Le gouvernement table sur un gel des recrutements dans la Fonction publique. La loi de finances 2016 a été adoptée, lundi, à l'Assemblée populaire nationale (APN), au grand dam de l'opposition. Une loi qui consacre l'austérité, qu'en dise le ministre des Finances, Abderrahmane Benkhalfa. Si celui-ci préfère l'usage du concept d'orthodoxie budgétaire, l'impact des restrictions à venir risque de toucher aussi bien les ménages que les entreprises. Le budget 2016 se caractérise par une forte baisse des dépenses, pas moins de 9%. Et pour une fois, le compartiment budget de fonction sera touché et reculera de 3,32%. Il est vrai que cela ne touchera en rien les transferts sociaux et les subventions toujours plus importantes pour les produits alimentaires de base, l'habitat, l'eau et l'énergie, et ce, malgré les augmentations des prix de certains produits énergétiques. Cependant, la baisse des dépenses de fonctionnement risque de compromettre les ambitions de nouveaux entrants sur le marché du travail et, par ricochet, le taux de chômage. Aussi et si le gouvernement fait des professions de foi et promet de réduire le train de vie des institutions de l'Etat, l'effet attendu en termes de réduction des dépenses de fonctionnement est intimement lié à l'abaissement des dépenses du personnel dans la Fonction publique. Le gouvernement table ainsi sur un gel des recrutements dans la Fonction publique. Il est aussi légitime de s'interroger sur l'avenir, à terme, des fonctionnaires déjà en poste, en cas de dégradation des équilibres budgétaires. Le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Sécurité sociale a récemment indiqué que la Fonction publique souffrait d'un surplus d'effectifs d'un million de fonctionnaires… La réduction des dépenses d'équipement ne sera pas non plus sans impact. Il faut d'ailleurs prendre conscience que c'est la commande publique financée sur le budget de l'Etat qui a permis, au cours des 15 dernières années, d'assurer un plan de charge aux entreprises qu'elles soient publiques ou privées, et qui a contribué par ricochet à maintenir la croissance et à créer de l'emploi. D'ailleurs, l'activité BTPH est l'une des activités ayant le plus contribué à la croissance hors hydrocarbures ces dernières années. Le ministre des Finances le reconnaît lui-même. Il a indiqué, il y a quelques mois, que sur «les 10 ou 15 entreprises qui comptent dans le secteur du BTP, 70% vivent grâce à la commande publique». Il est vrai que depuis cette déclaration tonitruante, le premier argentier du pays se montre moins alarmiste et insiste sur le maintien d'une partie de la commande publique du moins dans les secteurs de l'habitat, de l'éducation et de la santé. Il ne faut cependant pas se leurrer. La loi de finances 2016 prévoit une baisse de 19% des dépenses d'équipement. Ce qui aura, à coup sûr, un impact sur la croissance et l'emploi. Les dernières prévisions du FMI misent d'ailleurs sur une hausse du chômage à 11,7% en 2016. Rappelons aussi que les économistes de Toulouse School of Economic, Nour Meddahi et Raouf Boucekkine, ont estimé, lors de l'une de leurs récentes études, que si l'on prend en compte un taux d'inflation de 5% en 2016, la baisse réelle des dépenses sera plus importante et atteindra 14% en terme réel. Ce qui augure d'un budget d'austérité aux implications plus profondes. Les deux économistes estiment, à titre de comparaison, que ces restrictions budgétaires sont plus importantes que celles de 1986, année du premier contre-choc pétrolier, lorsque les dépenses budgétaires ont été réduites de 10,3%. Ils ont également rappelé que l'austérité s'est traduite par une récession économique qui a duré deux ans et une hausse du chômage à «11,4% en 1986 avant d'exploser à 21% en 1987».