Polémique. A peine une semaine après son enterrement, le leader historique disparu Hocine Aït Ahmed continue d'«animer» la scène politique. Et c'est un épisode de l'histoire récente qui refait surface : l'arrêt du processus électoral de 1992 et la mise en place du Haut Comité d'Etat. Le général Khaled Nezzar, ministre de la Défense à l'époque des faits, revient à la charge pour «apporter des précisions», suite à la polémique qu'a soulevée son texte publié la veille. Il affirmait, hier au cours d'une conférence de presse, qu'il n'avait pas fait de proposition à Hocine Aït Ahmed pour diriger le pays. «A aucun moment, je n'ai fait une proposition à Hocine Aït Ahmed. Je ne pouvais parler tant que la dépouille d'Aït Ahmed n'était pas encore rapatriée, il n'avait pas été encore enterré, mais quand j'ai vu sur un site des vidéos, je devais parler pour rectifier», dit-il. A la question de savoir pourquoi il n'avait pas réagi au moment où Aït Ahmed avait assuré qu'il avait été approché pour occuper le poste de chef de l'Etat au lendemain de la démission de Chadli, M. Nezzar a indiqué qu'il n'était pas au courant des déclarations de l'ancien opposant ; pourtant toute l'opinion publique était au courant. «Je ne savais pas, je ne regarde pas toutes les vidéos, mais quand ça a commencé à parler, j'ai pu voir et on a l'impression d'un montage, un montage du ‘qui tue qui ?' de José Garçon (ancienne journaliste de Libération)». Le général Nezzar a rappelé qu'il avait rencontré l'ancien leader du FFS à deux reprises. Le soir même de l'annonce de la démission de Chadli et quelques jours après. «Le soir même, j'avais invité Aït Ahmed à un entretien, comme j'avais invité d'ailleurs d'autres personnalités politiques ou de la société civile. Il fut le premier à être reçu. Accompagné de deux personnes, il m'est apparu bouleversé, répétant quatre fois : ‘‘C'est un coup d'Etat !'' Une seconde fois, ce fut aussitôt après l'interruption du processus électoral. Elle s'est déroulée à Dar El Affia, toujours à ma demande. On était dans le jardin, il m'avait dit qu'il fallait revenir au processus», rappelle Khaled Nezzar. Deux autres rencontres ont eu lieu en Suisse cette fois-ci, mais avec le général Touati, à l'époque conseiller politique de Nezzar. «C'était six mois avant la fin du mandat du HCE qui devait correspondre à la fin du mandat de Chadli, j'ai envoyé le général Touati deux fois – en été 1993 et décembre de la même année – pour le convaincre de rentrer et participer à une période de transition. Il avait refusé les deux fois», précise encore M. Nezzar. Mais il y a un autre témoignage de Mouloud Lounaouci, ancien cadre dirigeant du FFS, où il affirme qu'il avait été contacté par un certain Saïd Rahal, un homme influent à l'époque, l'avait contacté pour proposer à Hocine Aït Ahmed «le poste le plus haut de la hiérarchie politique». «Saïd Rahal a été approché (sans qu'il ne m'ait donné de détail) pour proposer à Hocine Aït Ahmed ‘le poste le plus haut de la hiérarchie politique'. En froid, depuis quelques années, avec Hocine Aït Ahmed, il m'a demandé de faire la démarche. J'ai donc, après avoir informé le président du bureau fédéral de Tizi Ouzou de l'époque, pris la route vers Alger où j'ai rencontré le président du FFS. Il m'a écouté, comme à son habitude, sans que ne transparaisse la moindre émotion, avant de me répondre qu'il transmettrait la réponse lui-même. Une réponse que j'ai lue, comme tout le monde, dans la presse», témoigne M. Lounaouci dans une tribune publiée par El Watan le 31 décembre 2015. Khaled Nezzar dit qu'il n'est pas au courant : «Je ne sais pas, c'est qui Saïd Rahal ?» L'ancien ministre de la Défense, un janviériste assumé, a tenu à dire à propos de feu Aït Ahmed qu'il est « rentré dans l'histoire, parce que c'est un historique qui ne sait jamais compromis avec le pouvoir et qu'il a milité pour la démocratie».