Le monde de la finance va connaître probablement de profondes mutations dans les périodes à venir en raison des évolutions induites par les réformes en cours, aussi bien dans la sphère réelle que dans la sphère financière et qui sont arrivées à leur point de convergence avec la mise en œuvre prochaine d'une stratégie industrielle. Il n'est pas sans intérêt de rappeler, même si le contexte n'est pas comparable, que la stratégie de développement des années soixante dix, axée principalement sur l'industrie, s'est accompagnée d'une réforme financière qui avait remodelé la fonction des banques. La restructuration industrielle des années quatr-vingts a également précipité le mouvement des réformes financières sans pour autant améliorer l'action des banques dans le financement de l'économie. Il faut attendre les grandes réformes du milieu des années quatre-vingts pour voir l'amorce d'une nouvelle redistribution des rôles des banques et la projection d'une nouvelle régulation financière qui devait aboutir à terme à une offre de financement de l'économie à travers plusieurs canaux. Cela ne s'est pas totalement réalisé parce que l'économie d'endettement est toujours là. Elle a survécu à toutes les réformes aussi bien celles initiées sous l'ère du dirigisme que celles des temps présent à l'ère du libéralisme sauvage. Le marché du crédit couvre tous les besoins de l'économie sans partage des risques. L'économie d'endettement signifie que la régulation est réglée par le marché du crédit et qu'il existe une très forte imbrication entre la politique monétaire (dirigée par la Banque centrale) et la régulation des banques. La politique de la Banque centrale a un impact direct sur les banques via un ensemble de ratios réglementaires. Le problème de la régulation financière dans un tel contexte est la prévention puis la détection de la crise bancaire à temps et surtout le traitement à chaud mais aussi à froid avec la question de la socialisation ou pas des pertes. Il y a donc une préoccupation sur la façon dont une crise bancaire pourrait être traitée et cela constitue un point majeur puisqu'une crise peut coûter des points de PIB et étrangler la croissance. La transition n'a pas fini de durer et on arrive aujourd'hui à envisager une possible sortie du tunnel parce qu'on considère que les conditions sont réunies. La régulation financière jouera invariablement entre la régulation par le marché et la régulation par les banques. La tendance qui se dessine ailleurs est le passage à une régulation bancaire de troisième génération qui fait la distinction entre la micro et la macro. L'illustration de cette distinction réside dans le modèle anglais de la FSA (Financial Supervisory Authority). Celui-ci a rassemblé sous la même coupe la régulation du marché et la régulation bancaire qui était auparavant sous la responsabilité de la Banque d'Angleterre. Ce type de modèle est en train d'émerger en Europe et tend à se diffuser un peu partout. Mais à côté de ce modèle dit de troisième génération, il existe une diversité de modèles de supervision nationale. Il y a d'un côté des modèles de régulation plutôt proche de la Banque centrale (c'est le cas de la France) et d'un autre côté des modèles où la supervision bancaire a une existence à part entière, totalement disjointe de la Banque centrale et de la direction du Trésor. Il y a, maintenant dans le monde, des forces centrifuges importantes poussant à une différenciation des modèles de régulation bancaire qui se prolonge dans les modèles de régulation de marché. A partir de ce constat, se pose la question du type de réforme à imaginer pour relever le défi de cette fragmentation de la régulation. Il y a deux approches possibles. La première est de dire que nous sommes dans une situation complexe qui se caractérise par la fragilisation du bilan des banques et la détérioration de sa qualité en raison du poids du marché du crédit sans partage des risques dans le financement de l'économie d'une part, et la faiblesse du marché financier, d'autre part. La deuxième approche, c'est de continuer à mettre l'accent sur la régulation des restructurations et la régulation prudentielle à partir de la privatisation des banques publiques annoncées dans une optique de concurrence saine et d'égalité de traitement. En fonction de l'approche discriminée, se posera alors le problème du prescripteur de la régulation et par conséquent du modèle de régulation financière à mettre en œuvre pour marquer la fin de la transition.