En préambule du récit consacré à l'héroïne de Cherchell, Lalla Zouleikha Oudaï, Kamel Bouchama rend hommage aux femmes combattantes depuis les premiers moments de la propagation de l'islam jusqu'aux héroïnes de l'insurrection de Novembre 1954, en passant par les résistantes africaines contre les envahisseurs portugais et français. De là, la plume au clair, il est parti sur les traces d'une femme qui n'a pu échapper à son destin parce qu'elle a vécu dans un milieu familial qui déployait une activité intense dans le Mouvement nationaliste. Quand Kamel Bouchama s'est engagé à écrire l'histoire de la moudjahida des monts du Dahra, une icône de la Révolution de Novembre, il voulait rappeler au souvenir de la mémoire collective, cette grande Dame qu'a été Lalla Zouleikha, dans son combat et son martyre. Ainsi, dès le 1er Novembre, c'est toute la famille Oudaï qui s'engage dans la résistance. Et c'est là où l'auteur met en exergue le sacrifice spontané et sincère de cette famille révolutionnaire dont l'époux, El Hadj Larbi, meurt les armes à la main ; son fils, Lahbib, qu'elle a incité à rejoindre le maquis, est arrêté et assassiné froidement par l'armée française. Quant à elle, avant de rejoindre l'ALN, à son tour, elle était d'abord responsable d'un important réseau FLN, assurant la logistique des unités de l'ALN dans la région de Cherchell, sous l'autorité de Boualem Benhamouda. Lalla Zouleikha était convaincue,écrit l'auteur, qu'il n'y avait réellement aucune entente à espérer avec ceux qui utilisaient la force et l'oppression pour dominer, plutôt pour «dompter» les Algériens, affirmait-il encore dans ses bonnes feuilles. Et là, riche de cette conviction, Lalla Zouleikha ne pouvait que plonger, tête baissée, dans la Révolution, d'abord, en tant que responsable civile dans l'organisation du FLN, en attendant qu'elle rejoigne les groupes armés, quelque part dans un des maquis de la région. Cette nature de femme décidée d'aller jusqu'au bout de ses forces la rendait plus courageuse. Elle ne craignait personne, bien au contraire, elle se voyait toujours stimulée pour davantage de participation, en termes d'actions déterminantes, au profit du «nidham» – l'organisation du FLN – ce terme d'extrême solennité et de profonds espoirs qui ne quittait pas ses lèvres. Parce que le «nidham» d'alors était, pour les patriotes, tout un système de gestion et de régulation des actions politiques et militaires, au cours de cette période d'adaptation à un nouveau contexte de lutte qui devait se maintenir jusqu'à la libération du pays. Alors, bravant les risques de plus en plus menaçants, elle rejoint le maquis et continue d'animer les cellules qui se trouvaient sous son autorité à Cherchell. C'est ainsi que Lalla Zouleikha, qui se trouvait dans les unités combattantes, a été capturée lors d'un impressionnant ratissage où l'armée coloniale a dû utiliser toutes ses forces cantonnées dans la région. Et, pour faire leur cinéma traditionnel afin d'impressionner les populations rurales, elle a été crucifiée sur une automobile blindée (un half-track) et promenée dans les douars en signe de réjouissances pour un «gros gibier» d'une valeur inestimable. Ensuite, elle a subi 10 jours d'affreuses et inhumaines tortures avant d'être froidement, voire sauvagement exécutée, le 25 octobre 1957, et son corps jeté au bord de la route dans le but de terroriser les habitants du douar, sans respect de la loi et des usages pour une prisonnière de guerre.