Les cours des devises sur le marché informel continuent de flamber, se maintenant à des niveaux très élevés face à une monnaie locale faiblarde. Au square Port-Saïd d'Alger, l'un des principaux marchés parallèles de change du pays, les devises étrangères se négociaient à prix fort, que rien ne semble ébranler en ce début de printemps, alimenté essentiellement par une demande relativement importante émanant d'hommes d'affaires, de candidats aux voyages religieux et de l'approche des vacances d'été, selon les témoignages des cambistes interrogés. L'euro, la monnaie la plus prisée, valait 189 DA à l'achat et 187 DA à la vente au marché noir de la capitale. Le dollar américain était, quant à lui, à 175 DA à l'achat et 173 DA à la vente. Sur le marché officiel interbancaire des changes, c'est le grand écart. Le billet vert et la monnaie européenne étaient cotés respectivement à 110 DA et 117 DA, d'après les chiffres publiés sur le site officiel de la Banque d'Algérie. Sur ce marché noir de la devise, toléré par les autorités, une seule règle vaut, celle de l'offre et de la demande. «Les prix à la consommation ont augmenté notamment en 2017, c'est tout à fait logique que les valeurs des devises étrangères suivent la même tendance. Certes, on est loin des années fastes d'avant la crise, mais la demande est toujours là», souligne un jeune cambiste, rencontré à deux pas du palais de justice, pour expliquer la flambée des cours de devises. Comme lui, les vendeurs informels peuvent compter sur une clientèle diverse. «A cette période de l'année, la demande émane particulièrement des personnes qui partent en séjours religieux vers les Lieux Saints de l'islam (omra) et les étudiants désireux de poursuivre leurs études à l'étranger», note un autre cambiste. Ce dernier dit constater en revanche un léger reflux de la demande exprimée par les importateurs, depuis que le gouvernement a donné un tour de vis aux opérations du commerce extérieur à travers le contrôle notamment de la facture des importations. L'approche des vacances d'été contribue également à tirer la demande vers le haut. En dépit de la cherté des devises proposées, d'aucuns ne rechignent pas à s'en approvisionner dans l'espoir de se prémunir contre d'éventuelles hausses. C'est le cas de Mohamed, cadre dans une société privée. «J'ai programmé de passer deux semaines en France en juin. Je préfère échanger une petite somme aujourd'hui au lieu d'attendre les prochains mois, car les cours de devises vont, à n'en pas douter, flamber davantage», confie notre interlocuteur non sans pester contre une «minable» allocation touristique, fixée par les autorités à seulement 115 euros en fonction de la cotation officielle du dinar. Une situation qui pénalise depuis fort longtemps les citoyens, obligés de se rabattre sur le marché noir. Comme beaucoup d'Algériens, il réclame une revalorisation de l'allocation touristique comme c'est le cas dans les pays voisins, où celle-ci est plus conséquente qu'en Algérie. Par ailleurs, d'autres cambistes interrogés évoquent le fait que les monnaies étrangères sont devenues des valeurs refuge, au même titre que l'immobilier, face à la dépréciation de la monnaie nationale. Ce phénomène participe lui aussi à faire pression sur les prix des devises, selon eux.