Dans le cadre du jumelage et des échanges, quatre magistrats de la cour de Lyon, accompagnés du secrétaire général de la cour de Annaba, ont séjourné, hier, dans la wilaya d'El Tarf. Ils ont été reçus par le président, le procureur de la République et le juge d'instruction du tribunal d'El Tarf. Une coopération qui a pour objectif la formation spécialisée de magistrats dans les domaines comme celui de la famille, de l'enfance, du social ou encore de l'économie. Le thème de la visite d'hier est, du moins pour ce qui concerne El Tarf, la délinquance économique et sociale. Aucune coïncidence, nous a-t-on fait remarquer, avec les scandales de Khalifa ou de la BCIA ou encore celui, plus proche de nous, du wali d'El Tarf. D'ailleurs, « les affaires de ce genre n'épargnent plus aucun pays », a tenu à préciser François Blanc, procureur adjoint de la République près le tribunal de Bourg-en-Bresse. « En France, a-t-il expliqué, nous avons un grand problème avec la grande criminalité économique internationale. Il s'agit en grande partie des activités de la mafia russe et contre laquelle nous sommes désarmés à cause de la corruption qui gangrène la justice de ce pays. Il y a encore une grande délinquance économique et financière nationale liée aux grandes affaires politico-financières. Elle pose toujours problème, car elle exige la mise sur pied de services de police et de gendarmerie spécialisés. En revanche, nous sommes mieux préparés contre la moyenne délinquance économique et financière, celle qui concerne les liquidations, les banqueroutes, les faillites. En France également, les marchés publics sont au centre de malversations et de corruption. Quant à la petite délinquance économique et financière, celle des PME/PMI... nous sommes incapables de la traiter efficacement, car les sanctions pénales qui sont infligées tendent à dévitaliser ce secteur. Nous sommes plus pour la sanction commerciale, par exemple interdiction de gestion de 5 ans pour le chef d'entreprise, que pour la sanction pénale. » Fethi Lakhel, procureur de la République d'El Tarf, a ensuite présenté les dispositifs juridiques et judiciaires mis en place contre la délinquance économique et financière. Il s'est attardé sur le décret exécutif 06-348 portant extension de la compétence territoriale de certains tribunaux, procureurs de la République et juges d'instruction qui institue des pôles régionaux de lutte contre la délinquance économique et financière, de nouvelles structures multisectorielles et multidisciplinaires contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme, les infractions à la réglementation des changes et des mouvements de capitaux à l'étranger, la contrebande et l'usage et le trafic illicite de stupéfiants. Pour le magistrat d'El Tarf, les textes d'application tardent à venir. En effet, les rôles, les fonctions et les missions de chaque acteur de ces pôles doivent être clairement définis. Ils doivent, dès leur entrée en action, pouvoir bénéficier d'une logistique adaptée et de l'usage de méthodes de travail modernes. Ils doivent nécessairement être liés directement à des organismes comme les douanes, les directions du commerce, etc. Ainsi, au départ, il faut irrémédiablement une assistance spéciale. Il ajoute encore qu'il serait souhaitable que l'on s'achemine vers des pôles semblables à ceux mis en place de l'autre côté de la Méditerranée.