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«Pour les initiés, la victoire de l'EN algérienne de rugby est totalement méritée» Abdelaziz Bougja. Président de Rugby Afrique, en exclusivité pour El Watan
Président de la Rugby Afrique (ex-Confédération africaine de rugby) depuis 2002, le Marocain Abdelaziz Bougja estime que le succès de l'EN d'Algérie pour son premier match international officiel, et de surcroît face à la Zambie, invaincue depuis 15 ans, est une victoire historique. Il évoque avec nous sa stratégie pour développer la discipline en Algérie et à l'échelle continentale. Un mot sur la victoire de la sélection algérienne face à la Zambie, pour sa première sortie officielle ? C'est une «victoire historique» puisqu'il s'agit d'une première victoire de l'Algérie dans un tournoi international de rugby. Il est assez rare en effet pour une équipe de réussir dès sa première participation à remporter le trophée d'une compétition au cours de laquelle elle est confrontée à des équipes plus aguerries. Je vous rappelle que l'Algérie a battu la Zambie, qui était invaincue à domicile depuis plus de 15 ans ! Derrière cette victoire, il y a un important travail réalisé par les dirigeants de la jeune Fédération algérienne de rugby. Depuis déjà quelques années, ils se sont totalement dévoués à l'émergence de la fédération, ce qui n'a pas été sans mal pour eux. Je voudrais aussi remercier le Comité olympique algérien et son président pour le soutien qu'il a apporté pour cette création, ainsi que le ministère algérien des Sports pour la confiance qu'il a accordée aux jeunes dirigeants algériens. Je renouvelle mes félicitations pour cette accession à la poule supérieure l'année prochaine. Considérez-vous cela comme un exploit, étant donné que c'est le premier match officiel de la sélection algérienne de rugby ? En effet, on peut le considérer comme un exploit dans la mesure où il s'agit de la première participation. Mais pour les initiés, ceux qui connaissent bien le rugby, il s'agit d'une victoire totalement méritée, compte tenu du travail abattu et de la composition de l'ossature de l'équipe faite de plusieurs joueurs évoluant dans le championnat français. Cette ossature servira à permettre aux jeunes Algériens en Algérie de mieux connaître le rugby et plus rapidement. Et surtout de donner aux Algériens une image positive de ce noble sport qu'est le rugby. Cela ne vous étonne pas, d'autant plus qu'en Algérie, le rugby n'est pas structuré, et qu'il n'y existe même pas de championnat ? Pour se structurer, il faut exister ! La fédération a été reconnue officiellement il y a moins de deux ans, des clubs et des associations ont vu le jour, la pratique chez les jeunes commence, des opérations de développement sont lancées. Une fois celles-ci acquises, un championnat pourra être mis en place, avec tout d'abord des jeunes, puis ensuite, au fil du temps, des équipes de bon niveau. Il faut un début à tout, mais surtout ne pas mettre «la charrue avant les bœufs». Avec votre expérience dans ce sport, aussi bien au Maroc qu'à l'échelle continentale, quel conseil pouvez-vous donner à la jeune Fédération algérienne de rugby, installée depuis deux ans seulement, pour développer ce sport en Algérie ? Je vais parler avec mon cœur mais aussi mon expérience. L'Algérie a la chance de lancer une fédération, vierge de lourdeurs ou d'habitudes, avec un formidable potentiel au niveau des jeunes. L'Algérie a la chance de mettre en place dès le départ une organisation avec des dirigeants et éducateurs qui poussent ensemble pour promouvoir les valeurs du rugby, le devoir, le partage, l'humilité, le fair-play, et j'en passe. Son réservoir doit être l'école, le lycée, l'université. La gouvernance des clubs et de la fédération doit être sans équivoque. Une fédération bien gérée est une fédération transparente dans son action, respectueuse des textes et des statuts, et respectant son obligation de communiquer à travers ses assemblées et ses comités. Le rugby n'est pas un sport médiatisé et très pratiqué en Afrique. Quelle est votre politique pour développer ce sport en Afrique ? Lorsque j'ai débuté mon mandat en 2002, il n'y avait que 6 pays africains qui jouaient au rugby sur des bases régulières : le Maroc, la Tunisie, le Zimbabwe, la Côte d'Ivoire, la Namibie et l'Afrique du Sud. Aujourd'hui, Rugby Afrique, c'est 38 pays à travers le continent qui participent à nos activités. En 15 ans, notre développement a été exponentiel. Tous les secteurs du développement ont été mis en place tant au niveau des jeunes, des compétitions, des éducateurs, des arbitres, de la santé… Rugby Afrique dispose aujourd'hui de 10 salariés à temps plein qui sillonnent le continent. Nous avons des compétitions : les moins de 20 ans, le rugby à 7 féminin, le rugby à 7 masculin, une compétition à travers le continent en fonction des niveaux des équipes — la Rugby Africa Gold Cup (1re division), la Rugby Africa Silver Cup (2e division) et la Rugby Africa Bronze Cup (3e division) — ainsi que quatre tournois régionaux de 4 équipes au niveau des pays les moins avancés en rugby. Un immense travail de terrain a été accompli tant par Rugby Afrique que par les fédérations membres afin de faire progresser notre sport en Afrique. Le rugby est une passion qui permet aux uns et autres de se surpasser. Enfin, nous avons signé un partenariat avec une télévision africaine, Kwese Sport, qui diffuse pour le moment en direct sur les chaînes satellitaires et internet, et nous annoncerons le 13 novembre prochain un partenariat stratégique qui va très largement contribuer à la visibilité du rugby en Afrique et à la visibilité du rugby africain dans le monde. Mis à part l'Afrique du Sud, l'Afrique n'est pas représentative à l'échelle mondiale. Que prévoyez-vous dans ce sens à court et long termes ? Il faut un temps pour tout. L'Afrique arrive tout juste dans ce concert et elle part avec un petit retard. Mis à part en Afrique du Sud, le rugby n'a jamais fait partie des sports pratiqués par les Africains, principalement par méconnaissance des règles de ce sport. C'est pourquoi il convient de commencer jeune, et le rugby à 7, dont les règles sont plus simples que celles du rugby à 15, est là pour rendre le rugby plus ludique et plus compréhensible. Regardez le foot, combien d'équipes africaines participaient à la Coupe du monde ? Hier aucune. Mais maintenant ce sont une, 2, 3, 4, 5… 8 équipes peut-être demain. En conclusion, nous devons encore travailler très dur pour faire avancer le rugby en Afrique. Des défis nous attendent, mais nous sommes prêts à les relever. C'est le message que j'adresse aux amoureux du rugby en Algérie. Un message très optimiste !