En comptant les deux semaines de la première grève de novembre, la wilaya cumule une cinquantaine de jours d'une grève angoissante pour les élèves et leurs parents. Et elle n'est pas sans grosse pression sur les grévistes eux-mêmes, dont certains ont fini par baisser les bras et rejoindre les salles de cours dans plusieurs établissements scolaires de la wilaya. Climat pesant et flou presque total dans les établissements scolaires. La grève illimitée du Cnapeste bouclera aujourd'hui son 20e jour depuis qu'elle est devenue nationale, et son 34e jour depuis son déclenchement dans la wilaya de Béjaïa. Et rien ne présage l'arrêt immédiat du mouvement. Le fait que les deux parties en conflit campent sur leurs positions et le lancement, depuis hier, des décisions de radiation après des mises en demeure rendent la situation compliquée. A Béjaïa, elle l'est encore plus. En comptant les deux semaines de la première grève de novembre, la wilaya cumule une cinquantaine de jours d'une grève angoissante pour les élèves et leurs parents. Et elle n'est pas sans grosse pression sur les grévistes eux-mêmes, dont certains ont fini par baisser les bras et rejoindre les salles de cours dans plusieurs établissements scolaires de la wilaya. La direction de l'éducation (DE) a communiqué, hier, le chiffre de près de 600 enseignants qui ont cessé la grève et repris les cours hier. Selon la DE, le gros des effectifs ayant abandonné le mouvement est enregistré dans le palier du moyen avec 367 enseignants, suivi par le primaire avec 110 instituteurs. Dans les lycées, le palier où le Cnapeste compte le plus d'adhérents, la reprise a concerné 132 grévistes jusqu'à hier, montrant que le syndicat maintient l'essentiel de sa mobilisation dans le secondaire, où le taux de suivi de la grève est le plus important avec au moins un taux de 58%, et à se fier au chiffre que nous avons eu du directeur de l'éducation, pour qui la grève n'est suivie qu'à hauteur de 25% dans la wilaya. Selon lui aussi, parmi les grévistes, certains ont consenti à prendre en charge des classes d'examen, une sorte de service minimum qui a manqué au mouvement à son début. En contradiction avec les affirmations de la tutelle, le Cnapeste est loin de faire le même constat. Le conflit qui perdure s'engage aussi par une guerre des chiffres contradictoires qui fait dire aux animateurs du syndicat que la mobilisation est beaucoup plus importante que ne la présente la tutelle. Selon Slimane Zenati, coordinateur du Cnapeste Béjaïa, le taux de suivi est de 85% à l'échelle de la wilaya. Le bras de fer se joue aussi sur le plan psychologique entre un ministère de l'Education nationale qui table sur l'essoufflement et l'effritement des rangs des grévistes, en mettant en avant la décision de justice et le désarroi des parents d'élèves, et un Cnapeste qui présente une mobilisation tout à fait intacte. «Les chiffres de la DE sont sans fondement, il n'y a pas eu reprise. Qu'ils publient la liste de ceux qui ont repris», nous répond Slimane Zenati. Mieux, il affirme que les rangs des grévistes ont plutôt grossi, assurant que des enseignants de certaines écoles primaires et CEM ont rejoint la grève hier. «Nous venons d'organiser cinq conférences régionales et je peux vous assurer que les salles étaient combles», ajoute-t-il. La reprise partielle, nous avons pu la confirmer au niveau du CEM Base 5 de Sidi Ahmed, dans la ville de Béjaïa, où la direction a annoncé la reprise du travail, hier, de «neuf grévistes». Selon la DE, les décisions de radiation n'ont pas été adressées aux grévistes au terme de l'envoi des deuxièmes et dernières mises en demeure. Elles le seront à partir d'aujourd'hui. Mais, selon le Cnapeste, des grévistes les ont reçues. L'opération de leur remplacement a aussi débuté : 32 suppléants ont été recrutés, mais n'ont pas encore pris leurs fonctions. Au-delà des chiffres, la grève se poursuit dans un climat qui gagne en tension au fur et à mesure que l'on avance vers les limites de l'année blanche. Dans la wilaya, et à se fier aux chiffres de la DE, ils sont quelque 1500 grévistes dans les lycées, 1200 dans les CEM et 500 dans les écoles primaires. Le Cnapeste revendique «10 000 grévistes à l'échelle nationale». Dans sa déclaration qui a sanctionné la dernière réunion de son bureau national, il a annoncé la poursuite de la grève, notant qu'il ne constate rien de «concret» dans la prise en charge de ses doléances, y compris à Béjaïa où trois commissions ministérielles ont été dépêchées. Celle qui s'est penchée sur les volets administratif et financier, et qui a reçu mercredi les responsables du Cnapeste, a recensé «11 000 situations à régulariser». «Les enseignants ont besoin d'un règlement définitif de ces situations», nous dit Slimane Zenati. Les parents d'élèves nourrissent, quant à eux, l'espoir de l'arrêt de la grève et de «limiter les dégâts». Ceux du CEM Base 5 de Sidi Ahmed, par exemple, dont de nombreuses mères d'élèves, ont exprimé un profond sentiment de désarroi et un ras-le-bol général lors d'une assemblée houleuse où des propos durs ont été tenus à l'encontre du Cnapeste. «Le droit à la scolarité prime sur tous les droits. Il a été bafoué», a-t-on dénoncé, vigoureusement, n'oubliant pas de vilipender l'«Etat» tenu aussi pour responsable du profond malaise dans le secteur. Un appel est lancé pour se rassembler jeudi prochain devant le siège de la wilaya pour un énième cri de détresse à qui voudrait l'entendre.