Les campagnes de prohibition reprennent de plus belle dans la wilaya de Boumerdès. Certains responsables locaux semblent accorder autant d'importance aux questions relevant de la foi qu'à celles relatives au développement socio-économique de la région. A défaut de booster le tourisme, qui stagne depuis des décennies, les autorités de la wilaya ont ordonné la fermeture, pour une durée d'un mois, de quatre débits de boissons alcoolisées se trouvant à la cité l'Albatros de Boumerdès. Il s'agit des derniers commerces du genre qui activent dans la légalité sur tout le territoire de la wilaya. Malgré la fin du délai de fermeture, les commerces en question restent toujours clos. Ce qui suscite la colère et l'indignation de leurs propriétaires. «Nous nous avons des agréments en bonne et due forme. Nous employons seize personnes au total, toutes assurées. Nous versons une moyenne de 200 000 DA annuellement à la Casnos et près de 300 000 DA à la CNAS. Nous devions reprendre l'activité dimanche dernier, mais nous n'avons pas encore obtenu le feu vert des autorités», indique l'un d'eux. Dans la décision de fermeture signée par le wali, les concernés sont accusés de n'avoir pas respecté «les dispositions légales en vigueur, notamment celles relatives à la sécurité, l'ordre public et la quiétude générale». Pour les autorités locales, c'est la vente de boissons alcoolisées qui est à l'origine de l'insécurité, la multiplication des agressions et la prolifération des soulards au lieudit l'Albatros, l'endroit où se trouvent les débits de boissons. Un coin maudit, sale et dépourvu d'éclairage public. «Ce n'est pas nous qui devons assurer la sécurité devant et à proximité de nos commerces et obliger les gens d'aller boire ailleurs. Cela est la mission des policiers. Parfois on les appelle, mais ils ne viennent pas. Ils se présentent juste avant 18h pour nous demander de fermer boutique, alors qu'aucune loi ne nous oblige à le faire», dénonce un employé dans l'un des magasins en question. Selon lui, la fermeture de leur commerce rend service aux tenants des idéologies rétrogrades et aux revendeurs illicites de boissons alcoolisées. «Nos clients partent, avec tous les risques qu'on sait, jusqu'aux wilayas de Tizi Ouzou ou d'Alger pour consoler leur frustration, car la wilaya de Boumerdès ne compte que deux bars-restaurants activant dans la légalité, dont un se trouve à Boumerdès et l'autre à Figuier», souligne-t-il, en dénonçant les tentatives de moralisation de la société. «Avant l'avènement du terrorisme islamiste, les gens étaient tolérants. On buvait tranquillement au bord des plages. Personne ne les inquiétait. Il y avait beaucoup d'étrangers, notamment des Russes, qui passaient leurs vacances ici. A l'époque, il y avait une dizaine de bars à Boumerdès, Figuier, Boudouaou et Zemmouri, dont les plus célèbres étaient El Kahina, El Ghar, Loudmia, El Bahri, l'Albatros, Missipssa, Denise, La Rascasse, El Missili, Kiki, Si Moh, Koukas, El Rougia, etc.», se souvient-il avec nostalgie. Aujourd'hui, il ne reste que le Missipssa et La Rascasse, dit-il, ajoutant que même les hôtels ne servent pas de boissons alcoolisées.