Le nouveau Parlement régional de Catalogne, issu du scrutin du 21 décembre dernier, a tenu sa séance inaugurale ce mercredi. L'assemblée a désigné Roger Torrent, membre du parti indépendantiste ERC, à sa présidence. Agé de 38 ans, il devient ainsi le plus jeune président du Parlement de Catalogne. Député depuis 2015, politologue de formation, il possède un master de l'Universitat Politècnica de Catalunya et de la Pompeu Fabra. Il a commencé sa carrière politique en devenant conseiller municipal de Sarrià del Ter (Girona), avant d'en devenir maire en 2011. Il a obtenu 65 voix pour et 56 contre lors de la session inaugurale du Parlement. Dans son discours après sa prise de fonctions en tant que président, Torrent a appelé à la «fin» de l'intervention de l'Etat avec l´article 155 et souhaite récupérer et restaurer entièrement les institutions catalanes. «Je défendrai les 135 voix du Parlement, ceux qui sont présents et ceux qui ne le sont pas», a-t-il affirmé. «Je veux faire de la démocratie et la coexistence des piliers fondamentaux de mon mandat», a-t-il ajouté. Les partis indépendantistes ont obtenu, sans surprise, la majorité au bureau de l'assemblée. Pour la deuxième fois consécutive, ils sont majoritaires en sièges (70 sur 135), au sein du Parlement qui fait sa rentrée. La formation Ensemble pour la Catalogne (JxCat), du président régional destitué Carles Puigdemont, qui se trouve depuis 3 mois en Belgique, a décroché 34 sièges. Son allié d'Esquerra Republicana de Catalunya (ERC), d´Oriol Junqueras, ancien vice-président de la Generalitat, actuellement en prison, s'en est adjugé 32 et la CUP, parti d'extrême gauche indépendantiste, 4. Cependant, huit élus ne peuvent siéger. Trois sont en prison à Madrid et cinq en exil, à Bruxelles. Les députés catalans ont désigné un bureau majoritairement indépendantiste, mais la question de la présidence de la région reste toujours ouverte. La question du vote des députés absents a été tranchée pour ne pas s'exposer à une contestation constitutionnelle. Ainsi, les élus incarcérés ont pu se faire remplacer par un vote de substitution, alors que les élus en exil ont décidé de s'abstenir. La question n'était pas anodine car, avec 70 sièges, les indépendantistes perdent leur majorité absolue avec l'absence de huit de leurs élus. La Cour constitutionnelle espagnole a donné un signe dans le sens d'une acceptation du vote des élus incarcérés, mais pas de ceux en exil. Dans l'hémicycle, sur son siège vide, comme sur ceux des 7 autres députés en prison à Madrid ou en exil en Belgique, un énorme ruban jaune en geste de solidarité avait été installé par les indépendantistes. Bras de fer A l'issue de cette première journée, le nouveau président du Parlement, Roger Torrent, de la gauche républicaine, aura la lourde de tâche d'inscrire à l'ordre du jour la session d'investiture prévue le 31 janvier, qui pourrait permettre à Puigdemont de retrouver la présidence de la Catalogne. Les partis de l'opposition et les 4 députes indépendantistes de la CUP rejettent d'ores et déjà «cette présidence Skype». Les partis de l'opposition, PP, PSOE et Ciudadanos, menacent de saisir la justice pour l'invalider. Si le président du Parlement force le règlement, il risque de commettre une illégalité. L'indépendantiste de longue date Ernest Maragall a ouvert, ce mercredi, la session, qu'il présidait provisoirement en tant que doyen, en accusant Madrid «d'humilier et de punir» les Catalans. Le discours d'Ernest Maragall, qui présidait la «table des vieux», réunissant les élus les plus âgés pour présider la session inaugurale du Parlement, a été particulièrement agressif contre le gouvernement espagnol. A l'extérieur du Parlement, l'Assemblée nationale catalane (ANC), une association indépendantiste, a réuni plusieurs milliers de militants. Ils étaient maintenus éloignés du parc de la Ciutadella par la police, où se trouve le bâtiment du Parlement «Liberté», et continuent de réclamer la libération des élus emprisonnés. Une probable investiture par Skype. Accusé de rébellion, sédition et malversation par la justice espagnole, Carles Puigdemont risque la prison s'il rentre à Barcelone. Lui et ses proches travaillent donc depuis plusieurs jours sur une investiture à distance. Il pourrait prononcer son discours d'investiture par Skype ou demander à une tierce personne de lire le texte à sa place. Cette procédure se heurte pourtant à de nombreux obstacles juridiques. «Le règlement du Parlement catalan précise que l'investiture doit se faire en présence du candidat qui doit présenter son programme devant le Parlement.» Les indépendantistes majoritaires à l'assemblée pourront décider de déroger ou préciser le règlement du Parlement en autorisant Carles Puigdemont à s'exprimer devant l'assemblée catalane. Il ne peut, en effet, pas rentrer en Catalogne car il serait immédiatement incarcéré. Le bras de fer entre l'indépendantiste catalan et Madrid continue. L'élection anticipée convoquée par Madrid n'aura pas apporté de solution à la crise dans laquelle se sont installées les relations entre la Catalogne et l'Espagne depuis le référendum pour l'indépendance tenu le 1er octobre 2017 et jugé illégal. L'Etat et sa machine judiciaire ne font preuve d'aucune clémence vis-à-vis de ses dirigeants. Le président du gouvernement espagnol a été précis et ferme : si le Parlement procède à une investiture par Skype ou tout autre moyen virtuel, Madrid ne reconnaîtra pas le nouveau président de la Generalitat et prolongera l'application de l'article 155 de la Constitution espagnole qui met sous la tutelle de l'Etat espagnol l'administration catalane.