Après avoir laissé proliférer les EPA et les EPIC durant la période de l'embellie financière, le gouvernement tente aujourd'hui de réduire leur nombre et de limiter leur création et leurs dépenses. Dans une instruction adressée aux ministres, Abdelmalek Sellal reconnaît une prolifération de ces établissements et fait état de l'existence de 56 000 organismes dont le sort est à étudier. La crise financière impose donc un nouveau reniement de sa propre politique au gouvernement. Il est à craindre que ces mesures ne touchent à des entités dont la mission est d'assurer un minimum de service public. Le gouvernement veut remettre de l'ordre dans la jungle des établissements publics (EPIC et EPA). Après avoir laissé proliférer ces organismes budgétivores durant la période de l'embellie financière, l'Exécutif tente, en ces temps de vaches maigres, de réduire leur nombre, de limiter leur création et leurs dépenses. C'est ce que recommande le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, dans son instruction n°308 du 3 octobre 2015, adressée aux membres du gouvernement et aux responsables des établissements publics sous tutelle. Dans ce document, dont El Watan a pu obtenir une copie, le premier responsable du gouvernement fait état d'une création excessive de ce genre d'établissements. «L'examen de la situation de notre cadre organisationnel fait ressortir l'existence de plus de 56 000 entités administratives, selon une étude de l'ONS, dont une majorité d'établissements publics à caractère administratif (EPA) ainsi que des centaines d'établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC) qui dépendent totalement ou partiellement des budgets de l'Etat et des collectivités locales», lit-on dans ce document. Ces établissements, rappelle le Premier ministre, ont consommé d'importantes enveloppes financières. Rien que pour l'exercice en cours, souligne Abdelmalek Sellal, l'Etat a dépensé 381,28 milliards de dinars pour aider 219 EPIC, EPST et établissements à gestion spécifique. «Cela nonobstant l'affectation partielle ou totale de taxes parafiscales pour certains établissements ou la rémunération au titre de la maîtrise d'ouvrage déléguée pour d'autres», ajoute la même source. Cette situation devient sérieusement intenable pour le budget de l'Etat. «Cette prolifération, favorisée par l'embellie financière qu'a connue notre pays (…) doit nous interpeller au regard de la contrainte budgétaire actuelle, conjuguée à la faible performance du dispositif de suivi et de contrôle de ces établissements par la tutelle, exacerbée par le recours notamment au statut d'EPIC, pour des considérations beaucoup plus liées aux avantages qu'il offre en matière de salaires et de flexibilité dans l'exécution de la dépense que par la recherche de l'amélioration de la qualité, du coût des prestations et services publics mis à la disposition de la clientèle et des usagers», ajoute Abdelmalek Sellal dans son instruction. Mettre fin aux postes de prestige et aux emplois de complaisance L'on remarque à travers ce constat que le gouvernement savait qu'il y avait bien des dépenses inutiles et un gaspillage de deniers publics, sans pour autant agir pour y mettre un terme. Une situation caractérisée par la multiplication des postes de prestige et emplois de complaisance offerts à la clientèle du pouvoir. Abdelmalek Sellal décide, en cette période d'austérité induite par la baisse des recettes pétrolières, de revoir à la baisse le nombre de ces établissements. Pour cela, il a décidé d'aller vers un audit, confié à un groupe de travail institué auprès de son cabinet, chargé de réviser le cadre normatif régissant l'organisation et la gestion de ces établissements. Parallèlement, Abdelmalek Sellal charge les membres du gouvernement, chacun en ce qui le concerne, de procéder à une évaluation des établissements sous leur tutelle, notamment les EPIC. «Cette évaluation doit se solder par des propositions de réajustement, de transfert et de fusion selon les cas, en prenant en considération la nécessité absolue d'assurer aux usagers un service et une prestation de qualité avec un coût rationnel et une gestion optimale du service public», note la même source. Pour les EPA, le Premier ministre suggère un remodelage de leur fonctionnement en privilégiant la mutualisation des moyens, notamment des ressources humaines et financières. «Ces actions d'évaluation doivent être finalisées et les rapports et propositions y afférents transmis à mon cabinet au plus tard la fin du mois de novembre de l'année en cours», précise M. Sellal. Dans la foulée, il demande l'application de la rigueur budgétaire et de mettre fin au recrutement de complaisance en dehors des profils intéressant les corps de métier de ces établissements.