Depuis plusieurs mois, les autorités du pays émettent des signaux contradictoires. Alors que de hauts cadres de l'armée, notamment ceux chargés de l'encadrement du Département du renseignement et de la sécurité (DRS), sont remerciés, mis en retraite ou carrément emprisonnés, des directions relevant de ce même DRS sont désormais rattachées à l'état-major de l'ANP. Des décisions que des observateurs assimilent à des règlements de comptes entre le clan présidentiel et une partie des responsables du DRS. Mais voilà que par le truchement d'une circulaire publiée au Journal officiel, on apprend que les écoutes téléphoniques sont rattachées aux services du Premier ministre. Puis la problématique des caméras de surveillance est réglée en partie. Ces appareils, installés un peu partout sur les routes et dans les rues des grandes villes, seront désormais gérés par la DGSN. Un éclaircissement qui mérite d'être fait, d'autant que des défenseurs des droits de l'homme voient en cette pratique une volonté du pouvoir de surveiller les citoyens. Pour les partisans de ces changements qui s'opèrent au sein des services du Renseignement, l'œuvre n'a rien d'extraordinaire. Il s'agit ni plus ni moins d'une volonté d'adapter cette institution aux mœurs d'une vie démocratique ; autrement dit réaliser le rêve de plusieurs générations de militants qui consiste à voir émerger dans le pays un Etat civil expurgé des ravages de la police politique. Pourtant, cela fait au moins quatre ans depuis que les tenants du pouvoir tentent d'expliquer que les Algériens n'ont plus rien à craindre à propos de leurs libertés. La loi portant Etat d'urgence étant abrogée, les verrous qui ont de tout temps été dressés contre les libertés des citoyens devaient donc disparaître. Ce n'est malheureusement pas le cas. Des partis politiques, des journalistes et des militants de tous bords se plaignent toujours de la présence de ces vigiles qui ont l'œil et l'oreille partout et sur tout. La présence de ces fonctionnaires hors pair s'étend jusqu'aux entreprises publiques. Plus que cela, la nomination des hauts cadres de l'Etat est toujours soumise à la fameuse enquête d'habilitation qui permet de connaître non seulement le parcours politique et professionnel du candidat, mais également des facettes de sa vie privée. Cela démontre que l'instauration d'un «Etat civil» qu'entonnent à longueur d'année les proches du pouvoir est loin d'être une réalité. Une telle éventualité appelle des réformes profondes dans les structures et les mentalités. Une thérapie de choc que ne peut procurer, en définitive, qu'un changement en profondeur de tout le système politique. Une recette dont les ingrédients ne sont toujours pas réunis.