La douleur n'est pas seulement, comme la joie, un état moral. Elle est souvent, hélas trop souvent, un état physique. La douleur, lorsqu'elle se fait vive est un constant rappel de notre condition humaine : nous sommes des êtres de chair et de sang et notre quête de bonheur nous met continuellement en rapport avec des objets froids, durs, contondants au rapport composants. Nos membres meurtris saignent, se gangrènent et se détachent de nous comme des corps étrangers. De la même manière, se forment au plus profond de nous des corps durs comme la pierre, qui travaillent en permanence notre chair. Comme une pâte. La faim, la soif, les maladies nous tourmentent sans cesse. Faibles, sans défense, sans ressources, notre regard se tourne, actuellement, vers la religion et/ou la science. Hélas, la religion, efficace pour ce qui touche à l'âme de l'être, s'avère, à moins vraiment d'un miracle — étrangement impuissante dès qu'il lui est demandé de se pencher sur un cas douloureux relevant purement et simplement du physique. Hélas, aussi pour la science : quand elle n'est pas impuissante à guérir, elle est aux mains d'individus que leurs intérêts rendent pratiquement inaccessibles pour le commun des mortels. Alors, l'homme souffrant n'est sûr que d'une chose, entre la religion qui prête un secours purement moral et une science qui tend avec le matérialisme des temps modernes à devenir immorale, il ne reste au malade cloué au lit par la douleur que son cri d'agonisant par lequel il tente d'attirer l'attention des autres sur lui. C'est incontestablement ce cri, ou plutôt ce concert de cris douloureux eux-mêmes, à force d'insistance qu'a capté l'oreille de l'association Amel des praticiens libéraux de Bouira, qui, consciente de l'urgence d'une prise en charge alliant traitements médicaux, psychotérapeutiques et activités sportives, lance un pressant appel aux autorités concernées pour la création d'un centre antidouleur. Pour sa gestion, l'association Amel, qui souhaite faire participer aussi bien le secteur privé que le secteur public ainsi que les associations concernées, prévoit un médecin, deux infirmiers, deux assistantes sociales et deux ambulances, en cas d'évacuation vers des structures mieux équipées. En plus d'administrer des soins appropriés, indépendamment du rang social des sujets, le centre antidouleur, ainsi conçu par l'association Amel, se chargera d'établir des statistiques, de faire des études épidémiologiques dans la région et d'organiser des rencontres avec les professionnels pour échanger les expériences et communiquer les résultats des travaux de recherche en la matière.