La décision de la présidence de la République de consulter les partis politiques autour de la nomination de l'ancien ministre, Abdelwahab Derbal, à la tête de la Haute instance indépendante de surveillance des élections (HIISE) n'a pas eu l'effet escompté. Voulant donner une certaine légitimité à cet organisme décrié, dès l'annonce de sa création, par les formations politiques regroupées au sein de l'ICSO, les tenants du pouvoir ont réussi, par cette démarche, à les fédérer pratiquement tous contre leur initiative. En effet, quelques jours après avoir envoyé ses missives aux chefs des partis, le pouvoir reçoit des réponses cinglantes. Talaïe El Houriat de Ali Benflis, le RCD, le FFS, le PT, le MSP et la majorité des partis traditionnels se prononcent contre non pas la personne nommée à la tête de cette instance, mais contre la «manœuvre du pouvoir» qui risque de reproduire le scénario «des élections à la Naegelen». «Le régime politique en place a toujours préféré le soliloque à la concertation et au dialogue sur tout ce qui engage le présent et l'avenir de la nation. Et s'il rompt avec cette solide tradition aujourd'hui, c'est pour des consultations sur la présidence d'une instance dont la performance, quelle qu'elle soit, ne changera rien aux cours discrédités des processus électoraux nationaux», avait noté le président de Talaïe El Houriat dans sa réponse à la Présidence. Ali Benflis estime que «l'instance de surveillance des élections n'est pas conçue comme un instrument de prévention et de dissuasion de la fraude». «Elle n'a pour raison d'être que de la perpétuer sous de nouvelles formes qui sont vouées à être de nul effet sur la sincérité, l'intégrité et la transparence des scrutins à venir», affirme-t-il, précisant que le pays a «besoin d'un changement qui lui ouvre de nouveaux horizons». Pour sa part, le Rassemblement pour la culture et la démocratie relève aussi des incohérences dans la démarche du pouvoir, à commencer par le mode choisi pour la désignation du président de la HIISE. «Consulter, c'est demander des avis afin de faire le bon choix. Or, à travers la terminologie utilisée dans ce courrier, il nous est demandé de porter un jugement sur une personne physique sur la base d'un curriculum vitae la présentant comme un commis de l'Etat au service de l'Exécutif depuis 1999», écrit le président du RCD, Mohcine Belabbas, dans sa réponse à la présidence de la République. Etant la première formation politique à avoir exigé la création d'une instance indépendance de gestion des élections, le RCD réitère sa contestation de la HIISE. «Commenter une nomination, un non-sens» Le Front des forces socialistes (FFS) n'a pas manqué de critiquer la démarche : «En l'absence des pré-requis politiques et institutionnels qui feraient de la mise en place de la commission de surveillance des élections, et donc des conditions dans lesquelles ladite commission devra effectuer ses missions, un apport effectif à l'amélioration de l'exercice électoral dans notre pays, le FFS n'estime pas utile d'apporter un jugement sur la personne quand c'est sur la démarche ayant présidé à la création de la structure que portent ses réserves.» Pour le FFS, «commenter une nomination à la tête d'une structure est un usage qui n'a de sens que si on cautionne les conditions de mise en place de la structure en question, qui émane d'une Constitution non consensuelle». Dans ce sens, le parti appelle à «un changement des pratiques politiques en usage depuis des décennies qui font de la consultation politique un formalisme sans prolongement dans les pratiques effectives du pouvoir». Le Parti des travailleurs, le MSP et d'autres formations politiques saisies par la présidence de la République n'ont pas rendu publiques leurs réponses. Mais dans des déclarations à la presse, ils remettent en question la création de cette instance.