Ali DEBBI. Professeur en management public. Université Mohamed Boudiaf de M'sila L'intervention directe qui n'est pas toujours coordonnée avec les services municipaux mène, dans plusieurs cas, à des chevauchements et des dysfonctions du service public de la capitale. Dans ce sens, nous pouvons qualifier les rapports entre services municipaux de la capitale et administration centrale, de bons, mais dans le sens descendant : administration centrale–services de la capitale. En effet, la coopération et la mise en place «des relations équilibrées» constituent le garant d'un meilleur appui pour une gestion administrative et politique de la capitale. Ces relations dans le cas algérien devraient être améliorées pour que l'administration de la capitale garde une position forte envers l'administration centrale. Par ailleurs, la capitale essaye de nouer des relations garantissant les principes de la décentralisation et la meilleure répartition des compétences. Il est indispensable d'équilibrer entre les intérêts de la capitale en tant que collectivité locale et les intérêts de la communauté nationale. A l'inverse, il faut éviter de réduire l'intérêt de tout un pays dans la priorité d'un territoire limité, même s'il s'agit de la capitale ! La capitale est redevable envers l'Etat concernant la réhabilitation des monuments historiques, culturels et religieux. Dans ce volet, la capitale algérienne a fait des efforts remarquables, qui nécessitent cependant le renforcement, notamment en ce qui concerne la réhabilitation de la cité historique La Casbah. Nous imaginons aussi que la capitale algérienne va travailler avec les autorités étatiques pour résoudre les questions confrontées par les capitales européennes, en particulier : délimiter clairement entre les biens et les terrains de la commune et ceux de l'Etat, établir des textes qui clarifient la propriété communale et sa gestion et, enfin, mieux définir le statut juridique de l'entreprise communale et ses différentes formes d'activité. Améliorer les rapports avec les administrés : La capitale algérienne doit améliorer ses actions dans le futur pour regagner la confiance des citoyens. En effet, une forte perte de confiance, d'espoir et d'horizon chez les habitants d'Alger est constatée à cause de plusieurs facteurs, en particulier la non-satisfaction de leurs besoins. Les résidents indiquent même qu'Alger est devenue «invivable» à cause de la densité populaire et la faible adéquation du service public ! Ainsi, nous pouvons confirmer l'existence d'«un fossé» entre les citoyens-électeurs et les élus-politiciens. Une crédibilité affaiblie d'une année à une autre, et une perte de confiance dans la démocratie locale elle-même manifestée par un taux de participation dans les élections à Alger le plus faible au niveau national. Les services de la capitale qui sont en contact direct avec les citoyens devraient travailler pour que la démocratie locale devienne l'affaire des citoyens. Le vote et le choix des élus doivent être appréhendés comme droit, mais aussi comme devoir. En outre, les hommes et les femmes politiques se trouvent contraints de faire un grand effort pour attirer l'attention des différents groupes de public : jeunes, enfants, retraités, ouvriers, riches, pauvres, etc. Ainsi, les partis politiques sont invités à impliquer les représentants de ces groupes dans les listes électorales pour les APC (Assemblée populaire communale) et les APW (Assemblée populaire de wilaya). Il faut que les élus dirigeants de la capitale exploitent leur «magie» pour assurer un contact continu entre administrés et services administratifs et techniques de la capitale. Ce contact continu est le meilleur garant pour que les administrés comprennent les choix politiques et les actions qui en découlent, et les adhèrent, et pour qu'ils proposent les pistes d'amélioration et de perfection de la vie dans la capitale algérienne. Un autre élément, qui manque Alger, concerne la responsabilisation des élus : il fallait passer à un nouvel élan de responsabilisation des décideurs publics locaux. Cette responsabilisation qui passe par l'évaluation des politiques publique détermine le sort des prochaines élections, et récompense les élus efficaces. Il convient d'informer les citoyens sur les résultats des évaluations, sur les activités des municipalités, et pourquoi pas les impliquer de façon efficace. Alger pourrait inventer sa propre démocratie locale, et s'inspirer même des règles standards de la démocratie valables dans le monde, une démocratie «mythe» dans les têtes des Algérois ! Alger est doit montrer qu'elle est ouverte pour l'organisation des réunions et des manifestations de différents ordres, sur la voie publique. Développer une politique internationale distinguée : Les capitales établissent des relations entre elles pour partager leurs préoccupations et leurs expériences. Les relations entre capitales se développent à travers le contact direct ou dans un cadre de réseaux selon le cas. En Algérie, la législation garantit la possibilité à la capitale pour réaliser des relations avec les autres capitales dans le monde dans le cadre de la coopération décentralisée. Alger doit chercher par cette coopération le transfert des compétences des capitales dans les différents domaines de la gestion publique locale. Des expériences de coopération décentralisée sont déjà concrétisées dans plusieurs domaines : gestion des déchets, réhabilitation des monuments historiques, formation, gestion des jardins, etc. Par ailleurs, il est opportun que la capitale algérienne développe une politique internationale pour faire entendre sa voix sur les différents dossiers régionaux et mondiaux. Une politique qui implique des actions et des moyens, permet notamment à Alger de gagner une position marquante dans le Maghreb, le monde arabe, l'Afrique et la Méditerranée. Une politique internationale qui pourrait être axée sur plusieurs domaines : touristique, économique, historique, politique, diplomatique, etc. A souligner que la réussite de cette politique internationale est conditionnée par la dotation des crédits pour subventionner des actions dans les autres capitales, notamment voisines, en particulier africaines. Alger devrait aussi adhérer à des associations internationales des communes, des mairies, des communautés de commune, et de toute forme d'instance de coopération et de manifestation.
Conclusion Alger n'arrive pas à suivre les transformations vécues par les capitales mondiales. Cette recherche a montré que plusieurs tentatives de redynamisation de développement local et d'amélioration du bien-être des résidants algérois n'ont pas pu atteindre leurs objectifs initiaux. En l'occurrence, la capitale algérienne ne figure pas dans la liste des villes rêvées à vivre. Au contraire, elle est jugée «invivable» par les résidants algérois après la période de terrorisme qui a dégradé le service public et freiné le développement local. La dégradation de la vie est aussi due à la gestion aléatoire et archaïque de la capitale. Nous avons exposé, dans cet article, l'évolution du système administratif de la capitale qui affiche un immobilisme inacceptable, malgré l'apparition des nouveaux codes de la commune et de la wilaya en 2011 ! Nous considérons que la révision des modes de management de la capitale constitue une urgence pour faire face aux conséquences de la période de terrorisme et faire relancer la capitale. Nous avons expliqué dans cette étude l'utilité de réformer le système administratif de la capitale algérienne pour mieux répondre aux besoins des résidants, mais aussi pour qu'Alger retrouve sa position à l'échelle régionale et internationale. Il faut alors renforcer l'intercommunalité et redynamiser la politique de la ville comme solutions fiables et réalisables pour développer l'action publique et améliorer la vie des résidants. Par ailleurs, l'administration de la capitale en concertation avec le ministère de l'Intérieur pourrait s'inspirer des expériences internationales en matière de gestion et d'organisation : ville-commune, ville-département et ville-Etat pour proposer une nouvelle organisation pour la capitale. Une réforme du système administratif de la capitale algérienne qui suppose transformer Alger en une capitale internationale doit tenir compte des principales tendances des capitales exemplaires, en particulier le renforcement des rapports avec l'administration centrale, améliorer les liens avec les administrés et le développement d'une politique internationale.
Bibliographie Benakezouh Chabane (2008) : «Le Conseil constitutionnel et les collectivités territoriales en Algérie», Sixièmes journées maghrébines de droit constitutionnel, faculté de droit de Tunis, Tunis. Chambre des pouvoirs locaux du congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe (2002) : «Capitales européennes», Actes de conférence, Code de la commune n° 11-10 daté du 22 juin 2011, Journal officiel de la République algérienne, n° 37 ; 2011. Code de la commune n° 90-08 daté du 07 avril 1990, Journal officiel de la République algérienne, n° 15 ; 1990. Danon Jean-François (2004) : «Quelques chiffres sur Paris», revue Pouvoirs, volume 3 - n° 110, PP 133 – 149. Datar, Territoires 2030, La Documentation française, Paris, 2005, pp. 119-134. Davezies Laurent (2004) : «Paris, capitale économique», revue Pouvoirs, volume 3, n° 110, PP 35 – 46. Halbert L., 2005, «Villes, réseaux et mondialisation», in Villes et Territoires, Cahiers français, 328, PP 18-23. Halbert L., 2005, «Des pôles économiques dans la métropole francilienne ?» in Harris Charles W. (1995): «Congress and the Governance of the Nation's Capital. The Conflict of Federal and Local Interests», Georgetown University Press, Washington 1995. Hiscock-Lageot Céline (2001) «La fin d'une anomalie : la reconnaissance d'une autonomie de gestion pour Londres», RFDA, p. 855. Ichebouden L. (1997) : Alger : Histoire et capitale de destin national, éditions Casbah, Alger. Loi 90-09 du 07 avril 1990 relative à la wilaya. Loi n 06-06 du 20 février 2006 portant loi d'orientation de la ville. Marcou Gérard (2004) : «Les réformes possibles : de la déconcentration accrue au pouvoir d'agglomération», revue Pouvoirs, volume 3, n° 110, PP 81 – 99. Nivet Philippe (2004) : «L'histoire des institutions parisiennes, d'Etienne Marcel à Bertrand Delanoë», revue Pouvoirs, volume 3, n° 110, PP 5 – 18. Ordonnance 97-15 du 31 mai 1997 fixant le statut particulier du gouvernorat du Grand Alger prévoit la création du conseil du gouvernorat. Renaudie Olivier (2008) : «Le statut des villes-capitales : le délicat compromis entre intérêt local et intérêt national», La note de veille, Centre d'analyse stratégique, n° 93 – Mars. Rullier Bernard (2004) : «La démocratie à la parisienne», revue Pouvoirs, volume 3, n° 110, PP 19 – 33. Spitz. Pierre Eric (2004) : «L'administration parisienne de la noblesse d'Etat à l'entreprise de services», revue Pouvoirs, volume 3 - n° 110, PP 115 – 128. Van Wynsberghe Caroline (2003) : «Les capitales fédérales : une comparaison», revue Internationales de Politiques Comparées, volume 10, n° 01, PP 63-77. Vandelli Luciano, «Paris-Londres-Berlin-Rome-Madrid», Pouvoirs, n° 110, 2004, p. 101-114. Zemmour Eric (2004) : «Le maire de Paris», revue Pouvoirs, volume 3, n° 110, PP 129 – 132.