L'auteur Paul Valadier dit que les religions ont été des préludes à la science. En effet, il est bien appris que, dans l'Antiquité, la connaissance était fondamentalement spirituelle. La notion purement discursive fut alors dominante. La connaissance spirituelle était, originairement, liée à la reprise en main de sol et à la découverte du phénomène de la création en tant que mystère. C'est ce qui a inspiré l'élément du savoir, à travers son pourquoi, notamment. Plus tard, l'idée d'une phénoménologie de l'esprit, chère à la « révolution » des lumières, a initié le fait d'instruire la connaissance pour soi ; cette notion, adaptée à l'esprit, puisque nous ne pouvons connaître que ce qui est connaissable, et les choses connues ne le sont que parce qu'elles sont adaptées à l'esprit par l'esprit, Kant marquera, de son temps, l'idée de la connaissance. C'est ainsi que la science, en tant que phénomène variable, et donc modifiable, ne s'est pas vu négliger le fait que la connaissance, inspirée du réel, n'est pas forcément la vérité. La distinction était à faire entre entendement humain et raison. Ces questions d'ordre métaphysique classique et moderne ont inspiré l'évolution de la philosophie des lumières. Pendant très longtemps et encore aujourd'hui, pour certains, la science qui procède de l'idée de la configuration du monde et de l'ordre des choses, intègre le principe de la foi et tente de s'ériger en valeur absolue. Elle se distingue de la religion notamment à travers l'essor de sa spécialisation et les questions des recherches fondamentales qui la caractérisent dans certains domaines. Le fait de déduire que les religions sont des préludes aux sciences nous renvoie aussi au fait d'une approche de la vision du monde circonstancielle, liée à une condition anthropologique de l'époque définissant la raison humaine. Il demeure évident que les prémices de la connaissance consubstancielle à la condition humaine formulent déjà, à travers l'instinct de conservation, une culture du comment. Ce qui, a posteriori, va travailler également la notion de devenir. Marqué de cette idée de la prééminence de soi, l'être humain, à travers son outillage de la vie, au fil des âges, traduira son adhésion au monde par une notion sacralisatrice. Née sous l'emblème de la notion de la reconnaissance de soi et de l'identification au monde, la condition humaine de l'étant favorise la culture de la puissance sur l'ordre des choses et, par là, de sa connaissance. N'oublions pas que la connaissance de l'Univers, à travers les disciplines que sont l'astrologie, l'astronomie, la physique, la géologie ont été des prémices de la science adoptée par l'homme, qui définissent bien l'ordre de la communication des premiers questionnements sur la vie. Pour s'adapter au monde et à la nature, l'être humain se devait, d'abord, de les connaître pour les domestiquer ensuite. La science, comme la religion, a eu pour faculté de connaître ce qui est déjà, et donc ce qui se révèle pour nous, et même ce qu'il peut en advenir. Elles divergent, toutefois, dans cette incapacité d'intégrer l'information des vérités, car un grand élément les motive cependant toutes les deux, le phénomène de la foi. Il s'agit de reconnaître que l'adhésion à la science implique une croyance, que l'on veuille ou pas, du fait que l'on est toujours porté à connaître ce qui nous motive ou nous interpelle. Nous pouvons observer que science et religion véhiculent le questionnement sur la vie à travers les éléments du comment et du pourquoi. Depuis les âges reculés, raison et foi se sont continuellement imbriquées. La vocation de la science et son évolution ont fait primer la notion utilitaire en rapport avec la religion qui, tout en s'instruisant en tant que discipline de vie, favorise également le questionnement par la notion du sens, en s'obstinant à conserver le privilège de la vérité du sens par la notion de révélation, ce qui lui confère son statut d'absoluté et qu'il ne faut pas confondre avec l'absolutisme. En revanche, si la connaissance se traduit toujours par une fin relative car on ne finit jamais de chercher, la religion qui, elle, s'établit à travers le questionnement permanent, se propose également par une théologie discutable qui n'est, en fait, que relative, d'où le concept de la vie éternelle (après la mort). On peut en douter cependant sur le fait que toute existence est suivie par une fin relative. Le discours religieux, lui-même, ne se gardera pas d'interférer sur les problématiques scientifiques, d'où la question de la valeur éthique face aux exigences et évolutions de la science. Tous ces questionnements impliquent des mouvements intellectuels de caractéristiques existentielles que dénie parfois et même trop souvent, la science en tant que valeur définitivement établie et reconnue, selon beaucoup de scientifiques. Or, nous savons très bien que les exigences du sens et de la qualité, en rapport à la vie, sont enracinées dans la condition humaine, qu'elles finissent parfois par s'exprimer dans une mobilisation violente. En témoignent, aujourd'hui, les débordements et fanatismes de tout bord. Il est, a fortiori, reconnu que la religion, pour sa part, a besoin, fondamentalement de la connaissance, donc d'une rationalité pour survivre. La connaissance, quant à elle, est nécessairement mue par le principe de la rationalité pure et ne se reconnaît que peu ou pas à travers la capacité émotionnelle. Ce qui la met souvent en porte-à-faux avec la religion qui, selon les circonstances, tente de se départir de la faculté rationnelle pour ne s'exprimer qu'en tant que valeur transcendantielle.