Il chante beaucoup l'amour et ses chagrins, l'exil et ses contraintes, la nostalgie et ses souffrances, mais il chante surtout la Kabylie. Akli D, heureux de rencontrer son public à Iguersafène, souhaite retrouver les montagnes fleuries des années 80' à travers la mobilisation de ses habitants pour l'art. Ce genre d'événement donne l'espoir de retrouver un jour la Kabylie d'antan. Akli D, vous êtes ici, à l'instar d'autres artistes, invité au festival… Il est vrai qu'on m'a invité, mais je me serais déplacé même sans officialité, puisque ce n'est pas la première fois que je participe à cet événement. Ma première participation était spontanée, j'étais de passage et j'ai eu la chance d'y assister, et depuis je viens seul ou à l'appel des organisateurs. Il faut dire aussi que je tiens à ce festival puisqu'il représente mon miroir, c'est à travers ce genre de rencontre que je me regarde. Vu qu'en France le miroir dans lequel j'étais habitué à me regarder est brisé. Je suis donc venu pour retrouver l'âme que j'ai perdue pendant ma jeunesse dans l'exil. Je suis venu aussi pour retrouver mes repères, mes racines et ma Kabylie dans le sourire de ses habitants, leur amour et leur joie. A travers les raconte-arts, comment vous trouvez la Kabylie d'aujourd'hui ? J'avoue que la Kabylie d'aujourd'hui est décevante, ce n'est point la Kabylie que nous ont laissée Mouloud Mammeri, Mohand Ouyahia ou Matoub Lounès. Cependant, ce genre d'événement donne l'espoir de retrouver la Kabylie d'antan. Je pense que ces raconte-arts auraient fait la fierté de Matoub Lounès. J'aime beaucoup l'esprit de l'amour, de la fraternité et du partage que ça dégage. La Kabylie aujourd'hui vit à Iguersafène, visitée par des étrangers et des algériens de tout le pays. Et puis, j'aime cette présence massive de la femme et sa participation dans l'organisation du Festival. La femme kabyle fait le quotidien avec l'homme, mais il lui reste du chemin dans la lutte pour l'égalité... Leur présence aux raconte-arts est une énième preuve de leur indispensabilité pour toute démarche vers la civilisation qu'on souhaite réussir. Si la femme kabyle a réussi à occuper la rue, elle reste inexistante dans les assemblées de prise de décision. Elle se voit aussi privée d'accompagner un être cher au cimetière le jour des funérailles. L'homme n'est rien sans la femme dans toutes les sociétés du monde. J'appelle donc les Kabyles à prendre soin de leurs femmes et à leur accorder le reste des droits qui manquent à leurs acquis. Puisque c'est la femme libre qui engendre l'homme libre. Si on s'exile aujourd'hui, c'est parce qu'on cherche la liberté de l'occident ; donc, autant nous libérer et rester chez nous ! Et je tiens à saluer les femmes d'Igersafène qui ont joué un rôle décisif dans la réussite de cet événement !