La Direction générale de la sûreté nationale (DGSN) cherche à acquérir 90 000 cartouches lacrymogènes de trois différents calibres, 61 000 grenades à main à usage intérieur et extérieur, 10 000 bâtons en cuir noir pour le « maintien de l'ordre », 1000 projecteurs de surveillance et de barrage routier, 2000 pinces d'immobilisation (sabots) de véhicule, 6500 batteries et 1500 antennes pour équipement radio. Elle prévoit également « la formation des cadres de la Sûreté nationale à l'évaluation et à l'appréciation des personnels », cherche à assurer des repas pour les pilotes et techniciens de son unité aérienne et envisage la fourniture de tissu en laine polyester bleu (pour la confection des uniformes). La DGSN affiche également un besoin de 850 t de papier, probablement pour l'usage administratif. Tous ces « besoins » ont fait l'objet de plusieurs avis d'appels d'offres nationaux et internationaux publiés dans le n°978 (05-11 août) du Bulletin officiel des marchés de l'opérateur public (Bomop), un hebdomadaire consacré aux appels d'offres et édité par l'Anep. Le marché portant « acquisition de cartouches lacrymogènes et de grenades à main » est réservé, selon le texte de l'avis d'appel d'offres, uniquement aux fabricants ou leurs représentants exclusifs. Mais à quoi servira tout ce matériel répressif ? L'institution dirigée par Ali Tounsi promet-elle plus de coups de bâton et de procès-verbaux aux citoyens indélicats ? Difficile de le savoir. Au niveau de la cellule de communication de la DGSN, l'on se montre très prudent. « On n'est pas au courant », avait-on indiqué. Toutes ces acquisitions pourraient être comprises, cependant, dans le cadre du « redéploiement de la police » sur le terrain, un projet lancé depuis quelques années déjà. C'est à partir de Tiaret que Ali Tounsi avait annoncé, le 29 juin 2005, l'élaboration d'un programme quinquennal de redéploiement de la police à travers l'ensemble du territoire national, « suite à une instruction » du président de la République, Abdelaziz Bouteflika. Ce « redéploiement » s'inscrit, selon ses initiateurs, dans le cadre de la lutte contre le crime organisé et la petite délinquance, dont l'ampleur est jugée « inquiétante » par les spécialistes et les observateurs. Ce programme a prévu le renforcement des rangs de ce corps de sécurité. En tout cas, le directeur de la DGSN a révélé, le 6 novembre 2005, que le président de la République voulait doubler l'effectif de la police, qui atteindra les 200 000 hommes en trois ans (2009). Par la même occasion, il a déclaré que la police ne dépendra plus de la Fonction publique et aura un statut particulier. Ce changement, a-t-il indiqué, vise l'amélioration des conditions de vie et de travail des agents de la sécurité. Pour se faire, Ahmed Ouyahia, alors chef du gouvernement, a déclaré, au lendemain de la signature d'un contrat d'armement avec la Russie en mars 2006, qu'un budget de 200 milliards de dinars sera dégagé pour doter les différents services de sécurité en moyens.