Côté commerce, l'année qui s'achève aura été celle des recadrages des importations et des tentatives de relance des exportations hors hydrocarbures. Le retournement du marché pétrolier et ses conséquences sur l'économie nationale ont poussé les pouvoirs publics à revoir leur copie. Justement, le commerce extérieur constitue le maillon le plus sensible à travers lequel ils essayent d'amortir le choc. Médicaments, véhicules, matériaux de construction ont fait l'objet au cours de cette période de mesures visant à réduire la facture des importations. Des produits dont les achats n'ont cessé d'augmenter avant l'entame de la courbe descendante des recettes d'hydrocarbures. En plus de la régulation du marché de l'automobile dans le cadre d'un cahier des charges adopté à cet effet (ce qui s'est soldé par la baisse des ventes des concessionnaires). Même du côté des banques publiques des mesures ont été prises pour freiner les importations. La Banque d'Algérie, dans son instruction n° 02-15 du 22 juillet 2015, oblige que le niveau des engagements extérieurs des banques et établissements financiers ne doit à aucun moment dépasser une (1) fois leurs fonds propres règlementaires tels que définis par la réglementation prudentielle en vigueur. Cette année a également vu germer l'idée des licences d'importation. Une large réflexion a été lancée à cet effet avant de se solder par la promulgation, en juillet dernier, de la loi sur les licences d'importation. La loi n° 15-15 du 15 juillet 2015 modifiant et complétant l'ordonnance n°03-04 relative aux opérations d'importation et d'exportation de marchandises, dans son article 03, a en effet introduit des mesures de restrictions quantitatives et/ou qualitatives et/ou des mesures de contrôle des produits à l'importation. Ainsi, des licences non automatiques seront délivrées par le ministère du Commerce sur proposition d'un Comité interministériel, et celles automatiques délivrées par les autres ministères. Ces licences constituent, selon les responsables du secteur, un instrument juridique pour pouvoir «maîtriser et gérer de manière rationnelle les importations du pays». Elles ont suscité un large débat. Opérateurs économiques et experts continuent à s'interroger sur les modalités d'application de ces licences. Il faut dire que les décisions ont commencé à tomber dès le premier trimestre 2015. Objectif : réduire les importations et diversifier les exportations hors hydrocarbures. Or, les résultats restent maigres, du moins pour les 11 premiers mois de l'année comme le montrent les dernières statistiques des services douaniers. Si les exportations ont chuté de près de 42% passant de 59 milliards de dollars durant la même période de 2014 (mds USD) à 34,371 mds usd contre 59,133 mds usd, les importations n'ont baissé que de 12,45%, pour se chiffrer à 46,997 mds USD contre 53,681 mds USD, en baisse de 12,45%, en dépit des mesures annoncées tout au long de l'année en grande pompe. Exemples : les importations des produits alimentaires ont reculé de 17,42%) et les importations des biens de consommation non alimentaires ont baissé de 17%. Parallèlement, les exportations hors hydrocarbures n'ont pas connu de grands changements. Et dire qu'il était question de relancer les exportations hors-hydrocarbures et d'améliorer l'offre exportable. Il était également question d'asseoir une stratégie nationale de développement et de promotion des exportations hors hydrocarbures et assurer l'encadrement d'un commerce extérieur plus équilibré et mieux adapté aux spécificités nationales et aux mutations économiques et financières mondiales. C'est du moins ce que n'ont cessé de prôner les discours officiels. Mais qu'en pensent à ce sujet les experts ? Pour Ferhat Aït Ali, analyste financier, les licences d'importation «sont encore une autre trouvaille d'une bureaucratie en mal de prééminence face à une gouvernance en mal de prévoyance». «Je vois mal comment et sur quels critères seront établies ces licences et au bénéfice de qui et dans quelles conditions», dit-il, prévoyant en conséquence «une emprise sans contre-pouvoir de l'administration et des cercles influents sur ces licences, et à des résultats exactement contraires à ce qui est promis, qui iront de la pénurie sur certains produits à la mévente sur d'autres comme ce fut le cas au plus fort de la gestion dirigiste du pays dans les années 80'». Lyes Kerrar estime, pour sa part, que les pouvoirs publics ont probablement «surestimé l'effet que pourraient avoir ces licences et sous-estimé la complexité de leur mise en œuvre». Leur processus de mise en œuvre «semble long et laborieux», dit-il en soulignant qu'il y a «d'autres moyens efficaces qui permettent d'atteindre les même objectifs et qui peuvent être mis en œuvre simplement demain.»