Haut cadre de l'Etat, Youcef Beghoul a publié récemment un ouvrage d'histoire intitulé Le Manifeste du peuple algérien. Les amis du Manifeste de la liberté » (Editions Dahleb, Alger 2007). Le livre, comme l'indique son titre, aborde un segment de l'histoire du Mouvement national algérien, à savoir le lancement par Ferhat Abbas en février 1943 du « Manifeste du peuple algérien » qui préconise un Etat algérien fédéré à la France. Et la création en mars 1944 des Amis du Manifeste et de la liberté (AML) après l'accord entre Ferhat Abbas, Cheikh Ibrahimi et Messali Hadj. Ensuite, les AML tiennent leur 2e congrès au cours duquel ils se prononcent pour l'indépendance de l'Algérie et contre l'idée de fédération avec la France. Les AML n'étaient pas un parti politique mais un « groupement de tendance pouvant appartenir à des partis politiques mais ayant sur le problème colonial et sa solution, la même opinion », relève l'auteur (p. 97). Et la question qui se pose entre autres consiste à savoir comment Ferhat Abbas, comme pour être un légaliste, un modéré et un partisan de l'assimilation, radicalise ses prises de positions vis-à-vis de la France coloniale . « De la recherche de l'égalité dans l'assimilation à la demande de la séparation, il y a une gamme de demandes transitoires et toute une série de portes fermées qui explique l'évolution des mentalités » (p.101). Le projet Blum-Violette (1936) est rejeté par le colonat. Il visait à accorder la nationalité française à 21 000 Algériens. En juin 1943, le gouverneur général de l'Algérie et commissaire d'Etat pour les affaires musulmanes, le général Catroux se prononce contre l'indépendance de l'Algérie devant la commission des études économiques et sociales. En septembre de la même année, il prononce la dissolution de la section indigène des délégations financières et assigne en résidence forcée Sayah Abdelkader et Ferhat Abbas. Le 12 décembre 1943, de Gaulle prononce un discours à Constantine qui prône une politique d'assimilation. Celle-ci se traduit par l'ordonnance du 7 mars 1944 qui confère la citoyenneté française à 65 000 Algériens et porte à deux cinquièmes la proportion des Algériens dans les assemblées locales. Cette vision n'entame pas la domination française. Néanmoins, elle est bloquée par les colons. Ainsi, c'est suite à ces manœuvres qui ont mené à l'impasse quant au règlement politique de la question algérienne qu'intervient la création des AML. Tous ces évènements sont évoqués dans l'ouvrage où on trouve aussi des témoignages d'acteurs ayant vécu cette période à l'exemple de Ferhat Abbas, Ahmed Boumendjel, Benyoucef Benkhedda, Ahmed Bouda, Saâd Dahleb et Hocine Lahouel. Y sont insérés en annexe des documents intervenants tels le Manifeste du peuple algérien, l'additif au Manifeste, la lettre de Ferhat Abbas au général de Gaulle, les statuts des AML et les résolutions du 2e congrès des AML.