité est donnée d'abord à son maintien dans son milieu familial, ensuite sa remise à une personne ou une famille digne de confiance, et enfin son placement dans un centre d'hébergement adapté et spécialisé en matière de protection de l'enfance ou dans un centre hospitalier, si son intérêt supérieur l'exige», prévoit le texte de loi. Lequel n'omet pas de mettre en place des mécanismes spécifiques de protection dans la garde à vue des enfants délinquants, la détention provisoire, la consécration de la représentation obligatoire de l'enfant par un avocat lors de l'enquête préliminaire, la poursuite, l'instruction et le jugement. Le législateur a également introduit la proposition de mécanismes de médiation entre le jeune délinquant et la victime d'un délit ou d'une contravention, qui ont essentiellement pour but d'instaurer de nouvelles voies pour le règlement des litiges. Comme il a également suggéré d'instituer la journée nationale de l'enfant dont «la date sera celle de la promulgation de cette loi». Les dispositions pénales contenues dans le titre V prévoient, entre autres, des emprisonnements et des amendes. «Est puni d'un emprisonnement d'un à trois ans et d'une amende de 150 000 DA à 100 000 DA, quiconque exploite économiquement un enfant. La peine est portée au double lorsque l'auteur de l'infraction est un ascendant de l'enfant ou le responsable de sa sauvegarde» (art. 139). Comme est aussi puni pour la même peine quiconque porte ou tente de porter atteinte, par tous les moyens, à la vie privée de l'enfant, en publiant ou en diffusant des textes et/ou photographies pouvant nuire à ce dernier. Du côté du ministère de la Justice, ce texte de loi vise à «faciliter le travail des instances spécialisées en matière de protection de l'enfance et à établir des canaux de coordination afin de concrétiser les mécanismes de protection et en garantir l'efficacité». Et les dispositions du texte «s'inspirent des principes et valeurs de la religion musulmane ainsi que des articles 63 et 65 de la Constitution qui insistent sur la protection de l'enfant et l'obligation des parents à accomplir leur devoir d'éducation et de protection», ainsi que des traités et conventions internationaux ratifiés par l'Algérie, particulièrement la Déclaration universelle des droits de l'homme et le Pacte international relatif aux droits civiques et politiques, dont la Convention relative aux droits de l'enfant.