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Absence algérienne
13e Festival de Dubaï(DIFF)
Publié dans El Watan le 17 - 12 - 2016

Au menu du 13e Festival de Dubaï (DIFF), pas moins de 156 films en 44 langues venus de 55 pays. Mais quel regret de ne voir aucun film algérien au festival ! Mis à part l'actrice algérienne Adila Bendimerad dans un film libanais (voir ci-dessous), cette absence inquiète. Dans ce gigantesque et somptueux Mall Of Emirates où se déroule toute la manifestation avec ses nombreuses salles de cinéma, ses sapins de Noël à tous les étages et ses montagnes de chocolat tous les deux pas, c'est festive time in Dubaï ! Voyage dans la riche programmation du festival.
Jeu. 8 déc. Cinevox 6 : «The Road to Mandalay» (Birmanie/France), réalisé par Midi Z. un groupe de harragas birmans fuient leur pays et trouvent refuge après maintes difficultés à Bangkok. Même si tout va mal pour eux, un couple, Lianqing et Guao, tentent de filer le parfait amour. Alors que leurs liens se resserrent, la perspective d'une solution à leurs problèmes s'éloigne. Ainsi, à Bangkok, ils ne voient qu'un grand vide et leurs illusions perdues. Le réalisateur mène à bien son récit jusqu'à la fin tragique.
Vend. 9 déc.
Cinevox 3 : «Frantz» (France/Allemagne) est l'œuvre de François Ozon, l'un des plus brillants cinéastes français actuels. Dans ce récit situé après la première guerre mondiale dans une petite ville allemande, on voit Ana se recueillir sur la tombe de son fiancé Frantz. Un jeune homme plein d'allure dépose aussi des fleurs sur la tombe.
D'abord une énigme pour Ana, elle apprend ensuite qu'Adrien, un Français, était l'ami de Frantz à Paris avant que la guerre ne les sépare. Frantz est mort dans les tranchées de la Somme. Le hasard de la rencontre avec Adrien renoue alors le fil des souvenirs. Mais tout bascule quand Adrien avoue que c'est lui qui a tué Frantz et qu'il est venu en Allemagne demander pardon à la famille. C'est une œuvre en noir et blanc, sensible et plastiquement très belle. Ozon a réussi encore une fois un travail de mise en scène vibrant et intense.
Sam. 10 déc. Cinevox 5 : Réalisé par le malien Daouda Coulibaly, «Wulu» (Sénégal/France) se passe à la frontière entre le Mali, la Guinée et le Sénégal. L'endroit apparait ici comme l'enfer du trafic, de la violence et de tous les dangers. Le scénario n'évoque pas pour rien l'hallucinante saga d'Air Cocaïne où un avion parti du Venezuela, rempli de drogue, a atterri à Gao dans le nord du Mali. Le récit suit Ladji, receveur de bus malien, qui tombe dans le trafic de drogue sous prétexte de sauver sa soeur de la prostitution. Curieuse histoire africaine figée sur le modèle du thriller américain. Même jour, même salle, visionnage du documentaire qatari «Al Tahadi» (le défi) de Yuri Ancarani sur un concours annuel de chasse aux faucons dans le désert. Drôle de télescopage entre une activité séculaire et les gadgets ultra-modernes d'aujourd'hui.
Dim. 11 déc. Cinevox 14 : Un certain Adnan, voyageur libanais, rencontre sur les rives de la Seine sa cousine Layla. Ils s'aiment et profitent de la beauté de Paris et de ses bonnes surprises by night. On en reste là. Guère mieux qu'un feuilleton TV, «Le Voyageur» (production Liban/France) est réalisé par Hadi Gandour. Même jour au Cinevox 13, le film de Kaouter Ben Hania, «Zaïneb n'aime pas la neige» (production Qatar/ France/ Tunisie). Beau film sur l'exil d'une jeune tunisienne au Québec. Mise en scène quasi irréprochable qui montre la petite fille souffrant de l'écart trop grand entre son pays natal et celui où elle se trouve.
Œuvre forte sur le mal de l'immigration. Au Cinevox 13, ce dimanche aussi, «The Cinema Travellers» (Inde), un long métrage documentaire réalisé par Shirley Abraham et Amit Madeshiya. Pendant des décennies, les villages indiens les plus isolés voyaient arriver tous les ans un cinéma ambulant. Spectateurs et appareil de projection se tenaient sous une grande tente comme au cirque. Mais la vidéo et la télévision ont fait cesser cette vieille pratique, ce que rappellent avec nostalgie les villageois aujourd'hui. Il leur reste les fêtes religieuses, les foires de village mais plus le cinéma. Même soir au Cinevox 6, un excellent dessin animé égyptien (où l'on découvre que l'Egypte possède un grand studio d'animation). Il s'agit d'un court métrage produit et réalisé par Ahmed Roshdy et Khaled Abol Naga.
Au Caire, rien ne sera plus comme avant après les grands rassemblements de Maidan Ettahrir. C'est devenu un mythe, cette place est au cœur d'innombrable essais, romans, films documentaires et fictions. Restait le dessin animé.
Ce film intitulé «Le Marchand de patates douces» évoque les révoltes, les espoirs et désillusions des foules de Tahrir. Le prétexte : la disparition d'un enfant sur la place et l'enquête qui suit.
Lun. 12 déc. Cinevox 3 : «Jassad Gharib» (Corps étranger) est une production Tunisie/Qatar/France réalisée par Raja Amari avec Hiam Abbass dans le rôle de Leïla, riche veuve en manque d'affection.
Elle emploie comme aide ménagère Salma qui vient de fuir la Tunisie et son frère djihadiste qu'elle a dénoncé. Leïla ne lésine pas sur les dépenses pour faire de Salma un parisienne chic. Elle l'aide même à régulariser ses papiers. Avec stupeur d'abord mais ensuite avec plaisir, Salma se retrouve dans le lit de Leïla.
Ce film a été interdit aux moins de 15 ans à Dubaï. Raja Amari risque de passer pour l'agent provocateur du cinéma tunisien. Comme Pedro Almodovar dans son pays, l'Espagne. Même jour, même salle, un beau documentaire en hommage à Abbas Kiarostami, signé Seïfollah Samadian, un clin d'œil sur la brillante carrière du grand cinéaste iranien, l'auteur tant admiré de «Le Goût de la cerise», «Close Up», «A travers les Oliviers»… Même jour, dans la même salle : «Le Cygne arabe», (USA) un court métrage de fiction réalisé par Fahad Aljoudi, un cinéaste saoudiens vivant aux Etats-Unis. C'est le rêve secret de Noor, passionnée de danse classique qui veut faire carrière dans un grand ballet. Son frère s'y oppose et veut la renvoyer en Arabie Saoudite.
Mar. 13 déc. Souq Madinat Theater. Au Liban, la guerre civile réapparait avec obstination dans le cinéma, avec les clivages religieux et les déchirures affectives.
C'est le thème de «Nar min nar» (L'incendie d'un incendie), une production libanaise réalisée par Georges Hachem. Un cinéaste et un journaliste, liés d'amitié au temps où Beyrouth comptait ses morts ont vu leur relation troublée par la guerre cruelle qui les a vu prendre chacun un chemin différent. Et peut-être aussi par le fait qu'ils ont aimé la même femme, Amira. Bien orchestrée, cette histoire sous forme de film dans le film nous dit aussi combien il est difficile pour les Libanais de se réconcilier et d'oublier les temps maudits. Georges Hachem a choisi l'actrice algérienne Adila Bendimerad et le dramaturge libanais Wajdi Mouawad pour des rôles importants.
Bollywood et Hollywood. Sous la dynamique impulsion de son directeur artistique, Masoud Amrallah Al Ali, le festival de Dubaï progresse tous les ans au niveau de la qualité de ses programmes et de la fréquentation des salles (les 14 salles sont remplies à toutes les séances) de même que de sa couverture médiatique arabe et internationale. Il faut noter aussi que cette manifestation reste à dimension humaine et il règne à Jumeïrah, cœur du festival, une convivialité peu commune pendant les sept jours de décembre, autour des rencontres, débats et conférences en marge des projections. La diversité des programmes permet de découvrir à la fois de nouveaux talents, un cinéma jeune et fécond comme celui fait dans les studios des Emirats et de grosses productions spectaculaires venues de Hollywood et de Bollywood, les studios de Bombay.
Chaque année, les très nombreux expatriés indiens attendent avec impatience le festival de Dubaï, les bonnes surprises de la sélection de leur pays et les grandes stars qui viennent avec. Cette année, la superbe Rekha, qui a reçu ici un prix prestigieux pour son œuvre riche de 180 films, a foulé le tapis rouge au milieu d'un immense tourbillon de ses fans indiens.


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