Il y a 30 ans, le programme Erasmus de l'Union européenne est lancé au profit des étudiants européens. Au fil des années, il s'est élargi aux pays partenaires de l'Europe, dont l'Algérie. Une conférence-débat lui sera consacrée dimanche à Alger. Mme Federica Mogherini, Haute représentante de l'Union européenne pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité et vice-présidente de la Commission européenne, entamera une visite de deux jours, à partir de demain, à Alger. Au programme de dimanche, elle présidera une conférence-débat avec les étudiants de l'université Alger 3. Le débat portera sur le programme Erasmus qui fête cette année son 30e anniversaire et dont l'Algérie est l'un des pays partenaires (Erasmus est l'acronyme d'European region action scheme for the mobility of university students). Son but est de renforcer les compétences et les qualifications nécessaires de millions d'étudiants. Statistiquement, depuis 30 ans, plus de 9 millions de participants y ont adhéré, et entre 2014 et 2016, près de 2 millions de personnes en Europe et ailleurs en ont bénéficié. C'est en 2014 qu'il a été décidé de rassembler 7 programmes en un seul sous le nom d'Erasmus+. «Le nouveau programme vise à stimuler les compétences et l'employabilité, aussi bien qu'à moderniser l'éducation, la formation et l'emploi dans l'UE et dans ses pays partenaires dans le monde entier», lit-on dans le communiqué transmis par la délégation de l'Union européenne en Algérie. Tous les étudiants algériens désirant continuer leur travail de recherche ou porteurs de projet peuvent postuler à ce programme. La démarche est simple : postuler et suivre les annonces du programme généralement affichées dans les franchises universitaires de tous le pays. Le programme permet en effet à des établissements d'enseignement supérieur d'envoyer et de recevoir plus de 28 000 étudiants et membres du personnel à destination et en provenance de pays situés en dehors d'Europe. Aujourd'hui, Erasmus+ inclut une forte dimension internationale, notamment dans les champs de l'enseignement supérieur et la jeunesse. Toujours selon le communiqué, les appels à proposition lancés annuellement portent d'abord sur la mobilité de crédit international (ICM), c'est-à-dire des échanges d'étudiants et de personnel entre les Pays Programmes et les Pays Partenaires. «La période d'études à l'étranger doit être partie intégrante d'un cursus diplômant. Ensuite, les masters conjoints Erasmus Mundus (EMJMD), autrement dit des programmes de Master intégrés internationaux et de haute qualité, ainsi que des bourses financées par l'UE pour attirer les meilleurs étudiants en Europe. Il y a aussi le renforcement des capacités dans l'enseignement supérieur (CBHE) : un soutien à la modernisation et à la réforme des institutions et des systèmes d'enseignement supérieur des Pays Partenaires éligibles», précise aussi le communiqué. Rêve En Algérie, 67 projets de mobilité liant des universités européennes et algériennes ont été choisis entre 2015-2016 pour organiser la mobilité de 822 étudiants et personnels (677 en Europe et 145 en Algérie). A travers les ICM, Erasmus+ finance la mobilité de crédit, c'est-à-dire la mobilité des étudiants entre 3 et 12 mois (dans les deux directions) pour obtenir des crédits dans une institution hôte, qui sont alors reconnus par l'institution domestique. Un salaire leur est octroyé pour la prise en charge sur place (hébergement, restauration, transport…). Cette action finance aussi jusqu'à 2 mois la mobilité du personnel des universités. Les bourses sont attribuées sur la base des accords interinstitutionnels entre des universités des «pays-programme » et «pays partenaires». Slimane Boukraa de Ghardaïa est l'un de ceux qui été choisis pour prendre part à ce programme. A 30 ans, il est aujourd'hui enseignant-chercheur à l'Ecole nationale supérieure d'agronomie d'El Harrach à Alger où il a eu son ingéniorat. Il est collaborateur scientifique et chercheur libre à Gembloux Agro Bio-Tech à l'université de Liège en Belgique et également membre de la Société royale belge d'entomologie. Il était boursier du programme Erasmus Mundus pendant 10 mois à Gembloux Agro-Bio Tech en Belgique. C'est en 2009 qu'il a fait partie du cursus et de la Convention étrangère en sciences agronomiques et ingénierie biologique entre son école d'Alger et l'université d'accueil. C'est suite à une simple affiche accrochée dans son école d'Alger que Boukraa a pris connaissance de ce projet européen. Un rêve qui se réalise. Il a fini par faire une recherche sur la bioécologie des moustiques et l'analyse des risques d'introduction des arbovirus en Belgique et au Maghreb. «J'ai également choisi l'Université de Liège (ULg) pour l'ambiance internationale, vu qu'ULg reçoit chaque année des étudiants de près de 50 nationalités», explique l'enseignant-chercheur. Mohamed Abdellah Khoudja de M'sila est un autre exemple. Il a 34 ans. Aujourd'hui, il est enseignant à l'université de M'sila en génie technique. Il est aussi inscrit en la 5e année doctorat à l'Ecole nationale polytechnique d'El Harrach. En mai 2016, il faisait partie des bénéficiaires du programme Erasmus. Avec deux mois de retard à cause de l'absence de l'autorisation du ministère de l'Enseignement supérieur, il finit tout de même par aller à l'université de West Scotland, au Royaume-Uni. Il a fait voler un drone qu'il a construit en Algérie durant les 4 mois de mobilité, spécialité : robotique. Tout a commencé par une simple annonce des organisateurs du programme, mais surtout par les encouragements d'un des anciens étudiants de polytechnique basé dans l'une des universités anglaises. «J'ai réussi à faire et à terminer la première partie de la recherche pour un prototype tout seul ici dans mon pays», explique Mohamed Abdellah. En Algérie, il était obligé d'acheter avec ses propres deniers le matériel logistique qu'il a d'ailleurs pris avec lui pour la suite de sa recherche à West Scotland. Retour Il a inventé une commande intelligente pour drone. Il a pu, explique-t-il, optimiser certains détails déjà existants. En novembre 2016 et pour un délai d'une année seulement fixée par le programme européen, Mohamed Abdellah Khoudja termine sa recherche avant l'heure. Il n'avait même pas besoin de l'extension des délais accordés par le même programme. Il est revenu par la suite à Alger. «L'Europe est parfaite pour la recherche, les études et les moyens technologiques. Je suis revenu pour servir mon pays», dit-il en affirmant qu'il a même eu des offres de travail comme l'utilisation des drones dans le secteur agricole ou le transport. Refus. Le seul problème qu'il a soulevé est lié au démarrage, car Mohamed Abdellah Khoudja et Slimane Boukraa expliquent qu'il n'existe pas de coordination entre les organisateurs de ce programme et le service visa des pays d'accueil. Des difficultés sont enregistrées dans le processus de demande de visa. Témoignage : «Les démarches administratives et celles de l'obtention du visa étaient assez longues, tandis que les démarches académiques d'inscription dans mon université d'accueil étaient fluides et rapides», se désole-t-il. En dépit de leur acceptation, certains étudiants rencontrent parfois des difficultés pour obtenir des visas auprès de certains Etats membres. «C'est une question qui relève des Etats membres. Mais en tout état de cause, le problème ne concerne pas uniquement les étudiants algériens», explique Mme Malika Kebir, du Bureau national Erasmus+. De plus, dans le processus, les organisateurs d'Erasmus+ ne sont pas habilités à intervenir dans ce genre de démarche pour l'obtention de visa. Certains Etats membres de l'Union européenne ont compris l'importance de la démarche et ont décidé de supprimer les procédures de visa, à l'exemple de la Pologne. Aujourd'hui, le taux de demandes algériennes représente en moyenne 7% des demandes de la région du sud de la Méditerranée. Il s'agit de projets de coopération transnationaux basés sur des partenariats multilatéraux principalement entre les Etablissements d'enseignement supérieur (EESs) des Pays-Programmes et des Pays-Partenaires éligibles, financés par les instruments de l'UE. Le but est de soutenir la modernisation, l'accessibilité et l'internationalisation de l'enseignement supérieur dans les Pays-Partenaires. Les projets retenus impliquant l'Algérie couvrent le développement de programmes d'études, la modernisation de la gouvernance, la gestion et le fonctionnement des EES, ainsi que le renforcement des relations entre les EES et l'environnement économique et social en général.