Dans un communiqué daté du 9 octobre, le ministère de l'Enseignement supérieur déclare constater qu'à l'occasion de chaque rentrée universitaire, des établissements privés émettent, à travers des annonces diffusées dans les médias, des offres de formation pour l'obtention de diplômes de l'enseignement supérieur dans différentes spécialités. L'institution décide alors de rappeler les textes réglementaires qui régissent le secteur et qui disent, grosso modo, que l'enseignement supérieur est son apanage et que ceux qui veulent s'y investir sont soumis à autorisation. Et cela, faut-il le rappeler, en l'inexistence d'université privée sur le territoire algérien. Une dizaine de jours après ce communiqué, le ministre, Tahar Hadjar, déclare que les établissements privés qui proposent de hautes études «n'ont pas d'existence légale et leurs diplômes ne sont pas reconnus du fait qu'ils ne sont pas agréés par l'Etat». Il décide par ailleurs d'installer une commission interministérielle pour réguler ce marché. Dans la forme, le ministre n'a pas complètement tort. Réguler le marché de la formation ne peut être une décision critiquable. Seulement, dans le fond, beaucoup de choses peuvent être dites. A commencer par ces annonces publiées dans les médias. En fait, pour beaucoup d'établissements, il s'agit de licences, MBA ou mastères professionnels délivrés par des universités étrangères. Ce que semble oublier le premier responsable du secteur, c'est que l'enseignement universitaire dans le système de mondialisation est devenu un produit comme un autre. Il est donc «délocalisable», exportable y compris via le Net. D'ailleurs, n'y a-t-il pas d'universités américaines, britanniques ou encore françaises installées aux Emirats arabes unis, au Qatar et ailleurs ? Cette année, certaines universités algériennes ont ouvert des mastères à distance. Ces diplômes ont-ils plus de valeur que ceux élaborés par des établissements étrangers qui figurent en meilleure position dans les classements internationaux ? Il faut dire aussi que devant les conditions castratrices imposées par le cahier des charges pour la création d'université privée (surtout en matière d'infrastructure) et la qualité de la formation supérieure publique sans cesse remise en cause par le ministre lui-même, peu de marge est laissée à l'initiative. Aujourd'hui, comme on ne cesse de le dire, le diplômé (qu'il soit universitaire ou pas) est un produit. Si le ministère garde en main le pouvoir du sceau et de la signature, la qualité des diplômes — et donc de la formation — est dépendante de son attractivité sur le marché de l'emploi. Ce sont les organismes employeurs qui décident vraiment de la valeur d'un diplôme via les recrutements qu'ils consentent. Même en Algérie, où le secteur public reste imposant, c'est le secteur privé qui emploie le plus avec 60% de parts de marché. Quant à la reconnaissance du diplôme par les autorités publiques, il n'est pas insensé de dire que les lauréats lui préfèrent d'abord un recrutement intéressant.