Les différents dispositifs mis en place par les pouvoirs publics pour mettre un terme aux transferts illicites des devises vers l'étranger n'arrivent toujours pas à endiguer ce phénomène, qui continue à miner l'économie nationale. Pour la seule année 2016, pas moins de 8,25 milliards de dinars, soit plus de 72 millions de dollars, ont été frauduleusement transférés par 89 opérateurs économiques activant sous le statut de personnes morales (85 sociétés et 4 personnes physiques). C'est ce qu'a révélé, hier à l'APS, le directeur des contrôles a posteriori par intérim à la Direction générale des Douanes, Mahmoud Aoudia. Ces infractions ont donné lieu à des poursuites judiciaires pour 362 cas recensés et à des amendes d'un montant de plus de 41 milliards de dinars. Selon le même responsable, ce phénomène de transfert illicite de capitaux a «remarquablement diminué en 2016», comparativement à 2015 où les Douanes algériennes «avaient constaté 547 infractions commises par 140 opérateurs» ayant donné lieu à un transfert illégal d'une valeur de 14 milliards de dinars, soit près de 127 millions de dollars. Le ministre des Finances, Hadji Baba Ammi, avait indiqué, le mois passé au Conseil de la nation, qu'il y avait une nette amélioration en matière de lutte contre les importateurs fraudeurs et le transfert illicite de devises, estimant, toutefois, qu'il faudrait du temps pour venir à bout de ces phénomènes. «On ne peut pas dire que du jour au lendemain on va arrêter ce genre de comportements, mais nous allons essayer d'aller jusqu'au bout de notre objectif par le renforcement des moyens de l'administration des Douanes pour assurer un contrôle plus rigoureux des opérations d'importation», a souligné le ministre. Il faut dire, à ce propos, que la facturation excessive, plus importante que la valeur réelle des biens importés, demeure le moyen le plus usité par les fraudeurs. Les Douanes algériennes affirment en effet que «la majoration de la valeur en douane déclarée à l'importation, c'est-à-dire la surfacturation, représente encore la grande majorité des modes opératoires». M. Aoudia cite également la minoration de la valeur en douane déclarée, lorsqu'il s'agit d'opérations d'exportation, le non-rapatriement des montants en devises des marchandises exportées, ainsi que les doubles transferts pour une même marchandise. Mais pour le même responsable, les différentes mesures instaurées par les Douanes et la Banque d'Algérie ont contribué à réduire de manière «significative» certaines infractions de transfert illicite. Il cite notamment les opérations d'importation fictives de marchandises, le transfert de devises en contrepartie de marchandises sans valeur commerciale (sable, pierres, déchets de vêtements...) abandonnées dans les zones sous-douane, ainsi que la double facturation à travers laquelle l'importateur délinquant présente à la banque une facture fortement majorée pour transférer davantage de devises mais transmet aux services douaniers une facture minorée pour payer moins de droits de douane. Les opérateurs versés dans ces pratiques frauduleuses «procèdent généralement à la constitution de ‘‘sociétés-écrans'' à l'étranger, souvent dans les pays réputés être des paradis fiscaux, qui établissent des factures majorées pour les marchandises importées par ces opérateurs», a-t-il expliqué. S'agissant des mesures prises pour lutter contre ces actes délictueux, M. Aoudia rappelle «l'instauration du système de valeur-fourchette pour certaines catégories de produits qui font l'objet de manœuvre de fraude, la mise en place de base de données des valeurs déclarées d'équipements et matériels, la connexion aux bases des données Reuters sur les transactions internationales portant sur les produits côtés en Bourse, ainsi que le fret maritime et la signature de convention d'assistance mutuelle internationale». Toutefois, admet-il, «même si ces mesures ont permis de mettre un terme à certains modes opératoires de transfert illicite de devises, les services douaniers continuent de constater des infractions liées aux changes à travers notamment la surfacturation».