Revaloriser, protéger et promouvoir le patrimoine algérien, et maghrébin en général, grâce au numérique, sont les principaux objectifs d'une équipe de chercheurs algériens et français qui travaillent en collaboration depuis quatre ans autour de la problématique des «Patrimoines du Maghreb à l'ère numérique». A la tête de ce projet ambitieux, Mourad Bouteflika, directeur du patrimoine au ministère de la Culture, Bernadette Nadia Saou-Dufrêne, professeure de muséologie à l'Université Paris VIII et Rémi Labrusse, professeur d'histoire de l'art à l'Université Paris Ouest. L'idée initiale était d'établir un partenariat pour réfléchir aux nouvelles formes de médiations du patrimoine. Ainsi, une première édition des «Rencontres du numérique d'Alger» a eu lieu entre le 28 et le 30 avril 2013 autour des «Patrimoines du Maghreb à l'ère numérique». Cette activité majeure a été co-organisée par l'Ecole nationale de conservation et de restauration des biens culturels (ENCRBC) et le Labex Arts H2H, qui est un laboratoire d'excellence appartenant aux universités françaises Paris VIII et Paris Ouest. Sous le patronage du ministère de la Culture, ce colloque, premier du genre, a été un point de départ d'un travail de longue haleine. Issus de disciplines scientifiques différentes, les participants ont présenté des points de vue complémentaires, notamment ceux des historiens de la culture et ceux des spécialistes en sciences de l'information et de la communication. Depuis, d'autres «Rencontres du numériques» ont eu lieu en 2014 et en 2015. La dernière édition en date a été accueillie par le palais de la Culture les 18 et 19 avril 2016. Elle traitait de la valeur économique du patrimoine, tandis que les éditions antérieures se sont intéressées d'abord à l'état des lieux, ensuite à l'inventaire, mais surtout à la portée historique et sociétale des patrimoines pour un peuple ou une nation. Les différents acteurs de cette démarche scientifique – Algériens, Maghrébins et Occidentaux – ont réussi l'exploit de faire rapidement une synthèse suivie d'une mise en perspective historique : deux volumes sont déjà disponibles et bientôt un troisième. Ils repensent, chacun à sa manière et selon son degré de compétence, les défis posés par la numérisation du patrimoine, les conditions de sa diffusion et de sa transmission. Il s'agit aussi d'étudier la question cruciale de l'inventaire des biens patrimoniaux, matériels et immatériels pour pouvoir constituer une documentation complète sur les supports physiques et numériques. Posséder un tel corpus n'est nullement un but en soi, mais plutôt un moyen indispensable pour pouvoir lancer une stratégie étatique efficace en matière de revalorisation du patrimoine national sous toutes ses facettes. En effet, la visée finale de ce projet est de créer des bases de données pour les patrimoines algériens et maghrébins et, du coup, leur donner plus de visibilité. La numérisation du patrimoine offre plusieurs applications technologiques qui peuvent contribuer à familiariser les citoyens avec leurs patrimoines (musées, sites historiques protégés, architectures typiques, musiques traditionnelles, contes, art culinaire, cultures vestimentaires, coutumes de la vie et de la mort, etc.) Ce travail est jusque-là assuré par quelques associations avec une forte présence sur les réseaux sociaux numériques. Or, le projet du patrimoine numérique est plus global. Dans ce sillage, l'équipe du Pr Saou-Dufrêne travaille sur la création d'une plateforme en ligne qui devrait recenser l'ensemble des patrimoines maghrébins en y incluant une carte interactive – qui se veut exhaustive – des patrimoines du TAM (Tunisie-Algérie-Maroc) qui sont reconnus pour leur intérêt historique, scientifique ou même esthétique.