Vendredi soir, Cuba a été officiellement retirée de la liste américaine des Etats soutenant le terrorisme. «Le secrétaire d'Etat (John Kerry) a pris la décision finale d'abroger la désignation de Cuba comme un Etat soutenant le terrorisme, de manière effective aujourd'hui, 29 mai 2015», a indiqué l'Administration américaine. Le président Obama avait annoncé la position de la Maison-Blanche à la mi-avril et le Congrès avait 45 jours pour tenter de renverser cette décision. Cela n'a pas été fait. Très logiquement donc, il s'agit d'un pas supplémentaire dans la normalisation des relations entre Washington et La Havane, après un demi-siècle de tensions héritées de la guerre froide. Cette décision attendue fiévreusement par la population cubaine pourrait même constituer une étape cruciale ouvrant la voie à un échange prochain d'ambassadeurs entre les deux pays. Il y deux semaines, le président cubain Raul Castro avait clairement indiqué que dès que cette «accusation» serait levée, des ambassadeurs pourraient être nommés dans les deux capitales. La Havane figurait sur cette liste noire depuis 1982, aux côtés de la Syrie, du Soudan et de l'Iran. L'Administration Reagan l'y avait placée pour son soutien présumé aux séparatistes basques de l'ETA et aux rebelles des FARC en Colombie. «Todos somos americanos» La Maison-Blanche, qui a évoqué une nouvelle fois un possible voyage du président américain sur l'île communiste, s'est toutefois refusée à s'avancer sur un calendrier pour l'ouverture d'ambassades dans les deux capitales. «Todos somos americanos» (nous sommes tous américains), avait lancé Barack Obama le 17 décembre 2014, en annonçant depuis la Maison-Blanche ce rapprochement après des mois de négociations secrètes dans lesquelles le pape François fut personnellement impliqué. Le rétablissement des relations diplomatiques semble désormais à portée de main. Mais pour parler de normalisation, il faudra d'abord que les Américains lèvent l'embargo qu'ils ont décrété contre Cuba en 1962. Sévèrement renforcé par la loi Helms-Burton de 1996, l'embargo américain total sur les transactions économiques et financières avec Cuba est régulièrement dénoncé par La Havane comme un obstacle au développement de l'île. Quoi qu'il en soit, de nombreux observateurs soutiennent que la nomination d'ambassadeurs permettra d'améliorer les relations entre les deux pays. Le président Castro a néanmoins averti que «la normalisation est un autre sujet». Pour accélérer le mouvement, M. Obama a demandé au Congrès, dont les deux Chambres sont contrôlées par ses adversaires républicains, de travailler à la levée de cet embargo. Mais rien n'est encore gagné. Les adversaires du retrait essaieront probablement de bloquer la nomination d'un ambassadeur américain à La Havane et continuer de s'opposer à la levée de l'embargo sur les transactions économiques et financières, dont Cuba a le plus besoin pour pouvoir décoller. Tout au moins, ils tenteront de faire traîner les choses. Les Américains, eux, ont immédiatement profité des premières mesures d'assouplissement de l'embargo : tous les prétextes sont bons pour visiter La Havane : échanges éducatifs, scientifiques, religieux... Les voyages des Etats-Unis vers Cuba sont en hausse de 30% depuis janvier.