C'est ce qu'a indiqué Mohamed Nebbou, premier secrétaire national du Front des forces socialistes (FFS). «La dépouille de Hocine Aït Ahmed sera rapatriée le jeudi 31 décembre et une veillée de recueillement aura lieu le même jour au siège national du parti, à Alger. Il sera inhumé le lendemain, le vendredi 1er janvier, dans son village natal, dans la commune d'Aït Yahia, à Aïn El Hammam», a indiqué hier M. Nebbou face à la presse, déclaration reprise par l'APS. Le premier secrétaire du FFS a précisé dans la foulée que les funérailles de Hocine Aït Ahmed seront «nationales et populaires». Il a également souligné qu'«une cérémonie de recueillement aura lieu mardi prochain à Lausanne pour permettre à ses amis en Suisse de lui rendre un dernier hommage». L'affaire est donc tranchée : Si L'Hocine ne sera pas inhumé au carré des Martyrs d'El Alia comme il est de coutume pour les historiques de la guerre de Libération nationale. Force est de voir dans ce choix un ultime geste politique et symbolique de la part du fondateur du FFS. Une manière de couper court à toute velléité de récupération et de mettre son nom à l'abri de toute manipulation officielle. Une façon aussi de dire la constance de ses convictions, se refusant à toute compromission, fut-ce au nom de Novembre. On comprend dès lors qu'il fut attaché à mettre les choses au clair de son vivant et ne rien laisser au hasard. Pourtant, les autorités n'ont pas manqué de saluer sa mémoire avec emphase en s'empressant de multiplier les signes de contrition. Le président Bouteflika décrétera huit jours de deuil national. Le chef de l'Etat s'est fendu, par ailleurs, d'un hommage écrit, élogieux au possible. Pour lui, feu Hocine Aït Ahmed était «une sommité dont les valeurs humaines, la finesse et l'intelligence politique inégalées avaient éclairé un pan de l'histoire du militantisme algérien et marqué de leur empreinte l'histoire de tous les mouvements de libération de par le monde». Toujours sous la plume du président de la République, Aït Ahmed est décrit comme «l'un des grands hommes de l'Algérie, un éminent militant et un dirigeant historique hors pair». Pour sa part, Ahmed Ouyahia, directeur de cabinet de la Présidence et secrétaire général par intérim du RND, voit en Aït Ahmed «l'un des dirigeants de la guerre de Libération et un militant hors pair de la liberté et la démocratie» (APS). M. Ouyahia, qui s'est déplacé au siège du FFS pour présenter ses condoléances, a affirmé que les obsèques de Hocine Aït Ahmed «seront à la hauteur de la stature du défunt», en faisant remarquer que le deuil national décrété en sa mémoire est «un deuil digne d'un chef d'Etat». A signaler qu'une minute de silence sera observée à la mémoire de M. Aït Ahmed dans tous les stades abritant les matchs des Ligues 1 et 2, ce week-end, a annoncé la LFP. De son côté, le 10e Festival international de musique andalouse et des musiques anciennes, prévu jusqu'au 26 décembre, a dû écourter sa programmation en signe de deuil, «à l'instar de toutes les manifestations culturelles en cours», rapporte l'APS. Chacun revendique sa part d'Aït Ahmed Parmi la pléthore de réactions officielles ou exprimées par des proches du sérail, il y a lieu de relever celle, très émue, de Amar Saadani. «C'est un exemple de sacrifice. Un moudjahid qui a vécu pour l'Algérie. Malheureusement, il a été confronté à ce qu'aucun moudjahid ou militant n'a subi, c'est-à-dire l'injustice», déclarait M. Saadani (propos rapportés par TSA). Et le patron du FLN de renchérir : «Il faut que les Algériens libres lèvent cette injustice et le reconsidèrent. Il ne s'est pas opposé à l'Etat algérien, mais aux personnes qui ne voulaient pas d'Etat démocratique.» Intervenant sur la chaîne Ennahar TV peu après l'annonce de la nouvelle, Amar Saadani semblait particulièrement affecté par cette lourde disparition et n'hésitait pas à charger ceux qui avaient «manqué d'égards» à ce «grand militant». Faisant son mea-culpa, ses mots sont à la limite de l'auto-flagellation : «Nous avons été ingrats envers Aït Ahmed. L'histoire lui a rendu justice mais nous avons été injustes envers lui», martèle-t-il. «Ethiquement, nous avons manqué d'égards à Aït Ahmed.» Notons aussi les hommages du Premier ministre, Abdelmalek Sellal, du président de l'APN, Mohamed Larbi Ould Khelifa, du patron de l'UGTA, Abdelmadjid Sidi Saïd, du président du FCE, Ali Haddad, pour ne citer que les réactions officielles ou «para-officielles». Et chacun de revendiquer «sa part d'Aït Ahmed». Les valeurs qu'il a incarnées. Son combat. Et c'est probablement pour anticiper sur ces homélies hagiographiques de circonstance que «Dda L'Ho», en fin connaisseur des fourberies du «système», a préféré Ath Yahia à El Alia. Fidèle à ses principes, il n'aurait pour rien au monde bradé son idéal démocratique et social pour des honneurs factices. «Aït Ahmed aura été original même dans sa mort», écrit Noureddine Boukrouh sur sa page facebook. «Opposant intraitable au ‘système' de son vivant, il est parti en lui infligeant un dernier camouflet : être l'unique ‘ historique' à refuser d'être enterré au cimetière officiel El Alia pour s'en démarquer jusqu'à la fin des temps. Cohérent avec lui-même, seigneurial et humble à la fois, il a préféré à cet ‘honneur' douteux car souillé par le crime (assassinat de Abane, Krim, Khider, etc.) et l'imposture (faux moudjahidine qui y reposent), le voisinage pur des gens du peuple de Aïn El Hammam. Dors en paix brave homme !» Hocine Aït Ahmed fait partie de ces grands esprits que l'on ne peut enfermer dans un mausolée ou reléguer au musée tant son œuvre est vivante. Au demeurant, si nos dirigeants sont sincèrement attachés aux valeurs qui ont guidé Si L'Hocine sa vie durant, il n'est pas trop tard pour s'en inspirer…