Les dernières révélations faites par le parquet de Milan sur l'affaire Sonatrach donnent froid dans le dos et scandalisent à la fois. Sur les pots-de-vin que lui a versés la société italienne Saipem, l'ancien ministre de l'Energie, Chakib Khelil, a consacré 54 millions de dollars à l'achat de trois appartements à New York. Cela signifie que cette somme n'est que le côté visible de l'iceberg, si l'on sait qu'il a été également à une certaine époque PDG de Sonatrach et président du conseil d'administration, c'est-à-dire qu'aucun contrôle ne pouvait s'exercer sur sa gestion, aidé en cela par la décision de Abdelaziz Bouteflika de geler le Conseil supérieur de l'énergie. De ce fait, Chakib Khelil régnait en maître absolu sur l'unique richesse du pays. Il a même failli vendre toutes les richesses du sous-sol aux Américains en faisant adopter par la chambre d'enregistrement appelée APN une loi en ce sens. Il a fallu que Louisa Hanoune du PT et Sidi Saïd de l'UGTA, soutenus par certains journaux, crient au scandale pour que la même assemblée des béni-oui-oui vote avec le même enthousiasme l'annulation d'un texte approuvé quelques mois auparavant. Cela n'a pas empêché le protégé du chef de l'Etat de continuer à voler allègrement l'argent du peuple algérien. Lorsque la rapine a atteint des dimensions insupportables, le locataire d'El Mouradia s'est vu contraint de se séparer de ce ministre véreux. Malheureusement, ce dernier ne sera pas inquiété par la justice. Et pour lui garantir l'impunité totale, il sera exfiltré discrètement. Depuis, une chape de plomb tombe sur l'affaire. Certes, une enquête judiciaire a été ouverte, mais rien ne filtre et aux journalistes trop curieux, on répond laconiquement que «la justice suit son cours». Interpol est saisi pour un mandat d'arrêt international mais on découvrira que le dossier est irrecevable parce que ne remplissant pas les conditions requises. Le sulfureux Amar Saadani, au patriotisme douteux, osera même interpeller le ministre de la Justice pour lui demander de classer le dossier. Depuis, l'omerta, cette loi du silence que s'impose la mafia sicilienne, entoure l'affaire Khelil. Aucun ministre ne veut en parler. L'APN et le Sénat observent le silence. A croire que tout le monde est soit complice, soit a peur des foudres du pensionnaire d'El Mouradia. L'affaire n'est maintenue en vie que grâce à la justice italienne qui informe régulièrement l'opinion mondiale sur le grand pillage perpétré par Chakib Khelil, l'homme qui a soutenu que «si on me touche, on touche au clan». Du côté algérien, on se voile honteusement la face en espérant que les lois de la biologie permettront un jour de reprendre le dossier et de rendre justice au peuple algérien. En attendant, merci l'Italie !