La station de métro de la place des Martyrs a été une «étape importante» dans la mise en œuvre de l'archéologie préventive, qui a su allier patrimoine archéologique et aménagement du territoire dans le cadre des efforts visant à faire de la capitale une ville moderne. Tant attendue par les Algérois, la station de métro de la place des Martyrs est une station «historique» de par son emplacement dans la zone de l'antique cité d'Icosium, qui renferme un riche patrimoine archéologique, a précisé à l'APS le directeur de l'Office de gestion et d'exploitation des biens culturels (Ogebc), Abdelwahab Zekagh. D'une superficie de 8000 m2, la place des Martyrs était avant l'avènement du colonialisme un centre politique et commercial, d'où les découvertes archéologiques mises au jour «progressivement» par des chercheurs algériens. Des vestiges archéologiques répandus sur quelque 1500 m2 et quatre strates représentant différentes époques de l'histoire de la ville d'Alger, a indiqué M. Zekagh. Le visiteur peut voir aujourd'hui à la place des Martyrs la partie émergente des ces fouilles, en l'occurrence une ville ottomane sur une superficie de 750 m2, alors que d'autres vestiges restent enfouis en attendant «un aménagement adéquat». La découverte de ces vestiges «n'est pas fortuite», a soutenu M. Zekagh, précisant qu'elle est le fruit du Plan de protection et de sauvegarde (2007-2010). En effet, la carte archéologique de La Casbah réalisée en 2007-2008 a montré que la région regorgeait de patrimoine et d'histoire, a-t-il dit. Des vestiges de l'époque romaine avaient auparavant été exhumés en 1994, puis en 2004, avec la découverte de pavements en mosaïque d'une villa romaine à une profondeur de 60 m, de même que d'autres vestiges des époques phénicienne, byzantine, islamique et ottomane, retraçant plus de 20 siècles d'histoire, a-t-il fait savoir. Le chercheur, Kamel Setiti, du Centre national de recherches en archéologie (CNRA), a précisé que la partie exposée au public est un aperçu qui vise à sensibiliser les citoyens à l'importance des découvertes réalisées et à la nécessité de préserver ce qui sera exposé par la suite lors de la mise en service du métro au niveau de la station de la place des Martyrs. Grâce à ses archéologues et autres experts en protection du patrimoine protégé, l'Algérie a réalisé «une première», en employant des techniques modernes en matière de fouilles archéologiques dans une zone urbaine de l'envergure d'Alger, a-t-il affirmé. Les fouilles «ont été réalisées de pair avec des travaux de génie civil au titre d'un plan convenu entre les instances chargées des fouilles et l'Entreprise Métro d'Alger (EMA)», a-t-il dit, ajoutant que les travaux ont été encadrés par une équipe de chercheurs du CNRA et de l'Institut national français des recherches archéologiques préventives (INRAP). L'étape actuelle «consiste à présenter les travaux de fouilles à travers des explications détaillées, des dessins et des plans», a expliqué M. Stiti, précisant que les usagers du métro «ne seront pas pour l'instant en contact avec l'ensemble du site», dans la mesure, a-t-il dit, où un mur «provisoire» séparant le site a été érigé et qui sera «démoli dès l'achèvement des travaux du site du prochain musée». Le chercheur a mis en avant, à ce propos, l'importance d'informer les citoyens que les fouilles menées de 2013 à 2015 «ont été enfouies après avoir fait l'objet de marquage et de protection des éventuelles dégradations pouvant survenir lors de la réalisation de la nouvelle station de métro». Le métro d'Alger préservera les fouilles M. Zekagh a tenu à apporter des éclaircissements quant au devenir de la cité antique d'Alger et des objets découverts, affirmant, dans ce sens: «L'activité quotidienne du métro d'Alger n'aura aucune incidence sur les découvertes ou sur les constructions mitoyennes avec la place des Martyrs». «Le métro se trouve à 34 m sous terre et ses fondements ont été érigés à la place de l'hôtel de la Régence», explique M. Zekagh, précisant que l'EMA avait pris en considération «les caractéristiques de la zone urbaine» en initiant «des mesures techniques contre les vibrations». Les fouilles, qui ont duré 27 mois, ont permis, poursuit le même responsable, de «mettre au jour l'histoire enfouie de l'Algérie» et de former quelque 40 chercheurs spécialisés en archéologie préventive, outre la mobilisation quotidienne de près de 60 archéologues, algériens et français, spécialisés dans les grands projets de développement. Rappelant la découverte de «près de 10 000 pièces archéologiques retraçant 22 siècles d'histoire», M. Zekagh a relevé que ces pièces se trouvent actuellement en cours d'étude par un groupement algéro-français chargé de «remettre 12 rapports, dont 5 ont déjà été livrés». Le responsable a fait état, en outre, d'un «budget de 707 millions de dinars du Fonds national du patrimoine culturel pour le financement des fouilles et qui a été consommé à hauteur de 40% uniquement», affirmant que les rapports à livrer montreront «avec précision l'histoire de la ville d'Alger et seront exploités pour la réalisation du musée du métro et par les centres de recherches universitaires». Le directeur de l'OGEBC a fait savoir, par ailleurs, qu'une délégation de cadres du ministère de la Culture et de l'EMA avait effectué des visites à Rome et Athènes pour «prendre connaissance de l'expérience de ces pays qui ont réussi à allier l'histoire antique des villes et leur dynamique de développement». A noter que la wilaya d'Alger a pris en charge le dossier du musée du métro de la place des Martyrs avec le dossier de La Casbah.