Le projet de loi sur la santé, qui sera prochainement débattu à l'Assemblée populaire nationale ( APN), apportera-t-il des réponses appropriées aux attentes des professionnels du secteur et des citoyens, notamment en ce qui concerne la réglementation des tarifs, le contrôle du privé et l'amélioration des conditions de prise en charge dans les structures sanitaires publiques ? D'emblée, à la lecture du document, dont nous disposons d'une copie, les mesures prévues à cet effet sont bien là. Elles mettent le financement du secteur au cœur des changements prévus. Mais les appréhensions aussi quant aux moyens d'assurer l'égalité d'accès aux soins avec un champ plus ouvert au privé. Le financement de la santé, essentiellement par l'Etat et la Sécurité sociale, mérite d'être conforté en vue de sauvegarder les équilibres nécessaires, car il est devenu difficile de mobiliser d'autres ressources pour la prise en charge d'une demande de services en constante augmentation, compte tenu des données démographiques et épidémiologiques», expliquent les rédacteurs du PLF pour qui le plus important est de trouver d'autres mécanismes adaptés visant la maîtrise des dépenses, tout en améliorant la qualité et l'efficacité des services de santé. «Cet objectif requiert la formation et la normalisation des ressources humaines, la rationalisation des moyens matériels et l'adaptation du cadre organisationnel permettant une mutualisation des potentialités des secteurs public et privé de santé, notamment dans les zones à faible couverture sanitaire», lit-on dans ledit document, dans lequel il est expliqué que l'objectif étant de renforcer le service public de santé en le rendant plus accessible et plus performant et de mieux exploiter les capacités du secteur privé et de l'offre de soins qu'il représente, pour que les citoyens puissent être pris en charge dans les meilleures conditions. Il s'agit aussi d'organiser des activités médicales et de réaménager l'Etablissement public de santé en lui conférant le statut d'Etablissement public à gestion spécifique. Ce sont en somme les objectifs assignés au PLF portant loi sanitaire. Cela outre la mise en place d'un dispositif d'évaluation et d'audit des structures et établissements de santé à travers la création d'une agence nationale, ainsi que le renforcement et l'élargissement des pouvoirs de contrôle et d'inspection. Réduire les inégalités La réduction des inégalités d'accès aux soins figure ainsi parmi les priorités du gouvernement, comme le stipule l'article 15. «L'Etat œuvre à la réduction des inégalités en matière d'accès aux services de santé et organise la complémentarité entre les secteurs public et privé de santé», stipule l'article en question. Réussir la complémentarité entre les deux secteurs est donc l'un des points sur lesquels misent les pouvoirs publics. Ce qui est souligné également plus loin au chapitre organisation et financement du système de santé dans l'article 275 qui stipule : «Le système national de santé assure au profit de la population l'ensemble des prestations de santé. Son organisation et son fonctionnement sont basés sur les principes d'universalité, d'égalité d'accès aux soins, de solidarité, d'équité et de continuité du service public et des prestations de santé. Pour cela, le système auquel aspire le gouvernement, comme indiqué dans l'article 276, devrait se baser sur une planification sanitaire qui organise une répartition équitable des ressources humaines, matérielles et financières au niveau national, régional et local. C'est justement la carte sanitaire (article 279) qui constitue le schéma directeur de la santé. Elle fixe les normes de couverture sanitaire et détermine les moyens à mobiliser aux niveaux national et régional en tenant compte notamment du bassin de population, des caractéristiques épidémiologiques, sanitaires, géographiques, démographiques et socioéconomiques, afin d'assurer une répartition équitable des soins de santé. Elle vise également à assurer l'accès et l'amélioration des soins à travers tout le territoire national. Par ailleurs, en matière de financement du secteur public, ledit projet stipule dans l'article qu'il (le financement ) s'effectue sur la base de contrats d'objectifs et de performance signés avec les services compétents du ministère chargé de la Santé. Contrôle financier En vertu de l'article 313, l'Etablissement public de santé sera soumis, conformément à la législation et à la réglementation en vigueur, au contrôle financier préalable, pour les dépenses des personnels régis par le statut général de la Fonction publique au contrôle a posteriori pour les autres dépenses. Concernant la réglementation du privé, l'article 316 explique que la création des structures et des établissements privés de santé devrait répondre aux besoins de la population et aux normes définies par la carte sanitaire et aux priorités fixées par le schéma d'organisation sanitaire national et régional. Ces structures sont appelées, selon l'article 321, à assurer la mission de service public de santé, en répondant aux conditions d'un cahier des charges fixé par le ministre chargé de la Santé, avec un champ d'intervention élargi. A propos de la contribution des organismes de Sécurité sociale dans le financement du secteur, pas de précisions. Il est juste indiqué dans l'article 344 que ces organismes «assurent une contribution au titre de la couverture financière des frais de soins dispensés par les établissements publics de santé aux assurés sociaux et à leurs ayants droit sur une base contractuelle avec le ministère chargé de la Santé». Les actes de soins fixés par la nomenclature Plus loin, il est précisé dans l'article 349 que les actes de soins et les activités de santé au sein des structures et établissements de santé sont fixés par la nomenclature et la tarification des actes professionnels de santé, alors que les tarifs des prestations de services autres que ceux inhérents aux actes et activités médicales, fournies par les établissements de santé publics et privés, sont fixés par le ministre chargé de la Santé en relation avec les ministres concernés (article 350). Autant de dispositifs qui visent à garantir l'équilibre du système, tel que rappelé dans l'article 351 : «L'Etat veille à l'équilibre financier du système national de santé.» A quel prix ? Pour le SNPSSP «c'est qu'il risque d'enterrer définitivement le secteur public de la santé dans notre pays. C'est un texte de loi qui appuierait et consoliderait la privatisation dans le secteur en élargissant le champ d'intervention du privé à tous les domaines d'activités de soins, de prévention, d'exploration, de formation et de recherche». Le syndicat des praticiens publics estime que c'est plutôt au niveau des lois portant sur la Sécurité sociale qu'il faudrait agir. Des lois qui remontent à 1983, bien avant la loi sanitaire de 1985.