Nous regrettons souvent de ne pas avoir assez de temps pour lire, ou de ne pas en prendre suffisamment. Comment éviter alors qu'une résolution aussi enthousiaste que « je vais lire plus de livres» ne se transforme – à regret – en « je ne lis plus » ?Evidemment, force est d'abord de constater que nous n'avons pas tous la même vitesse de croisière en matière de lecture. Des études montrent qu'un lecteur moyen peut lire entre 200 et 250 mots par minute, tandis qu'un bon lecteur arrive à 400 mots par minute. Quant aux lecteurs rapides, ils parviennent facilement à 1000 mots, mais sont peu nombreux. On estime qu'une personne sur mille seulement est capable de tenir un tel rythme. Décourageant ? Pas vraiment, quand l'on sait que tout cela n'est qu'une question d'entraînement. Plus vous lirez, meilleur lecteur vous serez. Le syndrome d'insécurité du lecteur est symptomatique mais pas définitif C'est le mal le plus chronique et répandu de notre siècle. Qui ne s'est jamais plaint de ne plus arriver à lire et de jeter la pierre de cette ignominie à Internet ? Car c'est bien le milieu sur-digitalisé dans lequel nous vivons et les mauvaises habitudes qui vont avec (zapping, manque de concentration etc.) qui écourtent sans cesse le temps que nous consacrons à lire. Nous sommes cependant heureux de vous annoncer que vous n'êtes pas seuls dans ce cas, et qu'il n'y a aucune fatalité à faire partie des millions de gens qui aimeraient lire plus, mais qui ne peuvent pas décrocher plus de vingt minutes (parfois moins) de leur téléphone. Ainsi va donc notre existence. Nous allons de soupir en soupir, nous lamentant (surtout les jeunes entre vingt et trente ans) et pestant que nous ne lisons plus alors qu'avant, quand nous n'étions ni si accros ni si dépendants à Internet, nous dévorions des livres pendant des heures, voire des journées entières. Méfions-nous de cette nostalgie trop courante qu'amène l'insécurité du lecteur, un syndrome que Katy Waldman définit dans un article passionnant comme « l'impression de ne pas profiter autant de [nos] lectures que [nous ne le faisions] auparavant. » Avant d'ajouter que ce syndrome se traduit notamment par la bonne volonté, hélas trop vite transformée en échec, de « se réserver une heure pour lire [...] et la passer sur Facebook à faire bêtement défiler des photos d'anciens camarades de lycée dont [nous nous souvenons] à peine. » Vous vous reconnaissez ? Ce problème qui nous taraude tant est lié à notre concentration. Des études scientifiques ont montré à plusieurs reprises que la lecture sur un support électronique quel qu'il soit est plus fragmentée, disparate, et décousue. Nous lisons sur ce type de support plus rapidement en pratiquant un zapping constant et parfois effréné, comme si nous recherchions à lire toujours plus et toujours mieux. A l'inverse, lire sur papier, ou lire un livre physique, c'est focaliser son attention sur un texte ayant pour limite le papier, et rien au-delà. Ainsi est-il communément admis que l'on retient davantage ce que l'on a lu lorsqu'on le lit sur papier. Mais vous avez beau lire sur papier, votre téléphone n'est jamais loin, avec son flot d'e-mails, de notifications et de contenus tentants accessibles en un clic. Ceci entraînant cela, il vous est difficile de lire plus de deux chapitres à la suite sans interruption. Conséquence de ce syndrome ? La culpabilité. Celle d'avoir perdu du temps sans que cela ne vous ait été bénéfique (voir défiler sur Facebook des photos que vous connaissez par cœur, regarder des vidéos de chatons sur YouTube sans que ça n'ait de sens). Une culpabilité qui trouve elle-même son origine dans ce que l'on appelle le FOMO (« Fear of Missing Out », ou la peur de louper quelque chose). Submergés d'infos, d'actus, d'alertes et autres tweets trop importants, nous avons l'impression de rater trop de choses si nous nous déconnectons quelques minutes, et donc, même lorsque nous nous déconnectons, notre cerveau, lui, reste inévitablement branché sur plusieurs préoccupations en même temps. Or, nous nous rendons bien compte, lorsque nous tenons le pari de lire plus d'une heure, que nous ne ratons jamais grand chose, et qu'à la fin, nos amis nous aiment toujours même si nous n'avons pas encore répondu à leur texto. Ainsi râlons-nous toute la journée après tout le temps perdu à lire et à ne pas lire. Voici donc quelques conseils pour concilier votre vie de ministre et votre aspiration à lire toujours plus et plus loin. Il n'y a pas de manque de temps, il n'y a que de mauvaises excuses Nous voyons bien que si le symptôme de l'insécurité du lecteur est courant (d'ailleurs à ce stade de l'article, vous êtes persuadés de l'avoir), il est aussi favorisé par la mauvaise foi. Et notamment, nous l'avons vu, par l'argument qui consiste à dire que vous n'avez pas le temps. Il est vrai qu'entre le travail, une vie sociale du tonnerre, et les week-end toujours trop remplis, trouver du temps pour soi n'est pas toujours une mince affaire, surtout que lorsque nous en avons, nous voilà tentés par la facilité de regarder un film ou une série. Luttez contre cette idée reçue : sachez que vous n'avez pas nécessairement besoin de bloquer une heure de votre emploi du temps pour avoir le loisir de lire. Lisez même lorsque vous n'avez que 10 minutes montre en main : dans le train ou le métro, pendant que vous préparez le repas, ou que vous buvez un café. Un moment de lecture n'est jamais trop court. Si vous arrêtez de jouer à Candy Crush à chaque pause, vous serez surpris de voir votre rythme de lecture augmenter à plus d'un livre par mois, puis plus d'un par semaine, et ce jusqu'à ce que vous deveniez l'un des mille lecteurs qui dévorent 1000 mots par minute. (Suivra)