L'ancien ministre de la Défense nationale, Khaled Nezzar, dément avoir proposé au défunt Hocine Aït Ahmed la présidence de la République après l'arrêt du processus électoral en 1992. «Je n'ai à aucun moment proposé à feu Aït Ahmed le poste de président de la République, contrairement à ce que les uns et les autres ont déclaré», a indiqué Khaled Nezzar dans une lettre publiée dans le journal électronique Algérie Patriotique. «Feu Aït Ahmed, un des leaders de la Révolution, entrera dans l'histoire de l'Algérie contemporaine pour ses idées de démocrate et la non-compromission avec le pouvoir. Quant à son parcours, comme celui de tout moudjahid et homme politique post-indépendance, il est du domaine public», souligne l'ancien général. Dans ce document, l'ancien ministre de la Défense a évoqué ses rapports avec l'ancien chef du FFS, décédé le 23 décembre dernier, faisant savoir qu'il l'a rencontré à quatre reprises dans le contexte des évènements qui ont conduit à la décennie noire (démission de l'ancien président Chadli et l'arrêt du processus électoral en 1992). La première rencontre entre les deux hommes s'est déroulée, selon Khaled Nezzar, le soir de la journée de la démission de Chadli, le 9 janvier 1992, qui a fait «de l'armée l'arbitre de la situation». «En tant que ministre de la Défense nationale, d'énormes responsabilités politiques allaient m'échoir. C'est ainsi que le soir-même j'ai invité Aït Ahmed à un entretien, comme j'ai invité d'ailleurs d'autres personnalités politiques ou de la société civile. Il fut le premier à être reçu», précise l'ancien responsable militaire. «Accompagné de deux personnes, il m'est apparu bouleversé, répétant : ‘C'est un coup d'Etat ! C'est un coup d'Etat !'», a-t-il poursuivi. La seconde rencontre avait eu lieu aussitôt après l'interruption du processus électoral. «Elle s'est déroulée, a détaillé le général à la retraite, à Dar El Afia, toujours à ma demande.» «Le sachant soupçonneux, je le reçois à l'entrée. En faisant les cent pas, nous entamons la discussion à l'intérieur de l'enceinte ; il paraissait alors quelque peu décontracté, conseillant de revenir aux élections, non sans préciser toutefois que ‘ce qui est fait est fait'», relate encore Nezzar, ajoutant que les deux autres rencontres eurent lieu en Suisse, à Genève, l'une en juin 1993, l'autre fin décembre de la même année. Sauf que pour ces deux dernières rencontres, Nezzar s'est fait représenter par son conseiller politique, le général Mohamed Touati. «Cette initiative entrait dans le cadre de mes attributions au sein du HCE. Le «non» constant de Dda L'Ho Le moment s'inscrivait aussi dans la période grave caractérisée par la mort tragique du président Boudiaf, un terrorisme en expansion et l'approche de la fin du mandat du Haut comité d'Etat, fixé solennellement à fin décembre 1993 par la proclamation du Haut conseil de sécurité du 14 janvier 1992», précise l'auteur de la lettre. Ce dernier fait savoir que le général Touati avait pour mission précise de convaincre Aït Ahmed de rentrer au pays fin 1993, pour participer à la transition démocratique et aider à la solution de la crise dans laquelle se débattait le pays. «Sa réponse négative fut, à mon sens, une nouvelle occasion manquée», estime l'ancien ministre de la Défense avant de signer une charge contre la classe politique de l'époque qui, selon lui, n'avait pas assumé ses responsabilités durant cette période. «Je me dois de préciser qu'aucune personnalité politique ne s'était proposée, à l'époque, de participer à cette transition, ce qui explique l'évolution du pouvoir», explique-t-il, soutenant que Liamine Zeroual, désigné président en août 1993, «contraint et forcé, se fit violence et pallia la dérobade de l'ensemble de la classe politique, FLN en tête». La dernière rencontre entre Khaled Nezzar et Hocine Aït Ahmed s'est déroulée dans les couloirs de la justice française, à l'occasion du procès de Nezzar contre Habib Souaïdia, l'auteur du livre La sale guerre. «Dans son témoignage en faveur de Habib Souaïdia et à charge contre moi, il (Aït Ahmed) fit des déclarations virulentes devant le tribunal de la XVIIe Chambre. Pour ma part, je n'ai soufflé mot et j'ai tenu à rappeler aux magistrats français qui dirigeaient l'audience mon respect pour nos chefs historiques dont lui-même», écrit Nezzar.