Les prix, cette année, oscillent entre 30 000 et 70 000 DA, et encore plus si la bête est forte. A peine quelques jours nous séparent de la célébration de la fête de l'Aïd El Adha fixée à jeudi prochain, les pères de famille à faibles revenus sont dans l'expectative, tourmentés par la flambée des prix dans les marchés à bestiaux. Ils ont beaucoup de mal à faire face aux dépenses liées à la célébration de cette fête religieuse, dont le sacrifice du mouton demeure l'acte rituel principal pour agrémenter les festins rassemblant ainsi la famille entière autour de la même table. Aussi, le mouton acheté la veille de l'Aïd devra rendre le sourire et la joie aux enfants. Pour avoir un aperçu des prix affichés au niveau du soi-disant souk à bestiaux de Médéa, on s'est rendus, jeudi dernier, sur le site situé sur les hauteurs du quartier Cheracheria, à quelques encablures du centre-ville de Médéa. A notre arrivée sur les lieux, on était déjà confrontés à un impressionnant et pénible embouteillage s'allongeant sur plusieurs kilomètres, accentué par un stationnement anarchique sur les deux côtés de la chaussée trop étroite, et ce, en l'absence totale de service d'ordre, laissant des adolescents se proclamant gardiens faire leur loi. Le chemin sinueux et escarpé mène au sommet de la colline, où une plateforme a été aménagée pour la circonstance en point de vente du cheptel. La pente raide et dangereuse donne beaucoup de mal et de vertiges aux chauffeurs de camionnette transportant les têtes d'ovins et de caprins, croisant difficilement d'autres véhicules sur leur chemin du retour. Les nombreux acheteurs, qui affluaient de toutes les directions, n'avaient pas d'autre choix que de se convertir en alpiniste pour atteindre le sommet de cette colline dite Setara à leurs risques et périls. Des moutons jusqu'à 70 000 DA Plusieurs citoyens, revenus bredouilles du site, ont dû certainement renoncer à l'idée de répondre aux vœux de leur progéniture en leur achetant le fameux bélier aux longues cornes. Car les prix, cette année, oscillent entre 30 000 et 70 000 DA, et encore plus si la bête est forte. Une véritable saignée pour les bourses des ménages qui ont été déjà ébranlées, il y a quelques jours à peine, par la rentrée scolaire. Un enseignant interrogé sur place nous déclare qu'il est là depuis plus de deux heures, tournant en rond, faisant tout le marché, ne trouvant jusqu'à présent aucun mouton qui réponde aux économies en sa possession, soit trop petit pour son prix où trop cher. C'est une véritable hémorragie des portefeuilles ! ls sont hors de prix pour notre pouvoir d'achat. Un autre, très déçu, se mêle à la discussion : «Je ne comprends pas ce qui se passe dans notre pays. Les prix ont presque doublé par rapport à l'année passée. Pourtant, il s'agit d'un produit provenant de notre élevage.» De leur côté, les éleveurs se défendent, pointant du doigt le secteur de l'agriculture qui n'avait pas pris, selon eux, les dispositions nécessaires au moment opportun pour endiguer la flambée des prix des aliments de bétail, laissant les intermédiaires spéculateurs faire leur beurre sur le dos des éleveurs. Cette situation anachronique va priver de nombreuses familles aux revenus modestes d'accomplir ce rite religieux. Certaines familles, qui se rabattaient autrefois sur la brebis malgré sa vente interdite pour le sacrifice de l'Aïd en raison de son poids qui varie entre 25 et 30 kg et aussi pour son prix relativement moins élevé, ne le font plus. Cette opportunité n'est malheureusement pas aussi accessible aux bourses moyennes. D'autres citoyens n'ont d'autre choix que de se rabattre sur les caprins pour le rituel de l'Aïd, étant donné que leurs prix n'ont pas tellement augmenté. Enfin, pour certains «rusés», ils attendront, dit-on, l'avant-dernier jour de la fête pour décider ou pas de l'achat du fameux mouton. Ils espèrent une chute des prix.