Samedi. Un jeune pharmacien ouvre une officine à Alger. Sa fonction est relativement simple : soigner les blessures, panser les plaies, prescrire des cachets. C'est en vendant des médicaments que le pharmacien s'aperçoit que le pays est vraiment malade. Dimanche. Le jeune pharmacien ouvre une banque privée puisque les banques publiques sont fermées le samedi. Le pharmacien y met un peu d'argent, celui de l'Etat, et entrepose celui des autres. Lundi. Pour accélérer les dépôts, il arrose tout le monde, offre, promet, sponsorise, donne des cachets, mais des vrais. Mardi. L'ex-pharmacien a grimpé dans l'échelle des valeurs et devient un personnage important. Tout le monde le courtise, paye des artistes pour le compte du ministre de la Culture et des stations de dessalement pour le compte du ministère de l'eau. Il devient l'équivalent d'un ministre sans portefeuille, mais avec un gros portefeuille dans lequel tout le monde puise. Mardi soir. L'ex-pharmacien monte une télévision privée, ce que détestent par dessus tout les dirigeants de l'Etat, pour qui les caméras sont leur propriété exclusive. Mercredi. On décide d'arrêter le cirque parce qu'il ne fait plus rire personne. L'ex-pharmacien n'est pas arrêté, mais sa banque est fermée. Les clients protestent, mais ne seront pas remboursés. Jeudi. L'affaire de l'ex-pharmacien tourne au procès. Les caissiers, guichetiers, chauffeurs et gardes du corps sont accusés, dans l'ordre, d'avoir encaissé, aguiché, chauffé et gardé les corps, ce qui, normalement, ne relève que de leurs fonctions. Vendredi. C'est le jour du Seigneur et de la grande prière. Chacun prie pour que son nom ne soit pas cité dans l'affaire et les hautes personnalités de l'Etat prient collectivement pour qu'ils ne soient pas impliqués dans le procès. Quant au pharmacien, il prend toujours des cachets, mais pour dormir. Mais à Londres.